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BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ BOTANIQUE
DE FRANCE vi - L À d FONDÉE LE 23 AVRIL 1854
ET RECONNUE COMME ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE
PAR DÉCRET DU 17 AOUT 1875
TOME TRENTE-SIXIEME Towg XF)
| (HBeuxième série.
1889
| Premiére partie : COMPTES RENDUS DES SÉANCES. Deuxième partie : CONGRÈS DE BOTANIQUE TENU A PARIS. Troisième partie : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE ET TABLE DU VOLUME.
(Chacune de ces parties a une pagination spériale.)
PARTS
AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ
RUE DE GRENELLE, 84
SOCIETE BOTANIQUE
DE FRANCE
y
18625 — Imprimeries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris.
BULLETIN
SOCIETE BOTANIQUE
DE FRANCE
FONDÉE LE 23 AVRIL 1854
ET RECONNUE COMME ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE
PAR DÉCRET DU 17 AOUT 1875
TOME TRENTE-SIXIEME
(Deuxième série. — Tome XI’)
PARIS
AU BUREAU DE LA SOCIÉTÉ
RUE DE GRENELLE, 84
1889
LISTE DES MEMBRES
ADMIS DANS LA
SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE
PENDANT L'ANNÉE 1888
MEMBRES. NOUVEAUX.
AUDIGIER (PIERRE), négociant, rue Terrasse, 16, Clermont-Ferrand.
BOUBÉE, naturaliste, place Saint-André des Arts, 3, Paris. BRANDZA (MARCEL), licencié ès sciences naturelles, rue Berthollet, 16, Paris.
DANGUY (PAUL), licencié és sciences naturelles, préparateur au Muséum, rue de l'Eure, 7, Paris.
DEVAUX (Henri-Encar), licencié ès sciences physiques et ès sciences naturelles, rue Linné, 33, Paris.
FENOUL (GUSTAVE), professeur de l'Université, rue du Jura, 9, Paris.
FIRMIN, vétérinaire, Nissan (Aude).
FORTIER (M'* Mare), fabricante d'herbiers artificiels, boulevard Poissonniére, 20, Paris.
HUA (HENRI), licencié és sciences naturelles, rue de Villersexel, 2, Paris.
JADIN (FERNAND), chef des travaux de botanique à la Faculté des sciences, rue Dessale, 4, Montpellier.
KŒNIG (M'* MARIE), inspectrice des écoles maternelles, rue Duphot, 18, Paris.
LAMIC (J.), professeur de botanique à l'École de médecine de Tou- louse. `
LANDES (GASTON), professeur de sciences au lycée de Saint-Pierre (Martinique, Antilles françaises).
SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE.
LIGNIER (OcrAvE), professeur de botanique à la Faculté des sciences de Caen.
LYOTARD (PiEnnE-VICTORIN), commis des ponts et chaussées, rue Chennebouterie, 12, Le Puy.
MONAL (ERNEST), licencié ès sciences, rue des Dominicains, 8, Nancy.
NEYRAUT (JEAN), dessinateur aux chemins de fer du Midi, rue des Camps, à Bègles, prés de Bordeaux.
NORMAND (HENRI), étudiant en médecine, boulevard Bérenger, 28, Tours. .
PÉPIN (J.), chef du laboratoire des graines au Muséum, rue de Sévres, 11, Paris.
PERROUD (D^), médecin de l'Hótel-Dieu, à Lyon.
PLANCHON (D: Louis), rue de Nazareth, 5, Montpellier.
PONS (D: Simon), à llle-sur-Tét (Pyrénées-Orientales).
PRAY (FÉLIX), chimiste, boulevard Saint-Germain, 110, Paris.
RASCOL, pharmacien, à Chalabre (Aude).
RESPAUD (AUGUSTE), instituteur, à Fitou (Aude).
ROTHERT (LapisLAs), Banque du Commerce, Riga (Russie).
RUSSEL (WILLIAM), licencié és sciences naturelles, rue Berthollet, 17, Paris.
SILHOL (JEAN-FÉLIx), instituteur, à Saint-Paul-et-Valmalle, par Gignac (Hérault).
ADMIS COMME MEMBRE HONORAIRE.
HÉRIBAUD (FRÈRE), professeur au pensionnat des frères des Écoles chrétiennes, à Clermont-Ferrand.
LISTE DES MEMBRES.
ADMIS COMME MEMBRE A VIE,
PLANCHON (Louis).
MEMBRES DÉCÉDÉS.
BUCHINGER. CANNART D'HAMALE. COLVIN. CONTEST-LACOUR. DELAMARE. GRILLET. HENNECART. LARCHER (Ad.). LECHEVALLIER. LIEURY.
LORET.
MORIÈRE. Prancnon (Émile). SAGOT. TIMBAL-LAGRAVE. TROUILLARD. WASSERZUG.
SOCIETE BOTANIQUE
DE FRANCE
SÉANCE DU 11 JANVIER 1889.
PRÉSIDENCE DE M. H. DE VILMORIN.
M. de Vilmorin, en prenant place au fauteuil, s'exprime en ces termes :
Ce serait contraire aux usages de la Société, contraire à mes capacités et contraire surtout à votre agrément, que de vous adresser un discours au début de cette année.
Je ne puis cependant prendre possession du fauteuil de la Présidence sans remercier en deux mots la Société de m'y avoir appelé quoique indigne.
Au début d'une année où l'une de nos grandes affaires sera d'accueillir les étrangers, vous avez appelé aux honneurs de la Présidence un de vos collégues les plus étrangers aux profondes recherches scientifiques. Vous avez voulu, égarant pour une fois votre choix en dehors des maitres de la science, distinguer un membre de la catégorie des amateurs, catégorie que je serais heureux de voir plus nombreuse dans la Société.
Ce sera mon ambition, Messieurs, que de ne pas tromper votre attente en me dévouant sérieusement au bien de la Société. Secondé comme je le serai par les principaux officiers de la Société, par son dévoué Secré- taire général, par son excellent Trésorier, par le Bureau et le Conseil que vous connaissez, la tàche ne sera pas difficile. Je ferai tout ce qui dépendra de moi pour que notre Compagnie recoive en toutes circon- stances la justice et l'honneur qui lui sont dus et je termine par ce vœu qui ne vous paraitra pas déplacé au début de janvier: Que l'année 1889
T. XAANT, (SÉANCES) 1
10 SÉANCE DU 44 JANVIER 1889.
soit une année de prospérité et pour la Société botanique de France et pour chacun de ses membres.
Cette allocution est accueillie par les applaudissements de l'assemblée.
M. Duval, secrétaire, donne lecture du procés-verbal de la séance du 28 décembre 1888, dont la rédaction est adoptée.
M. le Président, par suite des présentations faites dans la der- niére séance, proclame membres de la Société :
MM. BouLET (Vital), étudiant, rue Linné, 19, à Paris, présenté
par MM. Audigier et Billiet.
Harman (l'abbé), professeur au collège de la Malgrange, prés de Nancy, présenté par MM. l'abbé Hue et Malinvaud.
LE GENDRE, inspecteur des contributions indirectes à Li- moges, présenté par MM. Malinvaud et Foucaud.
Ravaz, professeur de viticulture, à Cognac (Charente), pré- senté par MM. Durand et Viala.
M. le Président annonce ensuite deux nouvelles présentations.
Dons faits à la Société :
Boulay, Les arbres ; questions de botanique générale.
Clary, Catalogue des plantes observées à Daya (Algérie).
Debeaux, Notes sur quelques plantes rares ow peu connues de la flore oranaise.
Fliche, Le reboisement, étude botanique et forestière.
Giard, Note sur deux types remarquables d'Entomophthorées.
Heckel et Schlagdenhauffen, Nouvelles recherches sur le Baobab.
Magnin, Sur l'hermaphrodisme parasitaire et le polymorphisme floral du Lychnis dioica DC.
Niel, Notice biographique sur Alexandre Malbranche.
Arcangeli, Sull' organogenia dei fiori del Cytinus Hypocistis.
— Sulla teoria algolichenica. ;
— Sul Lycopodium Selago.
— Ancora sopra la Medicago Bonarotiana.
— Di nuovo sulla questione dei gonidi.
— Sulla Fistulina hepatica Fr.
— Osservazioni sulla fioritura del Dracunculus vulgaris Schott.
— Sopra una nuova specie del genere Taccarum.
SÉANCE DU 14 JANVIER 1889. 14
Arcangeli, L’ Amorphophallus titanum Beccari. — Ancora sul Taccarum cylindricum. — Sopra alcune specie di Batrachospermum. — Sulla caprificazione e sopra un caso di sviluppo anormale nei fiori del Ficus stipulata Thunb. — Contribuzione alla Flora toscana. - Osservazioni sul impollinazione in alcune Aracee.
— Osservazioni fatte in alcune recenti erborazioni. — Sopra la fioritura del Dracunculus crinitus Schott.
— Ulteriori osservazioni sopra la Canna iridiflora hybrida.
— Elenco delle Protallogamee italiane. — Quelques expériences sur l'assimilation.
— Sopra i serbatoi idrofori dei Dipsacus e sopra i peli che in essi si
osservano.
— Sopra alcune dissoluzioni carminiche destinata alla coloritura degli elementi istologici.
— Sopra l'azione dell” acido borico sul germogliamento dei semi. — Sull' esposizione di geografia botanica tenuta in Copenhagen nell' aprile 1885.
— Sulla fioritura dell Euryale ferox Sal.
— Sulla fermentazione panaria.
— Sul Saccharomyces minor Engel.
— Sul Kefir.
— Sul germogliamento dell" Enryale ferox Sal.
— Ulteriori osservazioni sull" Euryale ferox Sal.
—- La fosforescenza del Pleurotus olearius DC.
Pirotta, Intorno ad una sensitiva dell Argentina.
Sulla structura delle foglie dei Dasylirion.
— Per la storia dei battaroidi delle Leguminose.
Saccardo, Sylloge Fungorum, vol. VI et vol. VII, pars 2.
Carl von Linnés, Ungdomsskrifter samlade af Ewald Ahrling. Journal and Proceedings of the royal Society of New-South Wales, vol. XXII (1888), part. 1.
|
M. Leclerc du Sablon fait à la Société la communication sui-
vante :
12 SÉANCE DU 14 JANVIER 1889.
OBSERVATIONS SUR LA TIGE DES FOUGÈRES par M. LECLERC DU SABLON.
On sait comment l’œuf des Fougères se divise peu de temps après sa formation en quatre cellules : l’une de ces cellules produit le pied, cette sorte de suçoir qui s’enfonce dans le prothalle pour y puiser la nour- riture nécessaire à la jeune plantule, la seconde donne la première racine qui s'enfonce dans le sol, la troisième donne la première feuille qui s'éléve dans l'air et la quatrième est le point de départ de la tige qui reste longtemps très courte; mais le développement ultérieur de la plan- tule est moins connu. Je me suis proposé, en premier lieu, d'étudier la facon dont s'effectuait le passage entre la structure de la racine et celle de la tige; j'ai étudié ensuite les diverses modifications que subissait la tige avant de présenter sa structure définitive. Le prémier exemple que je citeraiest le Pteris aquilina.
A quelques millimétres au-dessous du prothalle, la jeune racine pré- sente une structure binaire absolument normale. Les faisceaux du bois, réunis l'un à l'autre par une moelle peu abondante et séparés de l'endo- derme par une seule assise de péricycle, sont formés chacun par trois ou quatre vaisseaux, les vaisseaux les plus gros étant les plus rapprochés de l'axe de la racine.
Si l'on examine des coupes faites dans la racine de plus en plus prés de la base de la tige, on voit cette structure se modifier peu à peu. Il se forme de nouveaux vaisseaux à la face interne à chaque faisceau du bois, si bien qu'un peu avant d'arriver au niveau du pied, les deux faisceaux sont réunis par la base, et la moelle a complètement disparu. Le liber forme toujours, de part et d'autre de cette lame vasculaire, deux îlots encore distincts. Mais bientôt chacun des faisceaux du liber, en s'élar- gissant, va s'insinuer entre le péricycle et les pointes de la lame vascu- laire, les deux ilots du liber se rejoignent alors et forment une ceinture complète autour du bois. Dans le Pteris aquilina, ce changement dans la disposition du liber n'est complètement effectué qu'au niveau du pied. Dans les plantules que j'ai observées, les faisceaux du liber ne se rejoi- gnaient pas en méme temps vis-à-vis de chacune des pointes de la lame vasculaire. Un peu au-dessous du pied, on voit déjà une assise de liber entre le péricycle etla pointe vasculaire qui est tournée du cóté du pied, tandis que la pointe opposée est encore appuyée directement contre le péricycle. C'est là en quelque sorte un état de transition entre la struc- ture dela tige et celle de la racine; daas une de ses moitiés en effet, le cylindre central a encore la structure normale de la racine, tandis que
LECLERC DU SABLON. -— OBSERVAT. SUR LA TIGE DES FOUGÈRES. 13
dans l’autre moitié il présente déjà la particularité la plus importante qui caractérise la tige des Fougères. On sait en effet, que dans la tige des Fougères le liber forme un anneau complet autour du bois; à partir du niveau, où l’on trouve cette disposition réalisée dans la jeune plan- tule, on peut donc considérer qu'on a affaire à la structure normale de la tige. M. Gérard (1), qui a étudié le passage de la tige à la racine chez l'Asplenium striatum et l'Adiantum cuneqtum, est arrivé à des résultats comparables, pour les points essentiels, avec ceux que j'indique pour le Pteris aquilina.
Vers la base de la tige, les vaisseaux du bois les plus petits sont encore vers l'extérieur comme dans la racine, mais cette disposition est bientôt troublée par l'insertion des feuilles. La première feuille, en effet, s'insère vis-à-vis de la pointe ligneuse qui est opposée au pied. Les petits vaisseaux qui sont situés vers cette pointe s'en vont donc dans la feuille et au-dessus de l'insertion de cette feuille, le corps ligneux de la tige est à peu près arrondi.
Le cylindre central de la tige est donc formé à un moment donné par une partie ligneuse au centre, un anneau de liber autour du bois et une assise de péricycle autour du liber. Bientôt cette structure se modifie encore. Vers le centre de la partie ligneuse apparaissent des éléments libériens semblables à ceux de l'anneau du liber qui entoure le bois ; ce liber interne s'élargit ensuite peu à peu. On trouve alors dans la tige : au centre du liber, puis un anneau de bois, puis un anneau de liber, puis le péricycle.
Plus haut encore, au-dessus de l'insertion d'une feuille, l'anneau ligneux se trouve interrompu en méme temps que l'anneau du liber externe. Le liber interne rejoint le liber externe par la solution de continuité qui s'est produite dans l'anneau du bois; puis l'endoderme se déprime vis- à-vis de cette solution de continuité et s’enfonce de plus en plus vers l'axe de la tige. La section du bois qui a ainsi la forme d'un fer à cheval est. entourée complètement par le liber, lequel est entouré par le péricycle ; la section de l'ensemble du cylindre central présente donc aussi la forme d'un fer à cheval. ;
Plus haut encore, au-dessus de l'insertion d'une autre feuille, on con- state dans une coupe une nouvelle solution de continuité dans le bois et le liber. Le bois forme alors deux ilots distincts entourés chacun de liber. Entre ces deux cordons vasculaires, l'endoderme s'étrangle de façon à former deux endodermes distinets. Le cylindre central s'est donc divisé en deux parties, entourées chacune par un endoderme spécial. Ces divi-
(1) Recherches sur le passage de la lige à la racine( Annales des sciences naturelles 6* série, t. XI).
14 SÉANCE bU 11 JANVIER 1889.
sions se répétent ensuite un certain nombre de fois jusqu'à ce que la lige ait atteint sa forme et ses dimensions définitives.
Il faut bien remarquer qu'à un niveau déterminé la structure de la tige une fois différenciée ne se modifie pas; mais les différents aspects par lesquels passe la structure de la tige se rencontrent à des niveaux différents. Le méristéme terminal se modifie et devient successivement l'origine de structures différentes. Les parties de la tige les plus nouvel- lement formées ont un diamétre de plus en plus grand. Une jeune tige a donc à peu prés la forme d'un cóne, dont le sommet est formé par les parties les plus àgées et la base par les parties les plus jeunes.
Il y a peu d'années encore la seule interprétation conforme aux idées généralement reçues qu'on aurait pu proposer aux observations que je viens de résumer eüt été la suivante: la tige renferme d'abord un cylindre central entouré par un endoderme unique; puis ce cylindre central se divise en différents faisceaux qui se séparent et s'entourent d'un endo- derme spécial. Mais, dans leur Mémoire sur la polystélie, MM. Van Tieghem et Douliot ont assimilé la structure de la tige des Fougères à celle de la tige des Auricules, dont M. Van Tieghem avait donné l'explication suivante. Le cylindre central de la tige, d'abord unique, se divise non en deux faisceaux, mais en deux nouveaux cylindres centraux ou stéles qui eux-mêmes peuvent encore se diviser de la méme manière. Ce qu'on ap- pelait faisceau concentrique à bois interne est donc décrit par M. Van Tieghem comme un cylindre central comparable au cylindre central unique d'une tige ordinaire. Cette comparaison entre la tige des Fou- gères et celle des Auricules est done confirmée par l'étude détaillée du développement de la tige des Fougéres; chez toutes ces plantes l'épais- sissement de la tige ne s'effectue pas par des formations secondaires, mais par des divisions successives du cylindre central. ;
Les autres espéces de Fougéres que j'ai étudiées m'ont donné à peu près les mêmes résultats que le Pteris aquilina. Je citerai parmi ces espèces le Polypodium aureum, le Gymnogramme chrysophylla, le Nephrodium molle, Y Angiopteris evecta. Il existe cependant, entre le développement de ces plantes et celui des Pterisaquilina des differences secondaires sur lesquelles je compte revenir.
M. le Secrétaire général donne lecture des communications sui- vantes :
BILLIET. — PLANTES RARES OU NOUVELLES DE L'AUVERGNE. 19
EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. BILLIET A M. MALINVAUD. 17 décembre 1888.
Vous avez annoncé dans le dernier numéro du Bulletin la découverte en Auvergne, par M. Dumas, du Carex curvula.
Je tiens à vous signaler également la découverte au-dessus de la Bourboule, sur le versant sud de la Banne-d'Ordanche, du Buplevrum ranunculoides et de l'Allium fallax. Vous trouverez dans le dernier numéro de la Revue scien- Lifique du Bourbonnais des renseignements sur la manière dont M. Dumas a été amené à retrouver ces deux plantes, indiquées vaguement par Delarbre dans les Monts-Dores et non retrouvées par Lamotte et le frére Héribaud.
Ces derniers botanistes indiquaient également sous la méme formule vague le Lycopodium alpinum. Cette plante a été cueillie, au nord dela crête située à l'est du Puy-Ferrand, par M. Dumas, qui a découvert également cet été le Cracca villosa sur le plateau de Chanturgue, près de Clermont, et le Cynosu- rus echinatus au Puy-de-Montaudoux, prés de Clermont. Cette derniére plante n'est probablement que subspontanée.
Je vous envoie des échantillons de ces espéces pour l'herbier de la Société. Un de nos collègues, M. Gonod d'Artemare, a trouvé au mois de juin dernier le Cochlearia pyrenaica DC. à Ardes (Puy-de-Dôme), dans la vallée de Ren- tières.
NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE, par M. Alfred CHABERT.
B
Dans le cours des herborisations que j'ai faites ces années derniéres dans les montagnes de Kabylie, quelques espéces et variétés nouvelles se sont présentées à moi. Je les publie dans cette Note, ainsi que plusieurs de celles que j'ai observées, de 1871 à 1875, sur différents points de la province d'Alger. Les autres feront l'objet d'un autre travail. Peu parti- san de la multiplication des noms spécifiques, je décris comme variétés les formes qui ne sont pas séparées des types voisins par des caractères fixes et saillants. Je signale aussi les localités oü j'ai recueilli quelques plantes rares en Algérie.
Ranunculus aquatilis var. elongatus lliern. (sub R. peltato). — lu fossis, Damiette prope Medeah ; in lacu montis Mouzaia.
R. aquatilis var. elegans ; Batrachium elegans A. Chabert in litt. etexsice. 1870. — Differt a typo et imprimis a varietate elongato Hiern. (sub R. peltato), quæ in eodem loco crescit et cui longitudine peduncu- lorum 10-25 centim. affinis, foliis submersis rigidis, stylo elongato,
16 SÉANCE DU 11 JANVIER 1889.
receptaculo parce hirsuto, petalis roseis vel roseo-albis. — Fl. aprili.
Hab. in lacu montis Mouzaïa.
Oss. — Cette belle plante couvrait d'un tapis rose, en avril 1872, une vingtaine de mètres carrés de ce lac; elle ne paraît pas y avoir été re- trouvée depuis. Peut-étre a-t-elle disparu àla suite du tremblement de terre qui en fit dessécher une partie.
Les tiges sont glabres, fistuleuses, allongées, rameuses. Les feuilles submergées ne se réunissent pas en pinceau hors de l'eau ; les nageantes, longuement pétiolées, ont la gaine adhérente au pétiole dans les trois quarts de leur longueur, le limbre glabre subcoriace réniforme, à cinq lobes trés obtus entiers ou presque entiers. La fleur rose ou rosée est grande de 2 à 2 1/2 centimètres ; les sépales oblongs, concaves, bientôt réfléchis; les pétales, deux fois et demie plus grands qu'eux, sont lar- sement obovales, contigus, contractés en un court onglet jaunâtre ; les étamines trés nombreuses, plus longues que le pistil; le style allongé, courbé, tronqué, inséré sur le prolongement du bord supérieur du pistil, le stigmate papilleux, les carpelles glabres obovales presque carrés au sommet à peine apiculé, le réceptacle globuleux à poils rares. Cette rareté des poils du réceptacle éloigne le R. elegans du R. aquatilis qui a le réceptacle hispide (Coss. Comp. fl. Atl. II, p. 16) et le place auprès du R. dubius Freyn. in Willk. et Lange (Prodr. fl. hisp. 3, 909). Mais le plus ou moins grand nombre de ces villosités constitue-t-il un carac- tére bien fixe?
Ranunculus divaricatus Schrank.— Aumale, in fossis ad orientem urbis. (Il n'avait pas été retrouvé en Algérie depuis Desfontaines.)
R. aurasiacus Pomel, Nouv. mat. 319; Batt. et Trabut, Fl. Alg. I, 9; R. demissus Coss. in Ann. sc. nat. série 4, IV, 941 (non DC.); Munby, Cat. edit. 2,1; R. Villarsii Letourneux, Cat. Kab. 24; Cosson, Comp. fl. Atl. TE, 30, non DC.
Rhizomate crasso, elongato ad collum fibris tenacibus sepius stipato ; subhorizontali vel obliquo, vel primum horizontali et deinde deorsum descendente, unam radicem ex unoquoque axi partiali emittente; cau- libus 1-5 fere nudis ascendentibus gracilibus vel erectis rigidis, monan- this vel bi- rarius trifloris, glabris hirsutisve aut patule villosis; foliis radicalibus petiolo longo vaginantibus, ambitu suborbiculatis 3-5 partitis, segmentis sessilibus obovato-cuneatis 3-5 inciso-lobatis ; foliis caulinis semi-amplexicaulibus solitariis et sessilibus ad basin 3-5 partitis laci- uiis divergentibus lineari-lanceolatis, lanceolatisve aut oblongo-lanceo- latis integerrimis, vel duobus rarius 3, inferiore petiolato foliis radica- libus conformi, superiori folio caulino descripto simili; floribus luteis 11/2-3 cent. latis; pedunculis glabris vel parce hirsutis, floriferis
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE. 11
exsulcis, fructiferis sulcatis rigidis; calyce e viridi-lutescenle sparse piloso, sepalis ovatis obtusis demum patentibus; petalis ovato-cuneatis ; spica globosa, receptaculo basi glabro vel parce hirsuto deinde villoso, apice villis candidis penicillato; carpellis glabris lævibus lenticulari- compressis subconvexibus, marginatis carinatis in apice rostrum unci- natum vel circulatim recurvatum eis quinta vel quarta parte brevius abeuntibus. Perennis.
Fl. jun.-jul. et aug. in excelsioribus.
Tres varietates notandæ.
A. — GENUINUS. — Planta mediocris, caulibus 1-3, 10-18 cent. long., ascendentibus, patule villosis, foliis sericeo-villosis, radicalibus in seg- menla contigua divisis, caulino sæpius solitario, floribus mediocribus 1 1/2 cent. latis.
Hab. in pascuis regionis cedretorum montium Aures : Ras Pharaoun (Pomel), Babor (Trabut).
B. — rsEUDO-pEMISSUS. — R. demissus Coss. l. c., non DC. — Minor, glabrescens, caulibus 3-5 diffusis 6-15 cent. long., foliis radica- libus in segmenta angusta distantia divisis, caulino unico.
C. — DJURDJURÆ. — Major, erectus, glabrescens, caulibus 1-3, 18-30 cent. altis, sepius bifidis, foliis radicalibus in segmenta ovato- vel obo- valo-cuneata larga et sese invicem obtegentia divisis, caulinis saepius 2-3.
Hab. promiscue dus ultima varietates in cedretis et inde ad rupes umbrosas regionis superioris Djurdjuræ a 1700 usque ad 2200 metr. Legi ad Azib-beni-Koufi ubi cl. Cosson primus invenerat, dj. Aizer, Tabbourt bou Friken, Tizi tsennant, et in collo Tizi Hout dicto ubi cl. Letourneux multos ante annos jam legerat.
Oss. — Les formes extrêmes des trois variétés décrites semblent au premier abord constituer des espéces distinctes; mais la similitude de leurs carpelles et les intermédiaires qui les relient m'empéchent de les séparer. La variété genuinus parait étre particuliére aux montagnes de la province de Constantine.
Le R. aurasiacus constitue une excellente espèce, trés différente du R. Villarsii DC. et du R. demissus DC. par ses pédoncules fructiferes sillonnés qui le placent auprés du R. polyanthemos L., par ses feuilles caulinaires semi-ampleæicaules, par son réceptacle glabre ou glabres- cent à la base, puis velu et couvert au sommet d'un pinceau de poils blancs, et enfin par son mode de végétation. M. Songeon m'a fait remar- quer que de chacun des axes partiels de son rhizome ne s'échappe qu'une seule racine, tandis qu'il s'en échappe trois ou quatre de chacun des
axes partiels du rhizome des R. Villarsii, demissus, montanus, elc. T, XXXVI. (SÉANCES) 2
18 SÉANCE pu 14 JANVIER 1889.
L'auteur du Ranunculus aurasiacus, suivi en cela par M. Baltan- dier, loc. c., lui attribue une souche rampante et noueuse ; je l'ai toujours vue oblique ou subhorizontale, ou horizontale d'abord et descendant ensuite; quant aux nodosités, elles sont accidentelles. M. Pomel dit en outre: « sépales réfléchis » ; ils m'ont constamment paru étalés dans les nombreux individus que j'ai examinés en Kabylie et dans l'herbier de M. Battandier.
Je ne connais pas d'autre espèce de Renoncule dont les pédoncules, lisses quand ils portent la fleur, se creusent de sillons à mesure que les carpelles mürissent.
Le caractère de pedunculis exsulcis attribué par M. Cosson à son R. Villarsii donne lieu de croire qu'il existe sur les montagnes de
l'Algérie une autre espèce que celle nommée par M. Pomel. Elle est à rechercher.
Pæonia algeriensis. — P. Russi Munby Cat. (edit. 2), 1, Letour- neux Kab. 25, non Biv.; P. Russi var. coriacea Coss. olim, Batt. et Tr. Fl. alg. 1, 18; P. corallina var. atlantica Coss. Comp. II, 54.
Rhizomate crasso, obliquo tuberifero, caule robusto flexuoso angulato- sulcato glabro subsimplici 40-80 cent. alto; foliorum coriaceorum supra obscure virentium glabrorum, subtus glaucorum et pubescentium, infe- riorum biternatim mediorum ternatim sectorum superiorum simplicium segmentis amplis oblongis vel oblongo-ovatis integris vel raro uno dente aut uno lobo instructis acuminatis, terminalibus distinctis plus minusve longe petiolatis, floribus amplis roseis; folliculis 2-5 eo majoribus quod minus numerosis, glabris, cæsio-pruinosis, stellatim et horizontaliter patentibus, stigmate e viridi-purpureo recurvato terminatis ; seminibus immaturis rubris, maturis aterrimis nitidis. — Fl. mai.-jun.
Hab. In silvaticis et ad rupes umbrosas regionis montanæ a 1300 ad 1900 metr. Legi in Mechmel Ait D:oud, Mechmel'Ait ou Abban, Agouni
el Haoua, cl. Letourneux indicante, Azerou-tidjer, provinciæ algeriensis; Babor (Trabut), prov. cirtensis.
Oss. — Le P. algeriensis se distingue facilement du P. corallina Retz, Broteri Boiss.et Reut., officinalis Retz, corsica Sieb., coriacea Boiss., par la pubescence de la face inférieure des feuilles; des P. coral- lina, officinalis, Russi Biv., peregrina Mill. par la glabréité des ċar- pelles; du Broteri par les segments terminaux des feuilles distincts et longuement pétiolés; du coriacea, par les graines rouges puis noires et non d'un pourpre noir, ete., etc. Les auteurs attribuent aux graines de la plupart des Pivoines d'Europe la : ; couleur rou: - celles de la Pivoine d'Algérie sont un roug La he: us
: > heres ge corail avant la maturité, puis elles deviennent d'un noir brillant.
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE. 19
L'observation en septembre dernier dans les forêts des Ait ou Abban et des Ait-Daoud d'un trés grand nombre d'individus fructifères, dont beaucoup à quatre carpelles et quelques-uns à cinq, m'a démontré que le nombre et la forme des carpelles n'offrent pas de caractères fixes, car leur nombre varie beaucoup et leur forme dépend de leur nombre. Au nombre de 2-3, ils sont trés grands et subarqués; à celui de 4-5, ils sont bien plus petits, parfois de moitié, droits et oblongs. Leur direc- tion est toujours horizontale, excepté dans les individus bi-carpellaires, lorsque les deux follicules sont soudés par leur commissure interne ; ils ne peuvent alors s'écarter et restent verticaux. C'est là une anomalie qui ne peut méme étre signalée comme variété et qui n'est pas trés rare en Kabylie. M. le D" Trabut m'a dit l'avoir aussi observée dans les mon- tagnes de l Aurès. Enfin la longueur des pétioles secondaires est aussi sujette à variation.
Nota. — J'ai cité parmi les synonymes : P. Russi var. coriacea Batt. et Trabut FI. Alg. I, 18, quoique ces auteurs disent les feuilles glabres, M. Battandier m'ayant assuré que sa description est incomplète par la faute de l'imprimeur qui a omis les mots : « glaores en dessus, pubes- centes et glauques en dessous ». Les échantillons de Kabylie et de l'Aurés contenus dans son herbier sont du reste tous conformes aux miens.
Clypeola eyclodontea DC. — In herbosis. Aumale.
Ptilotrichum spinosum L. (sub Alysso) Boiss. — In rupibus excel- sioribus : Tabbourt bou Friken.
Alyssum Djurdjuræ (sect. Eualyssum Coss.).
Perenne, suffrutescens laxe cespitosum caulibus ascendentibus, steri- libus simplicibus, floriferis sæpe ramosis; foliis supra viridibus, subtus pube densa stellato-nivea incanis, spathulato-lanceolatis, surculorum sterilium superioribus ovatis; corymbo composito laxo a pluribus race- mis corymbiformibus formato; calyce deciduo; siliculis pedicellum patulum tomentosum æquantibus biconvexis, basi et margine planis, ellipticis, basi et apice acuto attenuatis, stylo persistente eorum tertiam partem æquante terminatis ; loculis biovulatis, seminibus ovatis anguste marginatis, margine concolore, funiculis bas? septo adnatis. Flores non vidi.
Hab. In rupibus excelsioribus Djurdjuræ versus 2000-2200 metr. raro : Tabbourt bou Friken, dj. Aizer.
Oss. — Cette plante croît avec les A. atlanticum Desf. et serpylli- folium Desf. Je l'avais prise d'abord pour une variété de celui-ci à inflo- rescence composite et à silicules plus grandes et plus aiguës; mais elle s'en éloigne, ainsi que de l'A. alpestre L., par ses funicules adnés à la base et non libres, et par ses loges biovulées et non uniovulées. Elle
20 SÉANCE DU 11 JANVIER 1889.
diffère des A. montanum L.; atlanticum Desf. et cuneifotium Ten., par la forme de sa silicule qui est elliptique aigué au sommet, landis que dans ces trois espèces, elle est orbiculaire ou obovée ou ovale, el échancrée ou tronquée, ou simplement arrondie au sommet.
Saponaria depressa Div. var. Djurdjurze.
Perennis, cæspitosa, sæpius acaulis pedunculgs 1-2 floros, alias cau- lem 6-10 cent. altum 3-4 flores umbellatos gerentem emittens; foliis ovato-spathulatis aut oblongo-lanceolatis glabris margine scabris ; flori- bus primum luteis, deinde et post anthesim erubescentibus; calyce 3- 4 cent. longo glanduloso-viscoso, purpurascente eylindrico tubuloso sur- sem eurvato ad quartem tubi partem fisso, dentibus oblongis cuspidatis suse invicem obtegentibus; petalis coronatis calycem longe excedentibus ungue viridi exserto, limbo profunde bifido, coronæ laciniis linearibus acutissimis. Semina non vidi. — Fl. augusto, florum odor gratus.
Hab. In rupibus excelsis Djurdjuræ ubi latos cespites efficit: Azerou- n-tehor (pie du Midi).
Oss. — Le type, dont M. Cosson a publié dans l'herbier de la Société Dauphinoise de beaux échantillons recueillis dans la province de Constan- tine, a les tiges hautes de 15-30 centim., les feuilles lisses au bord, les fleurs rouges ou roses dés le premier stade de leur évolution, les calices anguleux cylindriques. La plante recueillie dans les Babors par M. Trabut m'a paru la méme que celle du Djurjura. La rudesse du bord des feuilles est due àla présence de petits aiguillons transparents visibles à la loupe.
Silene atlantica Coss. — Sur les cimes du Djurdjura, au-dessus de 2000 mètres, Tabbourt bou Friken, djebel Aizer, les fleurs, dites noc-
turnes par les auteurs, restent épanouies jusque vers neuf heures du matin.
Alsine verna Bartl. — MM. Battandier et Trabut, dans leur Flore d'Algérie, Y, 154, ne signalent qu'une seule forme à tiges diffuses, à inflorescence lâche, un peu pubescente, à sépales brièvement membra- neux au bord, égalant les pétales et la capsule. Cette forme qu'ils publient sous. le nom de variété kabylica a le calice subtronqué à la base d'après M. Pomel, qui l'a décrite le premier sous le nom d'A. kabylica (l. c. 321). Les principales variétés que j'ai pu observer en outre sont :
— Var. alpina Koch. Syn. ed. 2, 124. — Caulibus nanis plerumque
unifloris, bracteis herbaceis non margine membranaceis, calice basi umbilicata petalis 1/3 breviori.
Hab. In cacuminibus montium Djurdjura versus 2000-2300 metr. Lalla Khadidja, Tabbourt bou Friken.
— Var. umbrosa. — Caulibus laxis diffusis procumbentibus 30-40 cent.
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE. 21
longis, ramosis, inflorescentia glandulosa, calyce basi attenuato petala æquante sed capsula exserta 1/3 breviore.
Hab. In regionis montanæ versus 1000-1300 metr. rupibus umbrosis : col de Tirourda.
Ogs. — Il se passe, pour cette variété par rapport au type, un phéno- méne analogue à celui qu'on observe sur le Silene acaulis L. comparé au S. elongata Bell.; le premier a le calice atténué à la base, tandis que chez le second il est ombiliqué. Mais je ne crois pas que l'on puisse faire une espéce de ma variété umbrosa, car elle se relie au type par des intermédiaires. Telle est une quatrième forme recueillie par M. Letourneux à Agouni el Haoua, et dont les bractées et les sépales sont largement scarieux au bord et dont le calice à base de forme indé- cise est 1/3 moins grand que les pétales. L'A. verna varie beaucoup dans les montagnes de l'Algérie et pourrait étre pulvérisé en autant d'indi- vidualités que nos Hieracium de France.
Evonymus latifolius Scop. — In silvaticisumbrosis Djurjuræ : Mech- mel Ait Daoud, Mechmel Ait ou Abban, ubi cl. Letourneux primus detexit.
La plante kabyle est plus élevée (3-6 métres) que celle de France ; ses feuilles sont plus grandes, plus larges proportionnellement à leur lon- gueur et moins acuminées. Les fruits sont les mémes à angles minces et ailés.
Rhamnus myrtifolia Willk. — Les auteurs du Prodromus fl. hisp. lui attribuent des fleurs solitaires. Il n'estpas rare, sur les montagnes de Kabylie : Askajdem, Lalla Khadidja, etc., de le voir tantót uniflore, tantót avec 2-4 fleurs en grappe.
R. amygdalina Desf. — In rupibus excelsis. Lalla Khadidja.
Cytisus triflorus L'Hérit. var. bidentatus. — Differt à typo ramis junioribus teretibus, carina bidentata dentibus profundis acutis. — Fl. aprili-maio.
Hab. Cum typo in regione montana : Nador prope Médéah.
Ops. — Le C. triflorus a les jeunes rameaux striés anguleux et la caréne aigué, non bidentée.
Lathyrus Ochrus L. var. ochroides (L. ochroides A. Chabert in litt. et exsicc. 1816). — Differt a typo pedunculis bifloris non articu- latis, stylo sub apice dilatato deinde in acumen triangulari-subulatum reflexum abeunte. — Fl. aprili-maio.
Hab. cum typo in pratis et arvis regionis montanæ circa Medeah.
Oss. — Le L. Ochrus L. a les pédoncules uniflores articulés vers le
22 SÉANCE DU 14 JANVIER 1889.
milieu et le style non prolongé en pointe ; il est commun dans les champs et les prairies de la province d'Alger et se trouve parfois mais rarement avec des pédoncules biflores et articulés.
Ononis fruticosa L. — In silvis montanis : Ouled Anteur prope Boghar.
Ononis cenisia L. — In pascuis excelsioribus versus 2000 metr. Tabbourt bou Friken.
Vicia leucantha Biv.? — In graminosis regionis superioris et in cespitibus Carduncelli Atractyloidis: Tizi hout, Tala Ailal, Tabbourt bou Friken, djebel Aizer.
Cratsegus Azarolus L. — In nemoribus collium : Taguerbouz, in ditione Beni-Kani.
Amelanchier vulgaris Mœnch var. Djurdjursæ. — Differt a typo foliis majoribus integris vel subintegris margine undulatis, stipulis e basi ovata linearibus petioli 3*" vel 4" partem æquantibus, calycis lobis latioribus et brevioribus, petalis ovato-lanceolatis ungue brevi, tempore florendi 5-6 hebdomadibus seriore in iisdem montibus.
Hab. In rupibus excelsis Djurdjuræ orientalis.: Askajdem, Azerou-n- tehor, ubi 22-23 augusto florentem legi.
Ogs. — L'Amelanchier vulgaris que j'ai recueilli sur plusieurs mon- tagnes de Kabylie, où il a été depuis longtemps signalé par M. Letour- neux, a, comme celui de France, les feuilles petites dentées, les stipules allongées-linéaires égalant presque le pétiole, leslobes du calice allongés, lés pétales lancéolés linéaires. En résumé la variété que je signale pré- sente un plus grand développement des feuilles et des pétales, et un moins grand des stipules et des lobes du calice. Une autre variété a été trouvée dans la province de Constantine par le D" Reboud ; mes échan- tillons sont trop incomplets pour que je puisse la décrire.
Sorbus Aria L. — Dans la partie supérieure du Mechmel des Ait ou Abban croît une forme voisine du S. Mougeoti Soy. et Godr.
Rosa. —- M. Crépin, à qui j'ai soumis plusieurs Roses récoltées par moi en Kabylie, a bien voulu me donner sur elles des renseignements dont je reproduis textuellement ce qui concerne les plus intéressantes :
Rosa srYLosa Desv. forma. Hab. Irhil Guefran in ditione Beni-Med- dour. — « Cette forme appartient au groupe des variétés à feuilles pu- » bescentes, à dents simples et à pédicelles hispides-glanduleux dont » font partie les formes connues sous les noms de R. systyla Bast., » R. leucochroa Desv. et R. Clotildea Timb.-Lagr. A cause de ses styles » un peu hérissés, on pourrait rapprocher cette forme du R. Clotildea,
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE. 28
» dont elle diffère par ses styles peu ou point saillants, moins hérissés, » par son inflorescence à fleurs plus nombreuses (8-12 fleurs). En ana- » lysant minutieusement cette forme d'Algérie, on pourrait lui assigner » divers caractéres distinctifs qui en feraient une espéce artificielle, mais » on n'aurait là probablement qu'une création purement individuelle. »
Rosa sryLosa Desv. forma. Hab. Agouni el Haoua in cedretis. — « Cette forme appartient au groupe des variétés à feuilles glabres, à » dents simples et à pédicelles lisses, dont fait partie le R. virginea Rip. » La plante d'Afrique différe de ce dernier par ses styles un peu hérissés » et non glabres, par son inflorescence ordinairement plus multiflore » (jusqu'à 30 fleurs) et par ses folioles plus arrondies à la base. On » pourrait également en constituer une de ces espéces artificielles qui » viendraient encombrer nos listes de fausses espéces. »
Je dois ajouter qu'en découvrant en Algérie le R. stylosa, je n'ai fait que réaliser une prévision émise il y a plusieurs années par M. Crépin (Primitiæ, p. 589).
Potentilla recta L. — In herbidis et dumetis regionis montanæ : Deni-bou-Youcef.
P. caulescens L. var. Djurdjurse. — P. caulescens Munby Cat. ed. 2, 13; Letx Kab. 40. — P. petiolulata var. Djurdjuræ A. Chabert olim.— Differt a typo caliculi phyllis lanceolato-linearibus sepalis ovato- lanceolatis paulo brevioribus, petalis emarginatis, filamentis staminum glabris. —.Fl. jul.-aug.
Hab. In rupibus Djurdjurz inter 1100 et 1800 metr.: Tizi Tsennant, Tizi et Mechmel Aït ou Abban, Tizi Tirourda.
Ogs. — Le P. caulescens a les divisions du calicule et les sépales égaux et linéaires-lancéolés, les pétales à peine émarginés, les filets hispides.
Le P. caulescens var. villosa Boissier, Voy. Esp. 204 (P. petrophila Boiss., loc. cit. suppl. 607), a les divisions du calicule plus courtes que les sépales, les filets hérissés dans la moitié inférieure, scabriuscules dans la supérieure. Ses feuilles sont velues-soyeuses.
Le P. caulescens var. Djurdjuræ, qui a les folioles pétiolulées et l'aspeet verdâtre de la forme nommée par Gaudin P. petiolulata (Fl. helv. 3, 314), établit, par ses étamines glabres, la transition au P. cras- sinervia Viv. et au P. nivalis Lap.
Eryngium campestre L. Var. algeriense. — Capitulis olivaribus 3 cent. longis, petalis vix emarginatis. — Fl. augusto.
Hab. In pascuis siccis prope Aumale.
Dans le type, les capitules sont plus courts et globuleux ou ovoides, les pétales profondément émarginés,
94 SÉANCE DU 141 JANVIER 1889.
Pimpinella Battandieri.
Rhizomate crasso usque ad 6 cent. diametrum attingente lignescente, ssepius tortuoso, nodoso multicipite vaginis et petiolis foliorum deciduo- rum cincto, caules numerosos emittente inferne glabros superne pube- rulos erectos, rigidos, solidos, sulcatos, ramosos, 30-50 cent. altos, ra- mis patulis rigidis divergentibus; foliis glabris, læte viridibus coriaceis, inferioribus rosulatis longe petiolatis, pinnalisectis 3-5 raro 7 segmentis 9-3 cent. largis ovatis ovato-rotundatis truncatisve, inferioribus oppositis sessilibus vel subsessilibus, terminali longe petiolato, basi truncato, cordato vel cuneiformi profunde inciso-dentatis, terminali haud raro trilobato, eleganter reticulato-venosis, foliis caulinis sensim minoribus minutis vel ad vaginam reductis ; umbella longe pedunculata virginea erecta 10-14 radiata, radiis rigidis hirto-canescentibus inæquilongis maturitate non conniventibus ; involucro et involucellis nullis, petalis albis dorso et margine hirsutis ; stylis filiformibus divergentibus florendi tempore vix distinguendis et ovario multo brevioribus, post anthesim cito crescentibus et stylopodium depressum crenulato-marginatum longe superantibus ; fructu ovato dense canescenti-tomentoso pilis paten- tibus. Perennis. — Fl. julio-aug.
Hab. In rupium fissuris regionis mediæ Djurdjuræ : Tamda Ouguelmin in ditione Ait bou Addou, ubi 30 julio 1888 detexi.
Ops. — La souche épaisse et enfoncée dans les crevasses des rochers à pic atteint parfois la grosseur du poignet; elle donne naissance à de nombreuses tiges, dont les rameaux divergents et fleuris forment sur les rochers de grosses touffes blanches un peu odorantes qui contrastent vivement avec la couleur verte des feuilles radicales.
J'ai dédié cette espèce à M. le professeur Battandier, l'un des auteurs de la Flore d'Algérie.
Elle diffère des P. peregrina L., Tragium Vill. et villosa Schousb., par le port, la grosseur de la souche, la forme des feuilles, les ombelles vierges dressées et non penchées et par le style à peine visible pendant la floraison. En outre, le P. Tragium se distingue par le fruit ovale- arrondi, le stylopode hémisphérique; le P. peregrina, plante bisan- nuelle, par les rayons de l'ombelle connivents à la maturité, le style presque égal à l'ovaire, le stylopode conique; le P. villosa, par la tige trés rameuse dés la base, les rameaux disposés en une ample panicule, les pétales fortement velus, le style plus long que l'ovaire, le fruit ovale en cœur.
Dans la plupart des Pimpinella, les styles pendant la floraison font une saillie évidente au-dessus de l'ovaire et sont plus ou moins égaux
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE. 2
aux pétales; dans le P. saxifraga L., ils sont moins apparents et plus courts que l'ovaire ; dans le P. Battandieri, ils sont à peine visibles.
Pimpinella Djurdjur:ze.
Rhizomate valde elongato ascendente, per longum tractum vaginis el petiolis foliorum deciduorum cincto, caulem unicum (raro duos) emittente fere nudum glabrum erectum flexuosum 60-90 centim. altum, ramis patentibus; foliis glabris inferioribus rosulatis pinnatisectis 7-11 seg- inentis oppositis profunde inciso-dentatis reticulato-venosis primariis peliolulatis non vel rarius ad basim petioluli segmento sessili appendi- culatis, secundariis sessilibus cuneato-obovatis vel flabelliformibus, cau- linis minutis vel ad vaginam reductis; involucro et involucellis nullis ; umbella longe pedunculata virginea erecta 6-10 radiis scabriusculis sub- æquilongis, maturitatem versus conniventibus, petalis albis vel roseis, dorso sub lente parce pilosis, stylis arcuatis petala subæquantibus demum recurvatis stylopodio conico multoties longioribus, fructu pubescente vel cano-tomentoso minuto ovato-globoso. Perennis. — Fl. jul.-aug.
Hab. In cedretis et in dumetis regionis superioris Djurdjuræ a 1500 ad 2200 metr.; dj. Aizer, Tabbourt bou Friken ubi in Juniperi nane dumetis crescit, Tala Ailal, Tizi Tsennant, Askajdem, Mechmel Ait ou Abban, Mechmel Ait Daoud.
Oss. — Le P. Tragium Vil. en est tout à fait différent par sa taille, son rhizome, son slylopode hémisphérique, les rayons de l'ombelle non connivents à la maturité; le P. Battandieri A. Chab., par le port, le rhizome, lestiges multiples, le stylopode, les rayons non connivents, etc.; le P. peregrina L., par la racine bisannuelle, la tige presque nue, la forme des feuilles, les styles dressés, l'indument du fruit, ete.; les P. saxi- fraga L. et magna L., par leurs fruits glabres, etc.
Le P. Djurdjuræ de la partie occidentale a la fleur plus grande et le style plus long que celui de la partie orientale.
Galium erectum Huds, — In dumetis Juniper? nane: dj. Aizer, Tizi Tsennant.
Cephalaria atlantiea Coss. et Dur. — C. mauritanica Pomel — répandu cà et là dans toutesles montagnes du Djurdjura depuis l'Aizer jusqu'au col des Ait ou Abban, il est trés abondant dans les foréts com- munales de cette tribu et de la tribu des Ait Daoud oü il couvre de vastes clairieres. Il est difficile malgré cela d'en trouver des échantillons en bon état, les singes, au dire des Kabyles, en dévorant les capitules fleuris dont ils sont très friands. La plante atteint jusqu'à 27,50 de hauteur.
Seahiosa crenata Cyr. — In rupibus et glareosis regionis mediæ et superioris Djurdjuræ : Tamgout Aizer, Tala Ailal, inter hunc montem et Tamda Ouguelmin frequentissima, Lalla Khadidja.
26 SÉANCE DU 141 JANVIER 1889.
Scabiosa Djardjuræ. ,
Caule erecto 20-50 cent. l., ramoso ramis erectis; foliis radicalibus pubescentibus vel in excelsioribus subtus sericeis, longe petiolatis ovatis oblongisve, crenatis vel lyrato-pinnatifidis, caulinis plus minusve pubes- centibus paucis pinnatisectis, segmentis lanceolato-linearibus lineari- busve integris vel incisis; calathiis in alabastro a setis calycinis superatis, fructiferis subglobosis ; involucri foliolis 10 uniserialibus linearibus calathio 1/3 brevioribus, demum reflexis paleis anguste lanceolatis apice ciliatis; involucelli tubo fere cylindrico ad costas piloso limbo 1-1 1/2 mil. longo, scarioso eroso multinervato dimidiam ejus longitudinem æquante, calycis setis atris enerviis scaberrimis elongato-setaceis, 9-11 millim. longis limbo involucelli 6-8 longioribus, corollis 5 fidis cæruleis vel roseis, exterioribus radiantibus. Perennis. — Fl. jul.-aug.
Hab. In dumetis regionis superioris et in cedretis Djurdjuræ imprimis occidentalis : dj. Aizer, Tala Ailal, Tizi Tzennant, Tizi Hout, Lalla Khadidja.
— Var. fulva. — Ramosior, foliis radicalibus subtus sericeo-tomen- tosis, calathiis iis typi minoribus, setis fulvis; akeniis, involucellis, setis iis typi brevioribus sed easdem proportiones inter se conservantibus : involucelli cirea 1 millim. long., seta 6-9 millim.; akenia sæpe abortiva.
Hab. In cedretis, quercetis et in rupestribus regionis mediæ Djurdjuræ
imprimis orientalis : Azerou-n-tehor, Askajdem, Mechmel Ait ou Abban, Ait Daoud.
Ogs. — Le Scabiosa Djurdjure se distingue à première vue des S. Columbaria L., S. gramuntia L., S. lucida Vill. et des formes
affines par les soies du calice 6-8 fois plus longues que la couronne de l'involucelle.
Bellis silvestris Cyr. var akeniis glabris. Hab. In pascuis :! Aumale.
Les B. silvestris, atlantica Boiss. etvelutina Pomel ne me paraissent être que des variétés de la même espèce. Les caractères tirés de la forme des feuilles et de celle des folioles du péricline sont inconstants. A Aumale et sur le djebel Dirah, j'ai constaté sur certains individus portant plu- sieurs capitules, la présence simultanée de folioles obtuses, émarginées ou dentées au sommet et de folioles aiguës. Le caractère tiré de la villosité des akénes ne parait pas plus fixe : le B. silvestris les a hérissés de poils trés eourts appliqués, B. atlantica de poils plus longs subétalés, B. velutina de poils fauves dressés, formant au bord du disque une fausse aigrette (Pomel). Or il existe une forme du velutina à poils blanes. De plus si l'on relève par le frottement les poils de l’atlantica,
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D'ALGÉRIE. 2
2
1
on voit ceux de la partie supérieure dépasser le bord du disque et former une fausse aigrette en tout semblable à celle du velutina.
Artemisia kabylica (sect. Abrotanum DC.).
Suffruticosa odorata, caule lignoso glabro erecto stricto ramosissimo 90-80 cent. alto, ramis cespitosis erectis rigidis simplicibus striatis puberulis foliosis, foliis longe petiolatis junioribus canescenti-tomentellis adultis glabratis viridibus, petiolo auriculato, limbo circuitu ovato infe- riorum bipinnati-superiorum pinnatipartito, laciniis linearibus obtusis, foliis summis integris linearibus ; calathiis solitariis parvis hæmisphæ- ricis longe pedunculatis in apice pedunculorum erectorum rigidorum ex axilla foliorum 1, rarissime 2, prodeuntium et 2-5 bracteis linearibus præditorum cernuis 6-7 millim. latis, 30-40 floribus, in racemos spicatos longos terminales dispositis, anthodii viridi-canescentis squamis exterio- ribus lanceolatis herbaceis apice scariosis, interioribus rotundatis apice margineque late scariosis dorso viridibus vel omnino scariosis; recep- taculo nudo, corollis luteis glabris. Semina non vidi. — Fl. julio.
Hab. In rupestribus dumetosis regionis montanæ Kabylie, versus 1000-1200 metr. Beni bou Youcef.
Ops. — Cet Artemisia est tout à fait différent des espèces de France, . d'Italie, d'Espagne et du nord de l'Afrique; c'est un buisson épais com- posé de rameaux raides et dressés formant tout autant de grappes en épis allongés et trés odorantes. Les pédoncules pourvus debractées par- tent solitaires et quelquefois deux, dont un bien plus court, de l'aisselle des feuilles caulinaires et portent chacun une seule fleurpenchée. Les folioles scarieuses du péricline brillent au soleil d'un reflet argenté qui fait remarquer la plante à distance.
Centaurea amara L. — In pascuis montanis inter Tizi Tirourda el Azerou-n-tehor.
Forme prostrée étalée sur le sol, commengant à fleurir à la fin d'aoüt.
Carduncellus atractyloides Coss. et Dur. var. elatus. — Differt a typo caulibus elatis 20-25 centim. altis, foliorum segmentis anguste linearibus, capitulis angustioribus, pappi setorum pilis brevioribus sub- applicatis. — Fl. julio.
Hab. In herbosis regionis mediæ Djurdjuræ : Takrap in latere orien- tali montis Lalla Khadidja.
Oss. — Le C. atractyloides commun dans les lieux pierreux et sur les gazons de la région supérieure est subacaule et a les soies hérissées de barbes raides étalées.
Tragopogon porrifolius L. — [n cedretis Ait Daoud.
Tragopogon crociíolius (?. flaviflorus Willk. et L. Prodr. fl. hisp. M,
98 SÉANCE DU 11 JANVIER 1889.
297. — In rupibus excelsis Djurdjuræ 2000-2300 metr.; Tabbourt hou Friken, Lalla Khadidja.
Taraxacum palustre DC. — In pratis montanis hyeme inundatis. Tamda Ouguelmin.
Hieracium prenanthoides Vill. var. corolle dentibus glabris, non
ciliatis. — In cedretis : Tizi Hout (Letx), Tizi Tsennant. Campanula macrorrhiza J. Gay var. jurjurensis — C. jurju- rensis Pomel, Nouv. Mat. 251. — Differt a typo floribus post anthesim
et capsulis nutantibus et laciniis calycinis primum brevibus et applicatis deinde post anthesim valde crescentibus. — Fl. jul.-aug.
Hab. In rupium fissuris Djurdjuræ 1400-2300 metr. Tabbourt Bouz- gueur (Letourneux qui primus eam detexit anno 1873), Tizi Boulma (Letx), Tamgout et dj. Aizer ; Tabbourt bou Friken, Tala Ailal et frequentissima in rupibus descendendo ex hoc monte in Tamda Ouguelmin; Lalla Kha- didja in cacumine.
— var. rotundata, differt a præcedente foliis caulinis rotundatis obtusis integris vel sinuatis.
Hab. cum illa in rupibus cirea Tamda-Ouguelmin.
Ops. — Le C. macrorrhiza J. Gay a les fleurs et les capsules dressées et les lobes du calice allongés. Les deux variétés décrites établissent, par leurs fleurs dressées pendant l'anthése et penchées ensuite ainsi que les capsules, le passage du type au C. rotundifolia dont la fleur est d'abord dressée puis penchée de méme que la capsule ; mais elles en différent par le rhizome épais, ligneux, allongé, rameux, émettant des tiges ascen- dantes flexueuses, hautes de 8-20 cent., simples ou 2-4 flores, par les feuilles caulinaires inférieures ovales ou ovales-lancéolées (var. jurju- rensis) ou arrondies (var. rotundata), par les lobes du calice étroitement linéaires obtus d'abord courts (3 millim.) et appliqués à la corolle, puis aprés l'anthése croissant rapidement, atteignant 15 millim. et le plus souvent réfléchis.
Il me parait impossible de conserver comme espéce la variété jurju- rensis, car je crois que c'est à l'action de la chaleur si intense dans ces régions qu'est duel'incurvation du pédoncule floral bientôt après lan- thése. La fleur s'épanouit le soir et aux premiéres heures du jour, puis la corolle se flétrit et se penche. Le 8 juillet 1888, sur plusieurs centaines d'individus que j'ai observés pendant un trajet de quatre à dix heures du matin, beaucoup jusqu'à six heures avaient la fleur dressée ; mais à dater de ce moment, sous l'influence d'un violent sirocco, presque toutes les corolles se fanérent et les pédoncules se recourbèrent. Le sirocco a donc eu pour effet de produire rapidement cette incurvation qui s'opére plus lentement dans les circonstances habituelles. Il serait intéressant de
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D' ALGÉRIE. 20
cultiver la plante sous une autre latitude pour voir si elle se comporterait comme le type croissant dans les Alpes-Maritimes.
Les deux variétés forment des touffes parfois énormes atteignant jus- qu'à 15 cent. de largeur sur 50 cent. à 1 mètre de longueur. Leurs rhi- zomes acquièrent dans ces cas-là le diamètre de 1 1/2 à 2 cent. La fleur est faiblement odorante.
La variété rotundata a un facies trés différent de la variété jurjuren- sis ; mais on trouve de nombreux intermédiaires.
Vincetoxicum officinale Mœnch.— Très répandues sur toutes les montagnes du Djurdjura où elles s'élévent jusqu'à 2000 mètres (dj, Aizer), les formes de ce groupe encore peu connu y croissent mélangées et pré- sentent à l'analyse des différences assez sensibles. Leurs fleurs sont en général plus petites qu'en France, elles sont jaunes ou blanches, ou blanches avec la couronne jaunàtre. Les divisions du calice quelquefois ciliées, le plus souvent glabres, sont tantôt lancéolées-aigués, tantôt ovales-aiguës ; celles de la corolle ovales-obtuses sont planes ou à bords réfléchis ; les lobes de la couronne staminale ovales-arrondis et obtus sont tantôt distants, tantôt très rapprochés. La membrane pellucide qui les réunit s'éléve parfois aux trois quarts de la hauteur des lobes, ailleurs elle arrive à peine au quart. Chez quelques individus elle présente une petite dent interposée entre chaque lobe. De toutes ces formes dont l'une rappelle le V. lazum Bartl. (sub Cynancho) et une autre le V. conti- guum Koch, sans pouvoir cependant leur être identifiées, j'en signalerai trois comme variétés afin d'attirer sur elles l'attention des explorateurs, mais je ne me dissimule pas combien mon étude est incomplète. Ces plantes doivent être analysées sur le frais et il faudrait les cultiver pour arriver à bien les connaitre.
— var. aeutatum. — Floribus albis, corollæ lobis planis sicut et lobis coron: acutatis. — FI. jul.-aug.
Hab. In rupestribus montanis : Ait Daoud.
— var. dentiferum. — Floribus lutescentibus, membrana 5 dentata dentibus inter lobos coron: interpositis.
Hab. Tala Ailal.
— Var. floribundum. — Exaltatum 1",30-1",80 l. flexuosum, ramo- sum, racemis permultis, floribus citrinis, lobis calcinis ovato-lanceolatis acutis.
Hab. Secus torrentes : Ait ou Abban.
Onosma echioides L. — In rupibus excelsis Djurdjuræ : Tizi Tsen- nant, Tizi Ouguelmin, Tala Ailal, Tabbourt bou Friken.
Mattia gymnandra Coss. — Mêmes localités.
30 SÉANCE DU 14 JANVIER 1889.
Melissa officinalis L. — In sepibus et dumetis regionis montamne : Ait Koufi, frequens.
Plantago mauritaniea Doiss. et Reuter. — In glareosis et rupestri- bus regionis montanæ a Tamda Ouguelmin ad Tizi Tsennant.
Rumex induratus Boiss. et R. — In rupestribus montanis Tamda Ouguelmin.
Daphne kabylica.
Je désigne sous ce nom un Daphne à tiges de 50 à 80 centimétres, ligneuses, rameuses, à rameaux dressés, à écorce grisàátre, à feuilles rapprochées en rosette au sommet des rameaux, d'un vert sombre en dessus, d'un vert clair en dessous, coriaces, glabres, obovales, atténuées en pétiole très court, longues de 3 1/2 à 4 centimètres, larges de 1 1/2. D'aprés la disposition des bourgeons, je présume que les fleurs sont laté- rales; mais je ne puis rien affirmer, n'ayant observé que des individus non fleuris. Malgré cela je lui ai donné un nom spécifique, car il diffère de toutes les espèces que j'ai vues dans les herbiers ou dont j'ai comparé les descriptions. Je l'ai trouvé dans les foréts ombragées de Chénes el de Cédres du Mechmel des Ait ou Abban.
Daphne Philippi Gr. et Godr. — Désignée par M. Letourneux dans son Catalogue des plantes de Kabylie sous le nom de D. Laureola L., cette forme que je n'ai observée qu'en fruit est remarquable par le déve- loppement de ses bractées. — Je l'ai trouvée dans les foréts d'Agouni el Haoua aprés M. Letourneux, et dans celles des Ait ou Abban.
Salsola camphorosmoides Desf. — In rupibus et petrosis: Boghari.
Euphorbia atlantica Coss. — [n rupestribus Djurdjurz occidentalis frequens a 1500 ad 2000 m. ascendens : Beni Meddour, Tizi et Tamda Ouguelmin, Tala Ailal, Tabbourt bou Friken, Tassougdelt, dj. Aizer.
Juniperus communis L. — Trés rare en Kabylie où il n'avait pas encore été signalé. Je l'ai trouvé dans les forêts ombragées du Mechmel des Ait ou Abban et sur l'Azerou-n-Tehor, où croissent quelques pieds hauts de 17,80 à 27,50 à fruits petits 2-3 fois plus courts que la feuille.
— var. alpina Gaud. — J. nana Willd., Letx Kab. 72, depuis long- temps signalé sur le Djurdjura par M. Letourneux, y est assez commun sur toutes les sommités, y forme des buissons ayant jusqu'à 6 mètres de diamètre et est sujet à de nombreuses variations.
Salix pedicellata Desf. — Le bois des jeunes rameaux présente des saillies linéaires longitudinales semblables à celles du S. Caprea L.
Alisma natans L.— [n fossis regionis montani : dj. Dirah prope Aumale.
CHABERT. — NOTE SUR LA FLORE D' ALGÉRIE. ol
Ruscus aculeatus L. — Usque ad 2100 metr. ascendit ad rupes umbrosas : Tabbourt bou Friken.
Corbularia monophylla Dur. — In dumetis et ad ores silvarum : in silva Ksenna dicta, prope Aumale.
Trisetum flavescens P. B. var. nodosum. — Caulibus basi nodosis et stolonibus interdum etiam nodosis. Hab. In nemoribus montanis : Nador supra Medeah.
M. Malinvaud présente à la Société des exemplaires à demi desséchés de Galanthus nivalis, vécoltés, le 25 décembre dernier, dans le Puy-de-Dóme par M. Audigier, de Clermont-Ferrand, et donne lecture de la lettre suivante :
LETTRE DE M. AUDIGIER A M. MALINVAUD.
-.. Depuis quinze ans, je m'impose, aux premiers jours de l'année, aux pre- miers sourires dela nature, le pieux devoir de faire un pélerinage à Bellerive, prés de Cornon, sur la rive droite de l'Allier, pour y admirer et cueillir des Perce-neige en fleur. Ils sont en abondance dans le bois d'une magnifique propriété, oü l'on entrait naguére librement, mais aujourd'hui complétement fermée au public. De l'autre cóté et dans le talus de la route, en face de la porte de ladite propriété et prés d'un pont suspendu, en plein nord sous des Robiniers, le 25 décembre dernier, les Perce-neige étaient parfaitement fleuris ; laltitude du lieu est de 320 à 325 mètres. Plus bas, sur la méme rive de l'Allier, en contre-bas de la route de Pérignat à Mezel et à 1 kilomètre environ de cette derniére localité, dans un petit bois (formé de Frénes, Saules, Ceri- siers, etc.), faisant face à l'ouest, les Perce-neige fleuris couvraient le sol.
... Il y a huit jours, un de mes cousins, propriétaire du domaine de Bom- Parent, prés de Rochefort-Montagne (altitude 920 inétres), me dit que dans son bois en plein midi le Galanthus était fleuri depuis plusieurs jours.
A Royat, sur un tertre de jardin paysager en plein midi mais non sous bois, les Perce-neige, trés abondants en cet endroit, n'étaient pas encore fleuris; l'alitude (580 mètres) est cependant beaucoup moindre qu'à Bomparent. Il est donc évident que l'abri fourni par un rideau d'arbres avance beaucoup la végétation de ces plantes.
Je visite tous les ans Bellerive et Mezel, parce que le chemin de fer me per- met de faire cette course un dimanche dans l'aprés-midi, mais le Galanthus nivalis est spontané en beaucoup de localités daus le Puy-de-Dóme. Je l'ai trouvé à Allagnat (S.-0. du Puy-de-Dôme), dans presque tous les bois aux envi- rons de Pontgibaud, à Hioux et à Bomparent, prés de Rochefort, aux bords de la Miouze, prés de Bourgheade (en société de l'Erythronium Dens-canis), au bois de Vergnes, près de Saint-Sauves (avec la méme Liliacée, en plein midi, sur la rive droite de la Dordogne), etc. . . . . . . . . . . . .. + . + . . s
32 SÉANCE DU 11 JANVIER 1889.
M. Malinvaud rappelle le cas de floraison tardive du Perce-neige signalé par M. Roze l'année derniére et les exemples de précocité de la méme plante qui avaient été cités à cette occasion (1). Il dit qu'à sa connaissance aucun auteur depuis Bauhin n'avait mentionné le fait de la floraison en décembre du Galanthus nivalis observé par M. Audigier.
M. Maury, vice-secrétaire, donne lecture de la communicalion suivante :
NOTICE SUR LES /BERIS DE LA FLORE DU GARD, par M. B. MARTIN.
La statistique spécifique du genre Jberis, telle qu'elle a été établie par de Pouzolz, il y a environ trente ans, se compose des six plantes suivantes : 1. pinnata L., 1. Prostii Soy. Will., T. saxatilis L., I. amara L., I. Violetti Soy.-Will., intermedia Guers.
En ce qui touche aux quatre premières, l'énumération de la Flore du Gard est irréprochable et à l'abri de toute critique, soit pour la déter- mination des espèces, soit pour les indications de géographie botanique qui concernent chacune d'elles. Il nous semble oiseux d'insister ici sur la distinction de végétaux exactement connus et judicieusement appréciés avant nous.
Mais il en est autrement pour ce qui regarde les F. Violetti et inter- media. Sur ce terrain particulier, il est nécessaire de mettre au jour les méprises de notre devancier, et à ses diagnoses équivoques et hasardées il convient de substituer des déterminations plus süres et plus vraies. C'est ce qui va nous occuper d'abord.
IpEnis VioLETTI. — Depuis la publication d'un bon travail, de M. Flandin de Pont-Saint-Esprit, inséré dans le Bulletin de la Société d'étude des sciences naturelles de Nimes (avril 1880, n° 4), les bota- nistes du Gard savent que de Pouzolz s'est pleinement fourvoyé en inscrivant l'espèce de Soyer-Willemet sur le catalogue de notre dépar- tement. Nous nous associons sans aucune réserve à toutes les conclusious du travail de notre excellent ami et reconnaissons avec lui que l'Iberis signalé à Jonquières, prés de Bagnols, dans la localité classique de la Flore du Gard, ne ressemble pas au type lorrain dédié à Violet, et qu'il doit plus tót étre assimilé à une forme méridionale découverte dans
(1) Voyez le Bulletin, t. XXXV (1888), pp. 257 et 260 (note).
MARTIN. — NOTICE SUR LES IBERIS DE LA FLORE DU GARD. 33
l'Ardéche par M. Jordan et désignée sous le nom d'Jberis deflexifolia Jord. (1).
ÎBERIS INTERMEDIA. — L'Iberis indiqué sous cette dénomination par de Pouzolz, offre-t-il des affinités avec la plante que les botanistes fran- çais connaissent des rochers de Duclair, prés de Rouen? Nous n'éprou- vons aucun embarras à déclarer quela description de la Flore du Gard ne rappelle aucun des caracléres essentiels appartenant au véritable I. intermedia de la Seine-Inférieure et sommes obligé de dire qu'il n'y a pas lieu de comprendre avec certitude la plante de Guersent sur la liste de nos Iberis. Dans ce cas, comme dans le précédent, il s'agit sans doute encore d'une confusion d'espéces, d'une diagnose erronnée (2). Nous reviendrons tout à l'heure sur ce point pour tàcher de remettre cette espèce dévoyée à la place qui lui convient dans notre cadre bota- nique.
Après ces remarques critiques et les corrections apportées à l’œuvre de notre maitre, il nous reste à dire quelques mots de deux Jberis non mentionnés dans la Flore du Gard, VI. collina Jord. et VI. pandure- formis Pourr.
[BERIS COLLINA. — « Son feuillage vert et non glauque, ses tiges assez » basses et presque toujours divisées à la base, ses rameaux courts, ses » pédicelles plus épais et plus étalés au moment de la floraison, son stig- » mate émarginé et plus large, enfin ses silicules, qui sont presque aussi » larges au sommet que dans leur milieu, l'éloignent de PI. Prostu » (Jordan, Observ. 6* fragm., p. 58).
L'I. collina croit, autour de nous, dans les trois départements de l'Hérault, de l'Aveyron et du Gard. Dans le premier de ces départements, on le récolte sur la Sérane, d’où il nous a été communiqué par notre ami
(l) Sans entrer dans tous les détails d'une comparaison minutieuse des 7. Violetti et deflexifolia, on peut, au simple coup d'œil, saisir sur les deux plantes des diffé- rences sensibles qui en rendent la .démarcation aisée. Ainsi, l'espèce de Soyer-Wil- lemet a la tige basse, courte (20 centim.), épaisse, ramifiée dés la base, les feuilles charnues, nombreuses, rapprochées et laissant à leur chute sur la tige des cicatrices manifestes. L'espéce de Jordan, au contraire, a sa tige haute (70 à 80 centim.), élancée, rameuse vers le haut, avec des divisions étalées dressées, disposées en corymbe ; ses feuilles plus longues, plus larges, éparses et défléchies sur la tige, qui reste isse aprés qu'elles sont tombées. Dans des conditions d'étude aussi faciles, on a peine à comprendre que de Pouzolz ait si étrangement oublié ses habitudes de clairvoyance et de sagacité et se soit laissé aller à émettre, au sujet de son Iberis de Jonquiéres, une diagnose aussi éloignée de la vérité. : Re
(2) Il est regrettable que l'auteur de la Flore du Gard ait eu la singulière idée de demander à la*Flore de Lorraine et à celle de Normandie des noms mal assortis pour deux /beris de notre contrée méridionale. Il eùt cédé à une plus heureuse inspiration et serait arrivé à des résultats plus satisfaisants, si, pour le choix de ses déterminations, il eüt songé à tirer parti des intéressantes éludes, déjà publiées de son temps, par M. Jordan, sur quelques espèces nouvelles du genre Iberis. :
T. XXXV. (SÉANCES) 3
34 SÉANCE DU 11 JANVIER 1889.
M. Barrandon (1). Dans le second, il habite le bois du Roi, prés de Nant, où il a été découvert par un jeune et zélé botaniste, M. Marc, frère des écoles chrétiennes. Enfin dans notre département du Gard, on trouve PI. collina sur les éboulis oxfordiens qui recouvrent cà et là les pentes boisées de la Virenque, non loin du bois de Salbouz, où végète son con- génère lT. Prostii. Dans ces stations contigués les deux espèces ré- pondent, chacune à sa facon, à la loi qui régle l'époque de leur floraison respective. Tandis que le premier se hàte de commencer dés le mois de mai l'évolution vernale de son inflorescence, le second réserve pour les mois de juillet et d'aoüt l'épanouissement plus tardif de ses grappes florales.
Une étroite ressemblance relie entre eux les échantillons d'J. collina fournis par les trois départements limitrophes. Les uns et les autres sont aussi tout à fait conformes aux exemplaires de la méme plante recueillis par M. Jordan à Serrières (Ain) et que le botaniste lyonnais a fait servir de types pour l'établissement et la description de son espèce.
Pour en revenir à 7. intermedia de la Flore du Gard, disons que la plante en question, si l'on peut en juger par la description qui nous en reste, est indubitablement pourvue d'un certain nombre d'attributs bota- niques propres à FT. collina (2), et rattachons sans une trop grande hési- tation cette plante à notre espéce Jordanienne des bords de la Virenque.
[BERIS PANDURÆFORMIS. — Cet Iberis semble marquer la transition entre lI. pinnata et VT. amara ; cependant on ne saurait le confondre ni avec l'une ni avec l'autre des deux espèces voisines. Il se distingue de la première par ses grappes fructiféres allongées, ses silicules plus grandes, élargies au sommet, les lobes de l'échancrure ovales aigus; il se sépare de la seconde par ses silicules non rétrécies au sommet, plus fortement ailées, à lobes ovales non aigus, et par ses feuilles plus nom- breuses, décidément pinnatifides et non simplement dentées.
Notre Crucifère ne compte pas en France de bien nombreuses sta- tions (3). Les Flores les plus récentes lui en assignent seulement deux, les environs de Narbonne et ceux de Mende. Nous annonçons avec satis- faction la découverte pour cette plante d'un gite de plus dans nos
(1) Les auteurs de la Flore de Montpellier donnent à l'Iberis de la Sérane le nom d'I. maialis Jord. Mais ils ne sont pas éloignés de réunir dans une méme synonymie leur I. maialis et notre I. collina.
(2) « Feuilles caulinaires longues de 4 à 5 centimètres, rétrécies aux deux extrémités ; » grappe fructifère courte, à pédoncules très étalés et les inférieurs réfléchis; silicules » presque pas rétrécies au sommet, se divisant en deux longues dents aigués trés » divergentes, de la longueur du style ou plus longues que lui » (in de Pouzolz Flore du Gard, t. 1, p. 84). :
(3) L'I. panduræformis appartient aussi à la flore de Hongrie. J'en possède un échan- tillon, récolté à Budapesth par M. Richter Lajos, que je tiens de la libéralité de M. Barrandon.
MARTIN. — NOTICE SUR LES IBERIS DE LA FLORE DU GARD. Jo
Cévennes du Gard; ce qui est loin encore de changer sensiblement sa condition d'espéce rare pour la flore francaise.
lci, la plante de Pourret végéte sur le trias, au quartier de la More, entre Alzon et Estelle, et sur l'oxfordien à la Rigalderie, près de Blandas. En ces lieux, on la récolte dans les cultures de Pommes de terre et de Mais pendant les mois de septembre et d'octobre.
Depuis sa publication dans le Chloris Narbonensis, VI. pandurc- formis a eu des fortunes tout à fait diverses. Peu de temps aprés sa création, l'eeuvre de Pourret a été dépouillée de son autonomie spécifique par Lamarck et de Candolle et réduite à la condition d'une simple variété del 7. pinnata. Toutefois, cette déchéance n'a pas été de longue durée ; les appréciations plus exactes de M. Jordan et de notre regrettable ami Timbal-Lagrave (1) ont fait prévaloir en faveur de l'espéce de Pourret une opinion contraire à la maniére de voir des auteurs de la Flore fran- çaise et ont obtenu pour elle une réhabilitation qui sera sans doute défi- nitive et mettra désormais la plante à l'abri de nouvelles vicissitudes.
Voici en quelques mots les conclusions de notre travail :
La flore du Gard compte aujourd'hui sept représentants du genre Iberis, au lieu de six.
La révision de nos formes spécifiques a provoqué l'exclusion des Iberis Violetti et intermedia, et déterminé l'introduction des Iberis deflexi- folia, collina et panduræformis.
La liste actuelle de nos Iberis comprend les espèces suivantes : 1beris pinnata, I. Prostii, 1. deflexifolia, I. saxatilis, I. collina, I. amara et I. panduræformis.
(1) Dans une note sur PI. panduræformis (in Mém. de la Soc des sc. phys. et nat. de Toulouse, t. 1), Timbal-Lagrave, aprés avoir mis en parallèle son Iberis des Cor- bières et celui de nos Cévennes qu'il connaissait, et avoir constaté entre eux un certain nombre de différences de formes, se déclare contre l'identité des deux plantes et pro- pose l'admission de plusieurs types affines, à l'un desquels il décerne trés courtoise- ment le nom d'7. Martini. Une bienveillante communication de notre excellent confrère M. Guillon nous a fourni le moyen de comparer l'7beris de Casa de Peña avec celui de nos Cévennes et de retrouver sur eux tous les caractères du signalement différentiel tracé par le savant botaniste de Toulouse. Cet examen comparatif nous a montré sur les échantillons des Corbières une tige simple, courte (10 centim.), peu feuillée, qui fleurit au mois de mai, des silicules à échancrure ouverte, avec des lobes à peine : obtus, égalant la longueur du style, et nousa permis d'observer sur les nôtres une tige plus haute (20 centim.), très ramifiée dès la base, ne donnant des fleurs qu'à la fin de l'été, des feuilles nombreuses, pinnatifides, des silicules avec les ailes des valves plus longues et plus obtuses, dépassées par le style. Ces différences morphologiques, qui ont tant frappé l'attention de Timbal-Lagrave, sont assurément incontestables; mais il est moins sür qu'elles offrent au fond une valeur et une importance suffisantes pour auto- riser le dédoublement de PI. panduræformis en plusieurs types distincts.
36 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
PRÉSIDENCE DE M. H. DE VILMORIN.
M. Maury, vice-secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du 11 janvier, dont la rédaction est adoptée.
M. le Président, par suite des présentations faites dans la précé- dente séance, proclame membres de la Société :
MM. Basrir (Eugène), licencié és sciences naturelles, rue du Battoir, 3, à Paris, présenté par MM. Bonnier et Dufour. BLowpEL (Raoul), préparateur à l'École de médecine, rue Saint-Jacques, 179, à Paris, présenté par MM. Bonnier et Colomb.
M. le Président annonce que le Conseil d'administration a décidé de soumettre à l'approbation de la Société le projet de résolution sulvant :
La Société botanique de France, à l’occasion de l'Exposition universelle de
1889, se réunira en congrès à Paris dans la seconde quinzaine du mois d'août prochain.
Ce projet, à la suite d'explications données par M. le Président, est mis aux voix et adopté. M. le Président fait ensuite connaitre la composition suivante,
arrétée par le Conseil, des diverses commissions annuelles pour 1889 :
1° Commission de comptabilité : MM. Bornet, E. Cosson et Roze.
2» Commission des archives : MM. l'abbé Hue, Marès et A. Ramond.
3° Commission du Bulletin: MM. Bonnier, Bornet, Duchartre,Mangin, de Seynes, J. Vallot et MM. les membres du Seerétariat.
4 Comité consultatif chargé de la détermination des plantes de France et d'Algérie soumises à l'examen de la Société : MM. Bainier, Camus, Cornu, E. Cosson, Franchet, Poisson et Rouy.
o° Comité d'organisation du Congrès qui doit se réunir à Paris en 1889 : MM. Bonnier, Bornet, Bureau, Duchartre, Guignard, Maury, Patouillard, Prillieux, Ramond, Rouy, Roze et Vallot. j
E. BLANC. — NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE. 31
D’après l’article 25 du Règlement, le Président et le Secrétaire général font partie de droit de toutes les commissions.
M. Malinvaud donne lecture de lettres de MM. Boulet, Harmand, Legendre et Ravaz, qui remercient la Société de les avoir admis au nombre de ses membres.
M. Bonnier fait hommage à la Société du premier numéro d’un nouveau recueil périodique publié sous sa direction, sous le titre de Revue générale de botanique. Cette Revue, qui, indépendam- ment de travaux originaux, doit publier des revues spéciales sur les progrés des différentes branches de la botanique, contient dans son premier numéro des articles ou Mémoires de MM. Bornet, Guignard, Leclerc du Sablon, Jumelle et Bonnier.
M. Blanc fait à la Société la communication suivante :
NOTES RECUEILLIES AU COURS DE MES DERNIERS VOYAGES DANS LE SUD DE LA TUNISIE, par M. Édouard BLANC (1).
Tozeur (Tunisie), 30 mai 1887.
Je viens de terminer heureusement, dans le sud-est de la Tunisie, une exploration au cours de laquelle j'ai recueilli quelques notes botaniques dont je m'empresse de communiquer un extrait à la Société.
Dans mes précédentes communications, j'avais annoncé ma résolu- tion de parcourir et d'étudier cette année (en 1887) une région que nous avions entrevue au printemps de 1886, M. Letourneux et moi, au sud- ouest du chott Djérid, et qui nousavait paru posséder une flore spéciale, pouvant donner lieu à quelques observations nouvelles.
M. Letourneux, dans une lettre à la Société (2), déclarait lui-méme que l'étude de cette région présenterait un grand intérét botanique.
Je me rendis donc, dés l'automne de 1886, dans les oasis du Djérid, et, ayant terminé mes préparatifs d'expédition de manière à ne pas être
(1) Ces Notes, dont la premiére a été écrite à la fin de mai 1887, et la seconde au mois d'aoüt 1888, n'ont pu étre communiquées à la Société que dans le courant du mois de janvier 1889, M. Blane n'étant revenu en France qu'à la fin de 1888 au retour de la mission dont il était chargé en Afrique depuis 1885, et l'envoi de ses Notes ayant subi divers retards motivés par les circonstances de ses voyages.
(2) Voyez le Bulletin, t, XXXIII (1886), p. 541.
38 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
arrété par les mémes circonstances que l'année précédente (1), j'attendis la saison la plus favorable au point de vue botanique pour la reconnais- sance de la contrée dont il s'agit, c'est-à-dire le printemps. J'attendais aussi que M. Letourneux, qui avait annoncé son retour dans le sud de la Tunisie pour lemois de mars 1887, y fût arrivé, de manière à pouvoir faire le voyage de concert avec lui. Je passai l'hiver de 1886-87 à faire des travaux géographiques et des observations diverses dans le bassin des Chotts; je parcourus notamment et visitai en détail le massif montagneux qui s'étend à l'est de Gafsa jusqu'à la frontière algérienne, c'est-à-dire au nord-est du chott Rharsa,| et qui a pour centres principaux les oasis de Tamerza, de Chebika et de Midés, trés peu étudiées jusque-là.
Sur ces entrefaites, M. Letourneux, parti de Gabés sans m'en avoir avisé, à la fin de mars 1887, en compagnie de M. Lefebvre, directeur des foréts de Tunisie, se rendit d'abord dans les montagnes du Matmata, le curieux pays des Troglodytes, que j'avais précédemment parcouru à la fin de 1885 et où lui-même avait déjà fait une reconnaissance antérieure ; de là il gagna Douirat, puis il s'engagea dans la contrée sans eau que l'on nomme le Dahar, et par El-Hagueuf et Bir Solthan, il arriva à Douz.
Là, une circonstance inattendue modifia l'organisation de son expédi- tion. Des affaires urgentes et imprévues exigèrent le retour immédiat de M. Lefebvre à Tunis, et son départ devait entrainer celui de la moitié du personnel de la caravane.
Ce fut moi qui reçus de Tunis les dépêches qu'il importait de faire parvenir aux voyageurs, et je me mis aussitôt à leur recherche, le 15 avril. Ayant connaissance de leur départ de Gabés, mais ignorant leur itiné- raire, je me dirigeai approximativement par les voies les plus directes, de Tozeur, où j'étais en ce moment, sur le Nefzaoua méridional.
Mais pour cela, je dus, afin de ne pas perdre un jour, traverser le chott Djérid suivant un tracé où il n'est pas guéable en cette saison. Or la longueur de ce passage est de 52 kilomètres, entre l’oasis d'El-Oudian et celle de Debabcha. Le chott s'étant en partie rempli d'eau à la suite d'un violent orage qui éclata pendant que j'y étais engagé, le gué devint tout à fait impraticable. Je pus le traverser seul, avec deux cavaliers, en vingt heures de marche sans aucune halte, mais je fus forcé d'y abandonner mes chameaux avec leurs conducteurs, qui demeurèrent embourbés, ainsi que tous mes bagages et mes provisions.
Une véritable tempéte, qui dura deux jours avec trombes de sable et succession d'orages violents, mit ensuile obstacle à ma marche. Cepen- dant je continuai, et je parvins à faire tenir, dans les délais utiles, les dépêches dont j'étais porteur, à la caravane de M. Letourneux, mais
(1) Voyez le Bulletin, t. XXXIII (1886), p. 249.
E. BLANC, — NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE. 39
sans pouvoir arriver moi-même jusqu'à elle. Le 17 avril au soir, je fus forcé, par la fatigue de mes chevaux et par l'état déplorable de mes véte- ments mouillés, de m'arréter à 30 kilométres de Douz, mais je fis partir un messager qui rejoignit le soir méme les voyageurs dans celle oasis, leur remit les dépéches et m'annonca à eux pour le lendemain.
Malheureusement les retards occasionnés par diverses circonstances, et notamment par le sauvetage de mes bagages et de mes animaux restés dans le chott, me firent perdre cinq jours et m'empéchérent de rejoindre notre collégue à Douz, comme je l'aurais désiré.
Aprés m'avoir attendu un jour et demi dans cette localité, M. Letour- neux en repartit le 19 avril, accompagné de M. le lieutenant de Bechevel et d'une vingtaine d'hommes. Ceux que le départ de son compagnon de voyage avait enlevés à la caravane avaient été remplacés par une portion du personnel du poste de Douz. Il passa à Cobria, à Chouchet-el-Menzel, à Bou-Kharouf, et s’avança jusqu'à El-Arfedji, point fort intéressant, situé à un peu plus de moitié route entre Cobria et Bir-es-Sof, par 5°50’ de longitude est et 33*00' de latitude, au pied méme des grandes dunes.
Là, jugeant impossible d'aller plus loin dans les circonstances où ils se trouvaient, et ce point étant d'ailleurs celui qu'ils avaient fixé comme terme extréme de leur expédition avant de quitter Douz, les voyageurs tournérent à angle aigu vers le nord, et, suivant à peu prés la direction d'un méridien, M. Letourneux rentra à Nefta, en passant par le puits de Redjem-Matoug et par Bir Asli. Aprés un séjour de quelques jours à Tozeur, où il m'attenditde nouveau, il continua ensuite son voyage bota- nique en traversant l'est et le centre dela Tunisie (1), et notamment en visitant le massif montagneux de Tamerza, que j'avais parcouru de mon cóté, à l'automne précédent.
M. de Bechevel se sépara de lui au puits de Redjem-Matoug et revint à Douz.
Quant à moi, ayant formé un convoi léger avec six de mes hommes bien armés, dont deux à cheval et quatre montés sur des chameaux chargés à demi-charge, qui ne portaient que de l'orge et de l'eau, je partis de Douz sur leurs traces, trois jours aprés eux. Outre mes deux cavaliers et mes quatre chameliers, j'avais encore un guide négre que m'avait donné / Amel (gouverneur)du Nefzaoua. Ayant rencontré, prés de Moui-Ahmed, M. de Bechevel dans sonvoyage deretour, le jour méme où il avait quitté M. Letourneux, j'eus par lui, sur leur itinéraire fait et projeté, des renseignements qui complétérent ceux qui m'avaient été donnés à Douz.
(1) Voy. Cosson, Compendium Flore Atlantica, t. Il, p. LXXX.
40 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
Mon itinéraire fut, à peu de chose près, le même que celui de M. Letourneux jusqu'à Redjem-Matoug, où j'arrivai trois jours aprés lui; mais de là, au lieu de remonter vers le nord, je partis dans la direction du sud-est, je décrivis à travers les sables de l'Erg un trajet compliqué, de manière à en relever la topographie, et finalement j'arrivai à El-Oued, abordant les oasis du Souf par le cóté du Sud-Est.
J'eus à supporter de trés fortes chaleurs pendant cette partie du voyage. Je fus sept jours sans pouvoir renouveler ma provision d'eau potable, bien que, pendant cet intervalle, j'aie trouvé des puits salés suffisants pour abreuver les animaux, qui à ce point de vue, lorsqu'ils sont bien dressés, arrivent à se contenter, au moins temporairement, d'une eau extraordinairement chargée de sels. L'eau que j'emportais dans un ton- nelet pour ma consommation, et que j'avais puisée dans l'oasis d'El- Faouara, se maintint constamment entre 42 et 44 degrés, malgré la pré- caution que j'avais prise de couvrir le tonneau avec l'étoffe d'un sac. Le 30 avril 1887, j'observai, à six heures du soir, une température de 46 degrés à l'ombre, ce qui, pour la saison, est un chiffre très élevé. Je dus rationner mes hommes et prendre des mesures rigoureuses pour les empécher de boire plus que ne le permettait notre approvisionnement.
Ayant toujours conservé l'habitude de voyager en plein jour et de ne jamais faire de marches de nuit, ce qui est une condition indispensable pour le naturaliste qui veut bien voir le pays, je fus réellement incom- modé. J'arrivai à El-Oued presque complètement insolé, ayant dû camper la veille sans eau, car le puits de l'Óued-Moussa était à sec, ainsi que celui de Mouley-Abd-el-Mijoud. Il était midi, je marchais depuis le point du jour, et la réverbération du soleil dans les dunes était excessivement pénible : je n'aurais certainement pas pu continuer ma route pendant une demi-heure de plus sans tomber, et en arrivant au poste d'El-Oued, je fus obligé de boire trois litres d'eau pour arrêter l'effet de l'insolation avant de pouvoir reprendre la parole.
J'ai done fait la route du. Nefzaoua au Souf par le sud du bassin des Chotts, et je n'ai suivi l'itinéraire ni le plus facile ni le plus direct, mais bien le plus intéressant.
Je n'ai pas rencontré de difficultés sérieuses de la part des indigènes, d'ailleurs extrêmement clairsemés dans Erg. Les indigènes, c'est-à-dire les nomades habituels, sont du reste pacifiques; la seule difficulté aurait pu venir de la part des pillards Touareg ou autres. Mais j'ai dérouté les gens mal intentionnés qui auraient pu étre tentés de s'embusquer sur ma route par la rapidité et l'imprévu de mes marches, qui ne suivaient aucune, piste frayée, et qui, ayant pour but les observations scientifiques et l'étude de la contrée, étaient complètement inintelligibles et impos- sibles à prévoir pour les gens du pays. Deux ou trois mesures éner-
E. BLANC. — NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE. 41
giques prises à temps ont suffi pour compléter l'ensemble des précautions nécessaires.
En joignant à cet ilinéraire ceux que j'ai faits à d'autres époques, j'ai traversé de part en part, de l'est à l'ouest, le désert de l'Erg oriental (1), et j'en ai dressé la carte depuis sa limite nord jusqu'au delà du 33° degré en relevant la position de tous les puits.
D'El-Oued, je rentrai en Tunisie par Nefta, voyage qui a déjà été fait précédemment par plusieurs voyageurs, mais dans lequel je m'attachai constamment à suivre un itinéraire différent des leurs et à relever la position des puits situés en dehors de la route habituellement suivie par les indigènes.
Au point de vue de la géographie, et en même temps de la botanique, je constatai dans ce voyage que, comme je l'avais signalé en 1886, il existe au sud-est du chott Djérid une région spéciale, enclavée dans les grandes dunes de l'Erg, et qui n'a pas les mémes caractéres que le reste de ce désert. Les dunes de sables, qui, sur toutes les cartes, sont suppo- sées s'avancer jusqu'au bord méridional du chott Djérid, du moins sur sa rive sud-est, s'en écarlent au contraire, et laissent entre elles et le chott une large plaine complétement horizontale, qui est évidemment, à mon avis, le fond d'un ancien chott aujourd'hui modifié dans son aspect par l'apport d'une légère couche de sable, dont les vents ont couvert sa surface. La présence d'une croüte saline, d'une horizontalité parfaite, qui existe à une faible profondeur sous le sable, et qui est formée, comme le fond du chott actuel, de gypse à peu prés pur, en est la preuve.
Cette plaine, dont le diamétre est de 90 kilométres de l'est à l'ouest et de 50 kilométres du nord au sud, se nomme le Rogaa. Elle est cou- verte d'une végétation désertique, mais arbustive, remarquable par ses dimensions. Les tribus qui parcourent cette région, sont, en allant de l'est à l'ouest, les Ghouaouds, les Adaras, les Throuds et les Souafas. Une partie de ces nomades sont compris sous la dénomination collective de Gherib.
Mais cette plaine ne se prolonge pas dans le sud de la province de Constantine au delà de la longitude de 5°10/, ce qui explique qu'elle ait
(1) Le nom d'Erg, qui signifie les dunes, s'applique plus spécialement à une large bande sablonneuse qui s'étend de l'est à l'ouest, au sud de l'Algérie et de la Tunisie. Elle est divisée en deux masses : l'Erg oriental ou grand Erg, qui s'étend au sud de la Tunisie et de la province de Constantine ; l'Erg occidental, qui s'étend au sud de la province d'Oran et d'une partie de la province d'Alger. Entre ces deux masses se trouve un passage, celui d'El Goléa. L'Erg occidental se prolonge au sud du Maroc par les sables d'Iguidi. Ce nom d’Erg est le nom générique de toutes les dunes, mais employé seul il désigne la région dont nous parlons ici. Les autres parties sablonneuses du Sahara ont des noms spéciaux (sables d'Eddeyen, sables d’Iguidi, Djouf, etc.).
42 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
passé inaperçue des géographes de l'Algérie. Elle est complétement encadrée, au sud, à l'ouest et méme au nord-ouest, par les dunes, qui, en Algérie, s'avancent beaucoup plus au nord, jusqu'au chott Melrhirh.
Du côté du nord-est, où elle s'approche de la rive du chott Djérid, la plaine du Rogaa est masquée par une contrée dont le sol est gypseux et ondulé, que l'on nomme le Djebile.
Entre le Rogaa et les grandes dunes s'étend une zone assez étroite qui porte le nom de Kreb. Ce sont des dunes non mouvantes, couvertes de végétation et ayant l'aspect de simples collines de sable. La flore y a un caractere spécial : les puits n'y sont pas trés distants les uns des autres. Enfin, au delà du Kreb, s'étend le Rommel ou Erg proprement dit, où les dunes sont mouvantes et sans végétation, et les puits extrémement rares.
J'ai relevé et figuré sur mes cartes les limites exactes de ces trois zones, qui sont celles de trois flores distinctes. Je ne puis entrer dans un plus grand détail de mes observations à cet égard : elles sont du domaine de la géographie pure et n'intéressent qu'indirectement la botanique.
El-Arfedji, point extrême où s'est arrêté M. Letourneux dans son voyage de 1887, est sur la limite de ces deux derniéres zones. Il tire son nom d'une plante qui y est abondante, l'Arfedj, qui n'est autre que l'Anvillea radiata Coss. et DR., et qui présente une particularité intéressante. Cette Composée, signalée par Duveyrier comme ayant pour habitat le désert de l'Erg, croit en effet dans cette région de dunes. Mais elle parait exiger un sol gypseux. Or, dans toute cette région, il existe presque partout une nappe d'eau comprise entre deux bancs de gypse, au-dessus desquels se trouvent des dépóts de sable plus ou moins épais, qui forment les dunes. La présence de l'Arfedj, quand on le rencontre dans l'Erg, indique donc le peu d'épaisseur du sable et le voisinage de la croüte de gypse, par conséquent en général la proximité de puits ou la possibilité d'en creuser. Cette indication peut étre précieuse pour les voyageurs (1).
Je me suis attaché d'une facon toute particulière, entre autres choses, à retrouver les plantes entrevues et imparfaitement étudiées dans mon
(1) Duveyrier, dans son ouvrage Les Touareg du Nord (p. 177), signale l'Anvillea radiata comme rencontré dans l'Erg, à Titershin et à Serdelès. Il l'indique aussi comme étant commun entre Rhat et Insalah. Mais ce n'est pas une plante des sables, ni méme une plante caractéristique de l'extrême sud de l'Afrique francaise. C'est simplement une plante gypsophile. Nous l'avons trouvée au Souf, et prés de divers puits de l'Erg, à Bir Siouf Rouahouma, à Bir Allendaoui, à Bir Badyia, etc. Mais elle est bien plus commune sur les plateaux gypseux du sud-est de la Tunisie. Nous l'avons trouvée dans tout l'Aarad, notamment entre Zarzis et Metameur, oü elle abonde. Nous l'avons re- cueillie aussi beaucoup plus au nord, entre Sfax et Gabés, aux environs de la Skirra, et
méme dans la plaine formée par l'ancien bassin lacustre du Garaat el Douza, à l'est de Gafsa. (Note de l'auteur.)
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voyage de 1886, et à compléter mes observations ou renseignements à leur égard.
J'ai examiné avec soin les différences qui existent entre les deux formes de Calligonum dont j'ai déjà entretenu la Société en 1886, et dont l'une, le C. comosum L'Hérit., porte en arabe le nom d’Artha (1), tandis que l'autre, encore confondue avec elle, porte le nom d'Azel, Azzel ou Ezzel. Les indigènes les considèrent comme deux espèces absolument distinctes, et cette distinction a d'autant plus d'importance pour eux dans la pratique, que l'une, l'Azzel, est d'une grande utilité pour le tannage des cuirs, tandis que l'autre ne peut étre employée à cet usage.
Comme je le disais l'année derniére, ces deux formes différent par la station, par la taille, par le port, ainsi que par l'époque de leur floraison. Au puits appelé Bir Faïed, où elles croissent toutes deux côte à côte, ainsi que prés du puits de Douar-Chaad (Bir Douar-Chaad), oü il existe un Azzel de trés grandes dimensions, il est particuliérement facile de comparer leurs caractères. Indépendamment des points signalés précé- demment, la principale différence est la suivante : dans Artha (C. como- sum type), les rameaux verts articulés, qui, physiologiquement, tiennent lieu de feuilles, sont fasciculés en grand nombre (de 6 à 20 en général); ils sont portés par une sorte de loupe qui forme une tubérosité rugueuse sur la branche mère. Si l'on arrache l'écorce de cette loupe, on met à découvert une agglomération de bourgeons cachés représentant d’autres rameaux avortés. [l en résulte, pour les branches qui les portent, une apparence noueuse qui se complique d'une forme en zigzag, due à une déviation latérale de la tige aprés chaque nœud. L'écorce est noiràtre et gercurée. Au contraire, chez l’Azzel, les rameaux verts articulés sont beaucoup moins nombreux : ils sont réunis souvent par deux, d'autre fois par 4 ou 5. Ils sont portés par un renflement peu prononcé, et les branches qui les produisent sont à peu prés droites. La longueur de ces rameaux est bien plus grande que chez l'Artha ; elle atteint souvent 20 à 30 centimètres, tandis que chez l'Artha elle n'est guère que de 6 à 10 centimétres; les articles ne sont pas plus nombreux dans l'un que dans l'autre cas, seulement chez l' Azzel ils sont plus allongés. En méme temps leur coloration est d'un vert plus clair que chez l'Artha, et Par- ticle basilaire de chacun d'eux, légérement renflé, est généralement coloré en rouge. L'écorce des branches est lisse et d'un gris argenté. Les entre-nœuds sont longs.
De cette disposition de la ramification résulte pour l'Azzel une plus grande facilité d'écorcage. C'est probablement la principale raison qui fait que l'écorce de l Artha n'est pas utilisée pour le tannage, tandis que
(1) Voy. le Bulletin, t. XXXIII (1886), p. 247.
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celle de l'Azzel est extrêmement recherchée. C'est à son emploi que les cuirs de Rhadamés (peaux de chèvre et de gazelle) appelés /ilalis doivent leur qualité et leur valeur. Ce sont les maroquins les plus estimés de toute l'Afrique. Ils sont d'une grande souplesse et en méme temps se rayent difficilement. Ils ont le plus souvent une belle couleur rouge qui ne s'altére pas à la lumiére. A l'envers, ils sont d'un gris mélangé d'un peu de rouge. J'ai l'honneur d'en adresser ci-joint un petit échantillon (étiqueté A).
Les maroquins de Tripoli, également rouges, sont tannés avec l'écorce d'une Conifére appelée Snobar (1), qui parait étre le Pin d'Alep. La couleur leur est donnée généralement au moyen de campéche. Une expo- sition à la lumière vive les pàlit et en fait tourner la nuance au violacé. Ils se distinguent par leur grande souplesse, mais ils sont moins résis- tants que ceux de Rhadamès. J'en adresse un échantillon (étiqueté B).
Les maroquins rouges de Derna (Cyrénaique) ressemblent beaucoup à ceux de Tripoli el se préparent de la méme facon. Leur envers est géné- ralement jaune, tandis que celui des filalis de Tripoli est le plus souvent d'un gris blanchátre.
Au Djérid, dans les oasis de Tozeur et de Nefta, on fabrique égale- ment des filalis, mais d'une qualité et d'un prix bien inférieurs. Ils sont tannés au moyen de l'écorce de Grenadier (Roummän), et colorés avec la racine de deux ou trois espéces de Garance qui sont cultivées dans les oasis. On désigne toutes ces Garances sous le nom de Fouah, ce qui a donné lieu à cette erreur, accréditée par plusieurs voyageurs, que les Arabes employaient, pour la préparation ou la teinture de leurs maro- quins, le foie de divers animaux. Ces filalis du Djérid, d'un beau rouge tant qu'ils sont tenus à l'ombre, deviennent trés rapidement d'un jaune orangé par l'exposition à la lumiére. L'envers est jaune. J'adresse à la Société un échantillon (étiqueté C) de ces filalis, ainsi que quelques ra- cines de la Garance le plus généralement employée.
Enfin, les maroquins rouges du Touat et du Tafilalet (on prétend que c'est du nom de ce pays que vient celui de filali) sont trés estimés, quoique inférieurs à ceux de Rhadamès. Ils sont aussi résistants, mais moins souples. Ils sont d'un rouge différent et bien reconnaissable. Leur préparation se fait au moyen de l'écorce de diverses plantes. On m'a dit qu'il y entrait de l'écorce d'Arganier : je n'ai pas pu vérifier ce fait, qui me semble douteux. Les indigènes de ces régions m'ont déclaré employer pour le tannage proprement dit une macération de noyaux de
"a Ce nom est commun à plusieurs espèces de Conifères, et notamment à tous les ins.
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dattes mélangés à un produit végétal appelé en berbère takouhout (1), et pour la teinture tantôt la Garance (Fouah), tantôt une matière qu'ils nomment ari, ce qui est le nom commun à presque toutes les teintures écarlates, et que je n'ai pu examiner encore. J'adresse un échantillon de peau de mouton tannée par ce procédé (étiqueté D) et un morceau de maroquin du méme pays (marqué E). Le revers de l'échantillon D est d'un marron foncé, ce qui parait étre l'effet du tannin des noyaux de dattes.
L'échantillon étiqueté F est un morceau de maroquin ordinaire de Constantine, également rouge.
Les renseignements que je donne ici ne sont qu'une partie d'une étude plus générale que j'ai entreprise relativement aux matières linc- toriales, alimentaires ou pharmaceutiques, d'origine végétale, employées par les Arabes, et dont j'espére communiquer plus tard les résultats à la Société.
L'Azzel est considéré par les Arabes comme un véritable arbre, ce qui n'a pas lieu pour l’Artha, qui n'est qu'un arbuste. Si l’on s'en rap- porte au nom, ce serait à cette espéce qu'appartiendraient les deux gros arbres signalés par M. Duveyrier dans le pays des Touareg, bien qu'il les considére comme appartenant à deux autres espéces, mais sans avoir, croyons-nous, constaté le fait botaniquement. L'un se nomme Azel-en- Edôkan et se trouve près de Feouet. C'est là qu'Edókan, l'un des chefs des Touareg de Rhat, fut tué il y a deux siècles, par Eg-Ténekerbés, l'un des chefs des Jouràghen (2); ce serait un Acacia arabica. L'autre, appelé Azel-en-Bangou, se trouve dans l'oued Nesa inférieur : il me- sure 5",40 de circonférence : ce serait un Tamarix articulata (3). Vu ces dimensions, il est vraisemblable qu'effectivement ces arbres ne sont pas des Calligonum. Mais le seul emploi du nom fait voir qu'il peut impliquer l'idée d'un végétal de grande taille.
Outre l'Azzel, j'ai recueilli dans ce voyage, en fait arbustes, le Merkh (Genista Saharæ Coss.), qui n’a pas encore été rencontré en Tunisie (4), quoiqu'il soit commun au Souf. La configuration géographique de la région, telle que je l'ai exposée ci-dessus, rend compte de cette anomalie.
(1) J'ai vu appliquer ce nom de takouhout à une galle qui se produit sur les petites branches de Tamarix africana, et dont j'ai l'honneur d'adresser ici un échantillon a la Société. Cette galle, dont le diamètre est d'environ un centimètre à un centimétre et demi, est relativement assez rare. Il y a trois galles différentes sur ce Tamariz. Je les ai recueillies toutes trois et j'ai obtenu les insectes de deux d'entre elles; mais Je n'ai pas encore obtenu l'éclosion de celui qui produit la galle dont il s'agit. :
D’après ies renseignements qui m'ont été donnés, le takouhout du Touat serait une galle du Tamarix articulata.
(2) Duveyrier, Les Touareg du Nord, p. 349.
(3) Duveyrier, Loc. cit., p. 331.
(4) Letourneux, loc. cit., p. 546.
46 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
Le Merkh ne pousse que dans le sable, dans les véritables dunes. Son aire d'habitation suit les limites du Rommel. Il en résulte que, par suite de l'existence, au sud-ouest de la Tunisie, de la région gypseuse du Dje- bile et des régions spéciales du Rogaa et du Kreb, puis, plus à l'est, des montagnes crélacées du plateau de Douiràt et de la plaine gypseuse de l'Aarad, cet arbuste ne pénètre pas en Tunisie, quoiqu'on le trouve en Algérie sous des latitudes plus élevées que les régions dont il s'agit. Pour le rencontrer, entre les longitudes extrémes de la Tunisie, il faut aller jusqu'à une latitude plus méridionale que celle qui est admise conven- tionnellement comme étant la limite méridionale actuelle de la Régence. Entre le Souf et le Chott Djérid, sa limite orientale est au puits d'El- Houaidj, c'est-à-dire à 45 kilomètres à l'est d'El-Oued. Plus à l'est, il est remplacé partout par le Retem à fleurs blanches (Retama Retam Webb) qui, s'accommodant d'un sous-sol et méme d'un sol gypseux. est trés abondant dans toute la Tunisie méridionale, tandis qu'il est relativement rare au Souf.
J'ai cherché vainement, aussi bien dans les grandes dunes que dans le Kreb et le Rogaa, deux espèces dont j'espérais enrichir la flore tuni- sienne, le Chobbroum (Zilla macroptera Coss.) et l'Ittel (Tamarix articulata Vahl), dont M. Letourneux et moi avions entendu parler l'année précédente (1). L'exemplaire isolé sans fleurs et sans fruits que M. Letourneux avait cru un instant appartenir à cette dernière espèce, dans l'une des petites oasis du Nefzaoua méridional, n’était décidé- ment pasle T. articulata. Nous l'avons vérifié depuis, chacun de notre cóté.
En revanche, j'ai découvert, à une demi-journée de marche environ à l'ouest du point extréme oü s'est arrété M. Letourneux, une fort belle Liliacée qui malheureusement n'était pas en fleur, mais qui n'était pas rare dans le Kreb. Ses feuilles avaient la forme d'un prisme à section carrée, ayant environ un demi-centimétre de cóté. J'en ai récolté des oignons dont j'ai envoyé l’un à M. le D' Cosson, et les autres au Muséum. Ces derniers ont germé, mais n'ont pas fleuri, sans doute faute de cha- leur et de sécheresse. En effet, au 1* mai, par une température de 44 degrés à l'ombre, la Liliacée en question, qui eroissait en plein soleil, n'était pas encore préte à fleurir. J'ai retrouvé cette plante prés de Bir- Allendaoui, à 40 kilométres à l'est d'El-Oued, puis à Bir Ouled-Chabia, dans la méme région ; enfin, plus au nord, dans l'Oued-Chebéka, entre le Souf et Nefta.
Au cours du méme voyage, j'ai récolté une belle Orobanche dont les fleurs bleues sont marquées de deux taches blanches, et dont je joins à
(1) Voy. Letourneux, in Bull. Soc. bot. de Fr., t. XXXIII, p. 545,
A
E. BLANC. — NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE. 47
ma lettre des échantillons conservés dans l'alcool. C’est, d’après M. le D' Bonnet, le Phelipæa ægyptiaca Pers. Je l'ai trouvée dans le Nefzaoua méridional, en fleur au mois d'avril 1887, prés des oasis d'El- Guelaa et de Douz, et j'ai constaté son parasitisme sur les racines de l'Henophyton deserti Coss. et DR., plante que, M. Letourneux et moi, nous avions déjà recueillie l'année précédente dans la méme localité.
J'ai trouvé aussi, trés abondante dans tout le Rogaa et le Kreb, ainsi que dans les environs immédiats de Cobria, le Phelipæa lutea Desf., dont jai constaté le parasitisme sur les racines de l'Artha (Calligonum comosum L'Hérit.) et sur celles du Zeÿta (Limoniastrum Guyonia- num DR.). Elle était déjà signalée comme parasite de l’Atriplex Halimus (1) et sur les Chénopodées en général (2).
Je joins également à ma lettre un tube contenant une fleur de cette plante conservée dans l'alcool.
Ses fleurs jaunes abandonnent dans l'alcool une matière colorante d'un trés beau rouge.
Parmi les Cryptogames, j'ai recueilli dans les dunes trois espéces de Champignons assez remarquables, que j'ai adressées au Muséum.
L'une d'elles, qui, parait-il, rappelle singuliérement certaines formes habitant les déserts de l'Arizona et du Nouveau Mexique, a été déter- minée par M. Maxime Cornu comme étant un T'ulostoma. Je l'ai retrouvée à Tozeur, à Nefta et dans l'Erg.
La seconde espèce est un Coprinaire, le Montanites Delillei; elle n'est pas rare dans le Rogaa.
Enfin la troisiéme, appelée Tachouchat zebha, est comestible : elle est trés recherchée par les Arabes et les Souafas qui la mangent. D’après la détermination de M. Maxime Cornu, c'est un Podaxon. Je l'ai trouvée dans le Rogaa et notamment prés du puits appelé Bir Bou- Chofra. ;
Tels sont les renseignements botaniques principaux qui résultent de mes deux derniers mois de voyage au sud du chott Djérid. Des Notes ultérieures contiendront des indications relatives aux observations que jai faites à d'autres époques et dans d'autres régions, ou celles que je vais continuer à faire.
(1) Voy. Trabut, in Bull. Soc. bot., 10 décembre 1886, (2) Voy. Boissier, Flora Orientalis, t. IV, p. 500.
48 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
II
Tunis, 13 aoùt 1888.
J'ai l'honneur de rendre compte à la Société de quelques-unes des observations botaniques que j'ai effectuées dans le sud de la Tunisie et dans les régions voisines pendant ma dernière année de séjour, c'est-à- dire depuis l'automne de 1887 jusqu'à présent.
Conformément à ce que je m'étais proposé il y a dix-huit mois, et comme l’annonçaient mes Notes précédentes, j'ai visité de nouveau, en 1887-88, toute la partie sud-est de la Régence, c'est-à-dire le voisinage de la frontière tripolitaine. J'ai en outre étudié les environs immédiats de Tripoli ainsi que diverses autres localités du Sahara septentrional.
L'occupation par les avant-postes francais de points tels que Douiràt et Foum-Tatahouin, dans les montagnes des Oudernas, m'a permis de pousser mes recherches jusqu'à une limite beaucoup plus reculée que ne l'avaient fait mes devanciers, et que je ne l'avais fait moi-méme les années précédentes, dans la direction du sud-est par rapport à nos pos- sessions tunisiennes. Quant aux directions du sud et du sud-ouest, j'y avais fait des reconnaissances pendant les années antérieures.
Ce serait sortir du cadre d'une Note à la Société, que de donner ici une liste des plantes dont j'ai constaté la présence dans les diverses localités. Je me bornerai à signaler trois ou quatre faits marquants.
D'abord, contrairement à mon attente, je n'ai rencontré aucun Gom- mier, ni dans la plaine des Ourghemma, ni dans les montagnes qui avoi- sinent Douiràt, non plus que dans aucune partie des plateaux qui pro- longent dans la direction du sud le massif des Matmata et qui portent, en allant du nord au sud, les noms de plateaux de Toujane, montagnes des Ahouayas, des Ghomrassen, des Oudernas, etc. C'est l'ancien pays des Troglodytes. J'en avais déjà exploré la partie nord en 1885, après quel- ques autres voyageurs; mais c'est cette année seulement que j'ai pu en parcourir la partie sud, qui va se rattacher au djebel Nefousa tripolitain. Nulle part je wy ai vu d' Acacia tortilis. L'habitat de cette espèce dans la vallée de Thalah, entre Gafsa et Sfax, est donc tout à fait disjoint.
À propos de cetle espéce, je placerai ici une note que j'ai rédigée le I octobre 1887 et transmise depuis à la Société, mais qui, par suite des retards inhérents à mes voyages continuels, n'est parvenue à son adresse que longtemps aprés, et n'a pu encore étre présentée, Cette note ayant perdu une partie de son actualité, nous l'insérons ci-dessous en forme de simple renvoi et en petits caractères, pour ne pas lui faire
E. BLANC. — NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE. 49
tenir une trop grande place et ne pas lui donner plus d'importance qu'elle ne mérite. Toutefois la question à laquelle elle a trait étant restée pendante, elle peut présenter un intérét (1).
Pas plus dans le sud-est que daus le sud-ouest de la Tunisie, je n'ai
(1) En arrivant à Paris, pour y faire un trés court séjour, entre deux voyages, j'ai connaissance de la note de M. le D! Cosson, insérée dans le Bulletin du 11 mars 1887.
En ce qui concerne les remarques relatives à une communication que j'avais eu l'honneur d'adresser au mois de janvier 1887 à la Société au sujet des Acacias gommi- fères de Tunisie, je crois devoir répondre par les observations suivantes.
Comme le dit fort bien M. le D" Cosson, et comme je le disais moi-même dans ma lettre précitée, je ne pense pas que cette lettre ait ajouté des faits nouveaux à ceux qui avaient été signalés par les autres voyageurs mes devanciers. Elle ne fait guére que confirmer des observations précédentes; cependant il s'y trouve encore quelques détails qui semblent nouveaux ou qui portent sur des points jusque-là obscurs, puis-
' qu'iis soulévent des objections de la part de notre savant collégue. Quoi qu'il en soit, cette lettre avait pour objet, non d'engager une controverse, mais d'accompagner un petit envoi de graines destinées à la Société, et d'expliquer une carte qui y était jointe, procédé plus précis, quand il s'agit d'une aire géographique, que toutes les indications verbales ou écrites.
Pour ce qui est relatif à la découverte de l'Acacia lortilis par Duveyrier en 1861, aux environs de Rhadamès, puisque M. Cosson nous dit avoir déterminé lui-même les échantillons rapportés par cet éminent voyageur et les avoir reconnus pour être des Acacia différents de l'A. tortilis, il est évident qu'il en doit être ainsi. Mais l'ouvrage de M. Duveyrier (Les Touareg du Nord) n'en porte pas moins, à la page 164, la description d'un Acacia gommifère, qu'il a trouvé dans diverses localités dont il donne la liste, et qu'il identifie expressément avec l'Acacia observé par Pellissier au Bou-Hedma, c’est-à-dire avec l'espèce qui nous occupe. Il est vrai qu'il décrit cet arbre sous le nom d'Acacia arabica Willd. et non sous celui d'A. tortilis, mais l'indication de la localité de Bou-Hedma ne laisse pas de doute : c'est bien à l'Acacia de Tunisie que se rappor- tent les diverses remarques contenues dans l'ouvrage en question. Quant à l'identité réelle entre cet Acacia tunisien (A. tortilis) et les échantillons que M. Duveyrier a rapportés des environs de Rhadamès et que M. le D" Cosson a déterminés comme étant PA. arabica, je n'ai pas prétendu l'établir, n'ayant pas vu les échantillons. Je me borne aux textes des ouvrages publiés. Si l'Acacia rencontré par M. Duveyrier dans diverses parties du Sahara n'est pas l’A. fortilis, la discontinuité de l'aire de cette dernière espèce n'en est que plus remarquable. D'ailleurs je compte pouvoir fournir bientôt à mes collégues plus compétents que moi un contingent de nouveaux matériaux sur cette question et sur diverses autres, car je pense pouvoir explorer cet hiver et en 1888 la région montagneuse qui avoisine Douirât et s'étend vers Rhadamés. Cette contrée, assez facilement accessible autrefois, est devenue, depuis une dizaine d'années, l'une des plus dangereuses de l'Afrique; cependant les études préparatoires que j'ai faites l'année dernière et l'état actuel des tribus mne font espérer de pouvoir y pénétrer.
En passant, je reléve dans la Note de M. Cosson une inexactitude sans importance. M. Letourneux n'a pas visitéle Thalah en 1886, et je n'y suis jamais allé avec lui. J'ai fait seul tous mes séjours dans la forét de Gommiers. C'est au retour d'un voyage tout différent que j'ai eu le bonheur de faire avec lui au Nefzaoua en mars 1886, et pendant lequel nous n'avons nullement pénétré dans le Thalah, que M. Letourneux a, en ma présence, trouvé un pied de Gommier isolé à l'entrée du Khranguet-Oum-el-Oguell, dans les montagnes du Cherb. Je demande pardon à la Société de l'entretenir de détails aussi personnels et aussi insignifiants, mais enfin, puisque M. le D" Cosson croit devoir faire des rectifications sur des faits qui me concernent, je suis forcé de faire observer qu'il a été mal informé.
Je ferai remarquer aussi que les contradictions relevées par M. le D” Cosson entre ma Note du mois de janvier dernier (1887) et les observations faites par les voyageurs
T. XXXVI. (SÉANCES) 4
50 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
retrouvé le Chobbroum (Zilla macroptera Coss.) du Sud oranais, que j'ai pourtant cherché spécialement.
En revanche, j'ai obtenu pleine confirmation de mes observations anté- rieures sur l'Apteranthes Gussoneana. Il y a deux ans, en envoyant au Muséum des échantillons vivants de cette plante, recueillis par moi à la fin de novembre 1886, sur les bords de l'oued Akarit, au nord de Gabès, je signalais son parasitisme sur les racines de l'Atriplez mollis Desf.
mes devanciers n'existent pas en réalité. En effet, j'ai parfaitement indiqué, aussi bien dans ma Note précitée que dans le croquis qui s'y trouvait joint, les Gommiers de la plaine de Mehamla, au nombre d'une dizaine (Voy. le Bulletin de 1887, p. 119); si je n'ai pas parlé de ceux du Segui, c’est qu'ils ont été presque tous détruits, ils ont dis- paru pour la plupart depuis la visite de MM. Bonnet et Doümet. Enfin la station du Khranguet-Oum-el-Oguell, signalée par M. Cosson (1) comme étant le point le plus méri- dional de l'habitat de l'espèce en Tunisie, est précisément la même localité que j'avais : indiquée dans ma Note (2), en l'appelant extrémité septentrionale de la branche ouest du Khranguet-el-Oucif. En effet, les deux cols appelés Khr.-Oum-el-Oguell et Khr.-el- Oucif ne sont distincts que dans leur partie nord. Ce sont les deux débouchés d'un méme défilé qui traverse la chaine du Cherb et qui, sur le versant sud, n'a qu'une issue. L'ensemble de tout ce système de cols porte indifféremment les noms de Khranguet- el-Oucif et Kranguet-oum-el-Oguell. Je crois donc étre au fond absolument d'accord, sur tous ces poinls, avec mon savant contradicteur.
Je regrette de ne pouvoir étre de son avis en ce qui concerne l'exploitation de la gomme de l'Acacia tortilis. Mais nulle part je n'ai vu les Arabes de Tunisie se livrer à l'extraction de ce produit. Si MM. Doümet et Pellissier ont mentionné cette industrie, ils ont dà le faire d’après de faux renseignements ou bien être induits en erreur par un fait local et fortuit. Il n'est pas impossible qu'ils aient vu des Arabes recueillir acci- dentellement quelques morceaux de gomme de Thalah, mais ce n'est pas là une exploi- tation véritable : les habitants n'utilisent pas cette gomme, ils n'en font pas commerce et ils ne font rien pour en provoquer la production, ce qui est fort heureux dans l'in- térét du maintien de ces arbres, déjà exposés à bien assez d'autres causes de destruc- tion.
Je puis dire en passant que j'ai étudié ce point avec le plus grand soin ; car, chargé officiellement, pendant trois ans, comme chef du service forestier dans le sud de la Tunisie, de la conservation et, s'il y avait lieu, de la mise en valeur des Gommiers dont il s'agit, j'ai dà naturellement m'en occuper d'une manière plus suivie que les voyageurs qui se sont bornés à traverser la forét en quelques jours.
Je suis d'ailleurs d'accord avec M. Duveyrier qui, parlant des Acacias du Bou- Hedma, et par conséquent de ceux qui nous occupent, déclare n'avoir jamais vu obtenir la gomme par incision ni faire la récolte de ce produit: il ajoute que la chose est possible, mais qu'elle est inusitée dans les régions qu'il a parcourues.
Je persiste donc à dire que ia plupart des Gommiers du Thalah ne produisent pas de gomme du tout ; ceux qui en exsudent sont fort rares et n'en donnent pas plus que les Cerisiers ou les Amandiers de nos jardins, c'est-à-dire qu'il n'y a pas là matière à une exploitation industrielle.
Si M. le D' Cosson connait un procédé pour faire rendre à ces arbres un produit annuel moyen de 1/3 de litre de gomme, ce qui est son évaluation, surtout sans les détériorer, je Jui serai très reconnaissant de vouloir bien me l'indiquer. Je m'empres- serai de le faire appliquer immédiatement, au moins à titre d'essai, à un certain nombre de Gommiers dela plaine du Thalah, et je rendrai compte à la Société des résultats obtenus. (Note de l'auteur.)
(1) Méme Bulletin, p. 123 (2) Méme Bulletin, p. 119.
E. BLANC.,— NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE. of
Le manque de temps et d'instruments convenables ne m'avait pas permis de bien examiner l'insertion des sucoirs, qui s'étaient plus ou moins brisés dans le déchaussement du rhizome.
Cette année, ayant le loisir nécessaire et ayant rencontré de nombreux échantillons daus diverses localités, j'ai constaté avec certitude le para- sitisme de cette plante sur les racines du Nitraria tridentata Desf. (à Guescar-ez-Zerkine, non loin de l'oasis de Mareth). sur les racines du Zygophyllum album L. (à Ain-Rechada), sur celles du Caroxylon arti- culatum Moq.-Tand. (à Foum Tatahouin), sur celles de l’Alfa (Stipa tenacissima L. (au djebel Younés, prés Gafsa), enfin sur celles du Lygeum spartum Lœf. (à Douiràt, à Foum-Tatahouin, et dans toutes les montagnes du Ghomrassen, où l’Apteranthes n’est pas rare).
Toutefois, comme la plante est verte, son parasilisme peut n'étre que partiel. Le rhizome, beaucoup plus volumineux que la partie épigée, contient souvent de la chlorophylle. Il s'enchevétre entre les racines des végétaux précités, et émet des suçoirs qui vont s'implanter sur celles-ci. Quant à la partie aérienne de l'Apteranthes, elle se cache le plus souvent dans la touffe de la plante nourricière. C'est méme ce fait qui contribue surtout à faire passer cette espéce pour rare. Elle l'est beaucoup moins qu'on ne le croit généralement.
Ci-joint un échantillon de la plante, avec une partie du rhizome. On y voit les fleurs et un fruit incomplètement développé.
Un point qui me parut délicat fut celui-ci. Les Arabes des environs de Douiràt, qui donnent à l'Apteranthes le nòm de Dakhrmouss, et qui con- naissent bien son parasitisme sur l'Alfa, le font sécher et le mangent. Or, cette plante, que j'ai goütée à l'état frais, est extrêmement àcre, et il semble à priori qu'elle doive contenir, comme la plupart des Asclépia- dées, un alcaloïde vénéneux.
J'ai communiqué, pour analyse, un lot d'échantillons à M. Charaux, pharmacien militaire à Tébessa, qui s'occupe tout spécialement de recherches sur les alcaloides, et qui en a découvert récemment plusieurs nouveaux, en les extrayant des plantes de la région. M. Charaux a con- staté que l'Apteranthes ne contient aucun alcaloide véritable, mais seu- lement une matiére àcre, trés volatile, qu'il a analysée et qui est détruite ou éliminée par l'action d'une forte chaleur.
Il est possible que la simple dessiccation, surtout dans un air trés chaud, suffise à produire cet effet, ce qui explique l'usage alimentaire de la plante séchée.
Je profite également de cette Note pour donner quelques détails sur une des plantes les plus remarquables du Sahara, le Zizyphus Spina-Christi Willd., dont j'ai l'honneur d'adresser à la Société quelques graines. Ce lujubier est, avec le Palmier, l'Olivier et le Caroubier, le seul arbre de
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première grandeur qui existe dans la région des oasis de Tunisie. C'est une espèce qui semble en voie de disparition, car on n’en observe plus que quelques pieds isolés et très rares, occupant une aire absolument discontinue. Mais les individus que l’on voit atteignent souvent des dimensions considérables. Dans l'oasis de Tozeur, près du village d'Abbés, et devant la porte du marabout de Sidi-Ali-bou-Lifa, existe l'échantillon le plus gros que j'aie rencontré. Son tronc mesure 6",90 de tour au niveau du sol; il se bifurque presque immédiatement en deux brins, l'un vertical et l'autre trainant. Le brin droit a 9",65 de tour à hauteur d'homme et conserve cette grosseur jusqu'à 4 mètres de hauteur, point où se trouve la fourche principale. Quant à la grosse branche couchée, dont la grosseur est un peu moindre, elle a 24 mètres de longueur.
Dans l'oasis de Nefta il en existe un autre échantillon, moins gros, mais remarquable par sa régularité, sa beauté et sa vigueur. Il mesure 3",60 de tour à hauteur d'homme, 4 mètres de haut jusqu'à la fourche principale et une vingtaine de mètres de hauteur.
Ces deux arbres présentent un géotropisme extrémement prononcé. Leur port est celui des Frénes Parasols de nos pays. Cette disposition est rendue encore plus remarquable chez celui de Nefta par la régularité de la ramification de sa cime, qui forme un dais parfaitement rond. Les branches principales, qui sont. d'abord dressées, décrivent des arcs de cercle et se recourbent vers la terre : elles donnent naissance à des branches secondaires présentant le méme phénoméne, et ainsi de suite.
Cette disposition est, nous l'avons constaté, commune à la plupart des individus de cette espéce dans toute la région.
On donne en Tunisie à cet arbre le nom de Nebga, qui est le méme que celui de Nabq, indiqué par Boissier comme étant le nom que porte le Zizyphus Spina-Christi en Égypte (1).
Je ne prétends nullement recommencer ici une controverse qui n'a été que trop souvent soulevée au sujet du fameux Lotus, dont les auteurs latins et grecs ont parlé, et dont se nourrissaient les Lotophages. Je crois qu'il est impossible de trouver une plante qui réunisse à la fois tous les caractères que les divers ouvrages de l'antiquité ont assignés au végé- tal producteur de ce fruit, et cela pour une bonne raison, c'est que, là comme ailleurs, les géographes anciens, se copiant les uns les autres ou procédant par renseignements et ayant rarement fait eux-mêmes des observations directes, ont confondu sous le même nom plusieurs végétaux distincts, en mélangeant leurs caractères.
Je dirai seulement que, si l'on écarte l’hypothèse du Palmier (qui au premier abord est celle qui paraîtrait présenter le plus de vraisemblance,
(1) Boissier, Flora Orientalis, t, I, p. 13, et t. V, p. 824.
E. BLANC. — NOTES RECUEILLIES DANS LE SUD DE LA TUNISIE 53
à cause de l'importance des dattes au point de vue alimentaire, mais qui semble pourtant devoir étre repoussée, vu le peu de rapport qui existe entre le Palmier et le signalement de l'arbre dépeint par les anciens et vu le parallèle établi par Hérodote et par Polybe entre le fruit du Lotus et la datte), c'est assurément le Nebga qui répond le mieux aux descriptions qui nous ont été léguées, et c'est lui qui réunit la plus grande somme de caractères s'accordant avec ces descriptions. A l'appui de cette hypothése on peut invoquer tous les arguments qui ont porté beaucoup de botanistes à identifier le Lotus avec le petit Jujubier du nord de l'Algérie (Zizyphus Lotus L.), et, en plus de ces arguments communs, il en existe, en faveur du Zizyphus Spina-Christi, d'autres, qui résultent des propriétés de son fruit, de sa taille, de son aire d'habitation.
Le fruit de cette espéce est comestible, il est assez gros, il est assez abondant sur chaque arbre, et il a des qualités nutritives suffisantes pour avoir pu tenir une place importante dans l'alimentation des habi- tants. Ce n'est le cas pour aucun des autres fruits qui ont été proposés, sauf pour la datte, qui, nous l'avons dit, est écartée à priori.
La taille du Nebga est assez grande pour pouvoir répondre au signa- lement qu'en ont donné les géographes anciens les plus généreux sous ce rapport. Quelques-uns ont bien dit que c'était un arbuste, mais ils sont en minorilé.
Enfin, certains textes disent que l'on pouvait aller d'(Ea à Tacape (de . Tripoli à Gabès) sans sortir de l'ombre des Lotus. Pour la taille comme pour: l'habitat, cette tradition ne peut s'appliquer à aucun arbre ou arbuste autre que le Nebga, et elle peut parfaitement s'appliquer à ce dernier, en faisant une légère part à l'exagération des auteurs. En effet, son aire d'habitation dans l'Afrique du Nord coincide bien avec le pays dont il s'agit, et il a pu y être commun à l'époque où le desséchement qui a donné à la flore son aspect désertique était moins complet-qu'aujour- d'hui (1). Tl est impossible de se promener à l'ombre des buissons ram- pants et hérissés d'épines que forment le Sidra (Zizyphus Lotus), le Rhardek (Nitraria tridentata) ou le Djedari (Rhus oxyacanthoides), trois espèces présentées tour à tour comme ayant eu le privilège de nour- rir cette mystérieuse peuplade à laquelle on a vraiment voulu attribuer un goùt par trop singulier; au contraire le Nebga donne une ombre épaisse et trés recherchée dans ce climat brülant.
Son apparence spéciale d'espéce en voie de disparition dans cette
(1) Les trés nombreuses et très importantes ruines romaines que l'on rencontre à chaque pas dans le sud de l'Aarad, depuis Gabés jusqu'à Tripoli, prouvent qu'à l'époque romaine le pays a été peuplé, cultivé, et par conséquent beaucoup plus humide qu'au- jourd'hui. Alors le Zizyphus Spina-Ghristi pouvait y prospérer, car le manque d'eau seul l'en empéche actuellement.
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partie de l'Afrique, et la coincidence de l'aire qu'oecupent ses vestiges actuels avec l'ancien pays des Lotophages, sont des arguments sérieux.
Les autres fruits énumérés autrefois comme pouvant étre le Lotus antique n'ont aucune qualité nutritive, surtout pour servir de base à la nourriture d'un peuple.
Il en est de méme du fruit du Nitraria tridentata Desf. (en arabe Rhardek), ne plus récemment et qui est commun dans la méme région. Malgré la haute autorité de Pellissier, il me semble tout à fait impossible d'admettre la théorie, rapportée par M. Duveyrier (1), et d'aprés laquelle ce serait là le véritable Lotus. J'ai souvent goüté à ce fruit et j'en ai parlé à bien des indigènes. Quoique Pellissier le déclare « vivifiant et d'un goüt exquis », je persiste à ne pas le tenir pour comestible. D'abord il est fort peu charnu, presque tout son volume étant occupé par le noyau, qui est relativement trés gros, el la chair étant trés aqueuse. Puis, bien que je n'aie pas constaté d'empoisonnement par ce fruit, et bien que j'en aie mangé sans inconvénients en petite quantité, je le crois vénéneux. Les Arabes du sud de la Tunisie et ceux de l'Erg, loujours affamés et si empressés à recueillir et à manger tout ce qui peut avoir la moindre propriété nutritive, ne le mangent pas, ce qui est un fort mauvais indice. Mon opinion est donc que cette espèce n'est cer- tainement pas le Lotus.
Je ne discute méme pas la candidature du Djedari (Rhus dioica Willd., Rh. oxyacanthoides Dun.), autre arbuste épineux dont l'aire. d'habitation concorde bien avec la contrée assignée aux Lotophages et qui dans cette région est, en dehors des oasis, le végétal ligneux le plus abondant parmi ceux qui atteignent une certaine taille. Mais son fruit est encore moins comestible que le précédent.
J'ai l'honneur d'adresser au secrétariat général de la Société une petite boite contenant quelques graines du gros Nebga de Sidi-bou-Lifa, pour qu'elles puissent étre semées ou données à des botanistes curieux de les semer (j'en ai envoyé un autre lot au Muséum). Je souhaite aux destinataires, non pas de vivre assez pour voir les Jujubiers qui naitront de ces graines atteindre les dimensions de l'arbre qui les a fournies, mais du moins de pouvoir constater si les jeunes sujets auront quelque chose de la végétation exubérante de ce vieil arbre, qui ne donne aucun signe de décrépitude, car certaines de ses feuilles atteignent 07,08 de longueur, et ses fruits ont souvent la grosseur de petites pommes.
Parmi les reconnaissances que j'ai faites dans cette dernière campagne, c'est-à-dire à la fin de 1887 et en 1888, je signalerai encore notamment, pour terminer, l'étude approfondie de la région de montagnes qui s'étend
(1) Voy. Duveyrier, Les Touareg du Nord, p. 175.
LECLERC DU SABLON. — CAS PATHOLOGIQUE D'UNE LÉGUMINEUSE. 55
au nord-est du chott Rharsa, entre ce chott et Feriana, et qui a pour principal centre Tamerza. J'avais déjà parcouru cette contrée à la fin de 1886 ; je l'ai fait de nouveau deux fois en 1887 et en 1888, en évitant de suivre les mêmes itinéraires que notre collègue M. Letourneux, qui l'a visitée de son côté en 1887. Comme notes de géographie botanique re- cueillies par moi dans cette région, je n'en citerai que quatre, pour ne pas entrer dans des détails trop longs, à savoir : l'Erythrostictus punc- tatus Schlecht., au sud de l'oasis de Chebika (en fleur le 26 décembre); l'Ephedra alata DC., qui couvre en: partie le cône de déjection formé dans le ehott Rharsa par le torrent de Tamerza, à la partie inférieure duquel cette plante a donné son nom (Oued Allenda) : c'est, je crois, la seule station où cette plante existe au nord des Chotts. Enfin, dans les mêmes montagnes, j'ai rencontré l'Ephedra greca Mey., près de loued Seldja, à mi-distance entre Ras-el-Aioun et Sidi-Bou-Dif, et l'Ephedra altissima Desf. au djebel Younés, à l'est de Gafsa.
En résumé, je viens de terminer, dans trois années de voyages non interrompus, la reconnaissance compléte et. détaillée de la partie méri- dionale de la Tunisie et d'une parlie des contrées voisines. Depuis le mois de septembre 1885, j'ai couvert d'un réseau serré d'itinéraires tout le pays compris en longitude entre Tripoli et El-Oued, et en latitude entre le 33* et le 35° degré, sans préjudice de voyages en dehors de ces limites, notamment de quatre itinéraires poussés, par des tracés autant que pos- sible non fréquentés, jusqu'à la cóte nord de l'Algérie et de la Tunisie, c'est-à-dire jusqu'au 37° degré. Je serai heureux de communiquer à ceux de nos collégues qui s'occupent de travaux botaniques spéciaux tous les documents ou renseignements qui pourront les intéresser, parmi ceux que j'ai rapportés.
M. Leclerc du Sablon fait à la Société la communication sui- vante :
SUR UN CAS PATHOLOGIQUE PRÉSENTÉ PAR UNE LÉGUMINEUSE, par M. LECLERC DU SABLON.
J'ai eu l'occasion d'observer, au mois de novembre dernier, une parti- cularité assez intéressante que présentaient plusieurs jeunes plants de Légumineuses cultivées dans les serres du Muséum d'histoire naturelle. Ces arbustes, que l’on m'a donnés pour appartenir à l'espéce Acacia Melanoxylon, portaient sur leurs phyllodes et leurs jeunes branches de petites excroissances vertes de 1 ou 2 millimètres de hauteur qui don- naient à l'ensemble une apparence verruqueuse. L'explication de ce fait
56 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
qui me fut fournie par le chef des serres est la suivante : les jeunes rameaux de l'Acacia avaient été pincés trop tard pour que de nouvelles branches puissent se former et la séve avait été employée à former de petites excroissances à la surface de la plante.
Pour reconnaitre la nature de ces productions anormales, j'ai fait l'ana- tomie de l'un des pieds que j'avais observés. Une lige non modifiée présente un cylindre central normal entourée d'une écorce dont les trois ou quatre assises les plus extérieures renferment beaucoup de chloro- phylle et sont disposées comme les tissus en palissade de la feuille. Dans une partie modifiée de la tige, on voit que ces cellules en palissade se sont considérablement allongées dansle sens du rayon. Les cellules de l'épiderme s'étant allongées trés faiblement ont été brisées par le déve- loppement des parties sous-jacentes. Toutes les autres parties de la tige n'ont subi aucune modification. Les excroissances de la tige étaient donc dues uniquement à l'allongement des cellules en palissade de l'écorce de la tige. Il faut bien remarquer qu'il y aeu seulement allongement des cellules sans cloisonnement ; il n'y a donc pas eu formation de cellules nouvelles.
Les excroissances formées sur les phyllodes avaient exactement la méme structure que celles de la tige. Les cellules du tissu en palissade s'étaient allongées parallélement à leur plus grande direction en rompant l'épiderme. Comme dans la tige, les excroissances étaient produites sans formation d'aucune cellule nouvelle.
M. Malinvaud donne lecture de la communication suivante :
DE DJIDJELLI AUX BABORS PAR LES BENI FOUGHAL, par M. L. TRABUT.
17--23 juillet 1888.
Le trajet d'Alger à Djidjelli se fait commodément par mer, le vapeur parti d'Alger le soir arrive au jour à Bougie; après six heures d'arrét il se dirige sur Djidjelli, oà l'on débarque dans l'aprés-midi.
Les cótes de la Kabylie ne le cédent en rien comme pittoresque aux rives d'un lac de la Suisse, partout de grandes montagnes à l'horizon. Et longtemps avant de mettre pied à terre, nous scrutions l'imposant massif des Dabors, but de notre excursion (1).
Djidjelli, qui n’occupait autrefois qu'une pointe rocailleuse, s'étend aujourd'hui dans la verdure jusqu'au pied des collines. C'est pour le
(1) J'ai fait ce voyage en compagnie de mon collègue et ami le D" Soulié,
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TRABUT. — DE DJIDJELLI AUX BABORS.
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botaniste un centre d'excursions intéressantes, les plantes spéciales du littoral constantinois et de la Kroumirie commencent à peu près à ce point, c’est aussi la région des grandes pluies (4 mètre et plus par an). Une visite des environs immédiats de la ville nous permel de noter les plantes dominantes :
Ceratonia Siliqua. — CC. Erica scoparia.
Celtis australis. Delphinium junceum. Olea europæa. Helianthemum Tuberaria. Phyllirea media. Daucus laserpitioides. Myrtus communis. Pimpinella lutea. Pistacia Lentiscus. Eryngium tricuspidatum. Calycotome spinosa. Euphorbia biumbellata. Genista ulicina. Ampelodesmos tenax.
— numidica. Andropogon hirtus. Smilax mauritanica. Aira capillaris.
Osyris alba. Desmaziera sicula. Daphne Gnidium. Pteris aquilina, etc. Vincetoxicum officinale. — CCC.
De Djidjelli on peut en deux jours gagner les Babors (1).
En quittant la ville, on suit le bord de la mer jusqu'à l'oued Kisser. Un massif montagneux peu élevé domine la route; c’est le Pinus Pinas- ler qui est l'essence caractéristique jusqu'au cap Cavallo, limite occi- dentale de cette Conifère en Algérie. Le Genista numidica et Y'Erica scoparia forment de trés grandes broussailles, le pays est couvert d'une végétation luxuriante, et l'humidité du sol se révéle par la fréquence du Juncus Leersii, J. anceps, Schonus nigricans, Laurentia Michehi; le Pedicularis numidica Pomel croit aussi sous les Pins maritimes, de Collo au cap Cavallo.
L'oued Kisser se perd sur une plage sablonneuse couverte de Diotis candidissima et d'Eryngium maritimum.
Le sentier que nous suivons s'éloigne de la mer et traverse une épaisse forêt de Chénes-liége où abondent les Centaurea tagana, Arbutus
(1) En parcourant l'itinéraire suivant :
Djidjelli à Timizer, route en construction, trois heures de mulet. De Timizer au col d'el Aouana, trois heures.
Du col aux maisons forestières de Guerrouch, une heure.
De Guerrouch chez le caid des Beni-Foughal, deux heures.
Deuxième journée. — Du bordj du Caid au col de Selma, deux heures.
Du col de Selma chez le cheik des Beni-Zoundai, trois heures.
De la maison du cheik chez les Beni-Bezez au pied du Babor, deux heures et demie.
Troisième journée. — Ascension du Babor, arrivée sur la ligne des crêtes vers sept heures. Dans le méme jour on peut encore gagner le Kerata ou Amoucha (cinq heures de mulet); mais il est préférable de passer la journée dans la montagne, d'y camper 9! de coucher dans un des nombreux villages indigènes qui sont à proximité.
58 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
Unedo, Genista ulicina, puis dans une clairière le Vitex Agnus-castus en fleur, Hypericum afrum, Silene hispida Desf., Galactites muta- bilis.
Nous remontons loued ombragé de Populus nigra, Ulmus campestris, Nerium Oleander, Vitis vinifera. Les sources deviennent fréquentes et abondantes, elles sont entourées de Frénes et d’Aunes (Alnus gluti- nosa); le Scrofularia longipes y est commun.
Une population kabyle dense habite des maisons couvertes de liège et cultive une série de vallées et de coteaux que nous longeons depuis que nous avons quitté la forêt du littoral.
Le col d'El Aouana où nous arrivons maintenant est le commencement d'un territoire forestier immense (40 000 hectares), le Chêne-liège est l'espéce dominante; mais, dans les bas-fonds, le Quercus Mirbeckii, Chéne-Zen, forme d'importants peuplements; le Quercus Afares devient au contraire plus commun à mesure que l'on s'éléve, mais sur les som- mels il est à son tour remplacé par le Quercus Ballota.
Les maisons forestiéres de Guerrouch apparaissent enfin sur un plateau gazonné, mais entouré de toutes parts du feuillage sombre des Chênes. Une herborisation de quelques instants nous donne : Quercus numidica sp. nov. — Q. Pseudosuber DC. pro parte et Auct. alger. non Santi nec Desf., — intéressante espéce que l'on peut regarder comme un hybride des Q. Afares et Q. Suber. Le tronc est couvert d'un liège mâle en tout semblable à celui du Chéne-liége, mais les feuilles caduques tardivement sont une réduction de celles du Q. Afares, espèce avec laquelle on l'a autrefois confondu (voy. Prodr. Q. Pseudosuber); ce Faux-liége est rare, on n'en connait que des pieds isolés au milieu des Afares et des Chénes- liège. La comparaison de ce Chéne avec les échantillons, que j'ai pu exa- miner, du Q. Pseudosuber Desf. de Tlemcen (herb. Pomel) et du Q. Fon- tanesii Guss. de France m'a convaincu que cette forme était nouvelle ; je pense aussi que le Q. Pseudosuber Desf. de Tlemcen est un hybride du Q. Suber (Q. tlemcenensis), le Q. Fontanesii de France et d'Italie, pourrait bien être aussi un Q. Suber X Q. Cerris.
Quercus Afares Pomel; ce Chéne est souvent désigné sous le nom de Q. castaneæfolia (C.-A. Mey) et ne peut cependant pas être complétement assimilé à cette espéce dont il est au moins une variété ; il s'en distingue facilement par ses étamines glabres et surtout par ses 4-5 fruits en grappe serrée portée sur un court et épais pédoncule. Ce bel arbre, cultivé à Alger à la pépinière de la colonne Voirol, croit avec vigueur;
? il mériterait d'être introduit aussi dans les pares de l’Europe tempérée.
Nous récoltons ensuite :
TRABUT. — DE DJIDJELLI AUX BABORS.
Acer campestre ! (seule localité de cet arbre en Algérie).
Populus Tremula.
Cerasus Avium.
Laurus nobilis.
Ilex Aquifolium.
Delphinium silvaticum Pomel (magni- fique espèce encore peu connue).
Viola sylvestris.
Meehringia stellarioides.
Androsæmum officinale.
Trifolium pratense. — CC.
Sanicula europæa.
Eupatorium cannabinum.
Campanula alata. Vinca media. — CCC.
Vincetoxicum officinale (F.
Pomel). Cerinthe gymnandra. Atropa Belladona. Scutellaria Columna. Melissa officinalis. Teucrium atratum. Iris stylosa. Cephalanthera latifolia. Aspidium aculeatum. Scolopendrium officinale. Athyrium Filix-femina.
50
Fradini
Lappa silvestris Pomel.
A Guerrouch, le service des Forêts a fait planter des Noyers, Chàtai- gniers et divers arbres fruitiers qui y prospérent; le climat y est assez doux, malgré l'altitude, car des Eucalyptus y ont acquis un développe- ment normal.
De Guerrouch au bordj du caid des Beni-Foughal, le sentier ne quitte pas la forêt de Chênes, ct, si les espèces de Quercus changent suivant l'altitude, la nature du sol, chaque espéce aussi est sujette à des variations dont quelques-unes ne manquent peut-étre pas d'intérét. Les exploitants de Chénes-liége ont déjà noté de grandes différences dans les qualités des lièges, dont les prix vont de 120 francs à 15 francs les 100 kilo- grammes. M. le député Bourlier a signalé, au Congrés de l'Association francaise pour l'avancement des sciences (1881), deux races de Chéne- liège, dont l'une donne du liège trés fin et l'autre un liège grossier et se formant lentement.
Il est certain que tous les organes de cet arbre sont sujets à de grandes variations. Les feuilles sont tantôt grandes, tantôt petites, trés différem- . ment et inégalement dentées ; les glands trés gros et courts ou très longs, presque doux ou amers et mürissant à des époques différentes.
Il. n'est pas étonnant que le liège se reproduise aussi différent d'un arbre à l'autre. Ne conviendrait-il pas, par une étude attentive, d'établir S'il y a lieu, les corrélations qui peuvent exister entre les caractéres des différentes parties des appareils végétatifs ou reproducteurs etles variétés du liége?
Lors de notre passage, quelques indigénes étaient occupés au démas- clage; mais combien il est regrettable que l'État ne donne pas au service des Foréts les ressources nécessaires pour terminer rapidement cette opération préliminaire ; un arbre non démasclé est d'un revenu à peu prés nul pour l'État ; démasclé, au contraire, il forme tous les ans sur la surface dépouillée (10 200 centimétres carrés) environ 3 millimétres
60 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
d'épaisseur de liége, substance de grande valeur qui doit devenir pour l'Algérie le principal produit forestier et presque un monopole.
Un arbre démasclé donne aprés dix ans 6,700 de liège (Lamey), soit un produit d'une valeur moyenne de 4 francs, et le démasclage ne revient pas à 10 centimes par arbre. On compte en moyenne 130 arbres par hectare ; les 430 700 hectares de forêts de Chênes-liège d'Algérie pour- raient fournir pour 22 millions de liége par an. Le transport du liége ne nécessite pas de routes forestières carrossables, les mulets des indi- gènes suffisent pour apporter ce produit trés léger aux grandes voies de communication.
En devisant de ces choses nous arrivons à notre gite d'étape ; le caïd à qui nous sommes recommandés nous recoit avec cette hospitalité pa- triarcale tant de fois vantée de nos chefs indigènes.
Nous parcourons encore le lendemain des régions boisées jusqu'au col de Selma (892 métres). Peu avant d'arriver à ce point, nous décou- vrons sur une pente humide le Pteris cretica, Fougère nouvelle pour l'Algérie; plus loin nous notons : Daucus setifolius, Ptychotis atlan- tica, Bupleurum fruticosum, Scabiosa maritima, variété à trés grandes fleurs, Dianthus liburnicus et D. Bisignani ?, Thapsia villosa et Th. garganica, Ferulago sulcata, Putoria calabrica, Festuca atlan- tica.
Le versant méridional sur lequel nous descendons est dépourvu de végétation arborescente; le Dyss (Ampelodesmos tenax) couvre le pays au loin de ses touffes saillantes; des arbres ne se retrouvent plus que dans les fonds de vallée, les ravins, ce sont encore : l’Alnus glutinosa, les Populus alba et P. nigra, le Fraxinus australis et, chez les Beni- Zoundai, des Noyers d'une aussi belle venue que ceux de la Savoie. .
Plus bas, sur les bords des oueds reparaissent les Lauriers-Roses ; les plaines, en grande partie cultivées, sont parsemées de Retama sphæ- rocarpa et de quelques rares Crategus Azarolus. Le Dyss et le Genista tricuspidata se réfugient sur les coteaux, et dans les rochers croit abon- damment le Micromeria Juliana. à
Lorsqu'on se retourne vers le nord, les massifs montagneux,que nous venons de traverser, présentent un aspect singulier; la végétation arbo- rescente, réfugiée sur les sommets, forme, vers 1200 mètres, une calotte noire qui tranche nettement sur le ton jaune des flancs desséchés par les ardeurs du soleil et les vents du sud. Aprés avoir passé la nuit chez un indigène établi sur un mamelon appelé le Nador, nous remontons l'oued et gagnons le village des Deni-Bezez, par une gorge étroite qui conduit au pied méme du Babor; l'eau est abondante, les jardins sont peuplés d'arbres fruitiers. Sur les bords du ruisseau nous notons le Lavatera stenopetala et nous abordons enfin la montagne; Un bon chemin déroule
TRABUT. — DE DJIDJELLI AUX BABORS. 61
ses lacets à travers le Quercus Ballota; la végétation est très avancée, cependant nous récoltons :
Sedum multiceps. Galium ellipticum. Sinapis pubescens. Carduus macrocephalus. Saxifraga globulifera. Cirsium Casabonæ. Bupleurum spinosum. Seriola lævigata var. Balansæa Fontanesii. Festuca atlantica.
Vers 1300 à 1400 mètres, le Cèdre remplace le Quercus Ballota et devient l'essence dominante sur toutes les crêtes et le plateau supérieur. Nous récoltons :
Pæonia atlantica (fruits). Anthemis pedunculata. Erysimum grandiflorum. Calendula tomentosa var. Sisymbrium Alliaria. Catananche cærulea. Alyssum spinosum. Onosma echioides.
— serpyllifolium. Cynoglossum nebrodense. Thlaspi perfoliatum. Teucrium Chamædrys var. Helianthemum rubellum. Daphne Laureola.
Malope asterotricha. Trisetum flavescens. Erodium asplenioides Desf? Melica Cupani.
Cotoneaster nummularia. Cynosurus Balansæ. Prunus prostrata. Bromus erectus. Bupleurum montanum. Phleum Bæhmeri.
Inula montana. Festuca lamprophylla, sp. nov.
L'Helichrysum lacteum très répandu présente encore quelques-unes de ses fleurs argentées et attire notre attention par ses rameaux à renfle- ments bulbeux analogues à ceux que produiraient des piqüres d'insectes gallicoles.
Le Babor présente une croupe régulière d'environ 7-8 kilomètres de l'est à l'ouest, le sommet (1976 mètres) est occupé par un plateau trés boisé, le versant nord est aussi entièrement couvert par une forêt très dense de Cèdres, Abies numidica, Acer obtusatum, Populus Tremula, Quercus Mirbeckii souvent couvert de galles, Ilex Aquifolium, Taxus baccata et Quercus Afares.
Le superbe Sapin qui vit sur les Babors, en compagnie du Cédre, et connu sous le nom d' Abies Pinsapo var. baborensis, répandu dans quel- ques pares sous celui d'Abies numidica, m'a paru trés différent de l'Abies Pinsapo par ses feuilles bien plus longues, trés obtuses, pourvues de deux lignes blanches en dessous seulement, celles de la face inférieure des rameaux infléchies sur les côtés, les écailles carpellaires müres dila- tées, auriculées supérieurement, la bractée plus longue.
Deux raretés habitent sous la futaie du versant nord : l'Epimedium Perralderianum et le Campanula trichocalycina.
62 SÉANCE DU 29 JANVIER 1889.
Du Babor on arrive facilement au Tababor, par le Tizi-el-Souk, puis on trouve là un sentier des plus pittoresques par lequel on atteint le Kerrata et les gorges du Chabet. Ce trajet s’effectue à travers des régions déjà décrites et les plantes à récolter sont consignées dans la liste géné- rale.
De Djidjelli au Babor, nous avons traversé la région de l'Algérie qui recoit le maximum de pluies annuelles, on le devine facilement à l'exu- bérance et à la grande variété dela végétation arborescente. Les zones botaniques des stations qui s'étagent suivant l'altitude et la latitude du littoral à la montagne peuvent se classer de la manière suivante :
4° Coteaux et heux secs et pierreux du littoral, avec Olea, Pistacia Lentiscus, Ceratonia Siliqua.
2° Collines humides du littoral à Pinus Pinaster, Erica scoparia et Genista numidica.
3^ Alluvions et sables, forêt de Chènes-liège avec Arbutus, Myrtus.
4° Bords des eaux : Alnus glutinosa, Fraxinus australis, Populus nigra.
5° Zone montagneuse des forêts de Chênes.
e
. Quercus Mirbeckii. — Bas-fonds et zone moyenne.
b. Quercus Suber. — Zone moyenne.
c. Quercus Afares. — Zone moyenne.
d. Quercus Ballota. — Zone supérieure et versants sud.
6° Versants méridionaux déboisés à Ampelodesmos tenax. T° Plaines ondulées à Retama sphærocarpa. 8" Massif des Babors.
a. Ceinture de Quercus Ballota au sud et Quercus Afares au nord.
b. Zone supérieure : Cedrus atlantica, Abies numidica.
LISTE DES ESPECES REMARQUABLES NOTÉES DE DJIDJELLI AUX BABORS PAR LES BENI-FOUGHAL, ET DE LA A BOUGIE, PAR LE CHABET-EL-AKRA.
Aquilegia vulgaris L. (A. viscosa | Arabis Turrita L.
Gouan). — sagittata DC. Delphinium silvaticum Pomel (Guer- | — verna R. Br.
rouch). — auriculata Lmk. Pæonia atlantica Exs. Kral. (Coss. | — Doumetii Coss.
Comp.). Sisymbrium Alliaria Scop. Berberis hispanica Boissier. Thlaspi perfoliatum. Epimedium Perralderianum Coss. Draba hispanica Boiss. Chelidonium majus L. Iberis Balansæ Jord.
Arabis Pseudoturritis Boiss. et Held. | Biscutella radicata Coss. et DR.
TRABUT. — DE DJIDJELLI AUX BABORs.
Isatis Djurjurz Coss. et DR.
Alyssum spinosum L.
Alyssum serpyllifolium Desf.
Viola silvestris Fr.
— Munbyana Boiss. et Reut.
Dianthus liburnicus Bartl.
— Bisignani Ten?
Saponaria depressa Biv.
Mæhringia stellarioides Coss. et DR.
Malope asterotricha Pomel.
— malacoides L.
Lavatera stenopetala Coss. et DR.
— Olbia L.
Hibiscus palustris L.
Hypericum afrum Desf.
Androsæmum officinale All.
Acer opulifolium Vi.
— campestre L.
Erodium asplenioides Desf. (an sp. nov. ?).
Ilex Aquifolium L.
Rhamnus libanotica Boiss.
Genista numidica Spach.
— ulicina Spach.
Genista tricuspidata Desf.
— salditana Pomel (cap Carbon).
Cytisus sessifolius L. — Babor (Munby).
Acanthyllis numidica Coss. et DR.
Ononis arborescens Desf. var. — Cha- het.
— alba Poir.
Medicago sativa L. — Babor. — C.
Trifolium pratense L. — C.
Orobus niger L. — Babor.
Vicia ochroleuca Ten.
Potentilla pedata Willd. var. hirta L. (Munby).
— Fragariastrum Ehrh. (Munby).
— splendens Ram. (Munby).
— micrantha Ram.
Rosa pimpinellifolia Ser. (Munby)?
Rubus atlanticus Pomel.
Cotoneaster Nummularia Fisch. et Mey.
Sorbus torminalis Crantz.
— Aria Ehrh.
Prunus prostrata Labill.
Cerasus avium Lois.
(Enothera biennis L. (Munby).
Paronychia aurasiaca Vebb.
Sedum multiceps Coss. et DR.
Saxifraga arundana Boiss.
Saxifraga globulifera Desf.
Ribes petræum L.
Daucus laserpitioides DC.
—- setifolius Desf.
Bupleurum plantagineum Desf. (Bou- gie).
— spinosum Gouan. — CC.
— montanum Coss.
Pimpinella lutea Desf.
Ptychotis atlantica Coss. et DR.
Balansæa Fontanesii Boiss. et Reut.
Ferulago sulcata Desf.
Thapsia garganica L.
— villosa L.
Physospermum acteæfohum Koch.
Sanicula europea L.
Eryngium tricuspidatum L. var.
Viburnum Lantana L.
Lonicera arborea Boiss.
Galium lucidum AJ.
— ellipticum Willd.
— Perralderii Coss. et DR.
Asperula odorata L.
Putoria calabrica Pers.
Knautia arvensis Coult.
Scabiosa maritima L. var. — Col de Selma.
— crenata Cyrill.
Eupatorium cannabinum L.
Tussilago Farfara L.
Evax Heldreichii Parl.
Santolina canescens Lag.
Helichrysum lacteum Coss. et DR.
Doronicum scorpioides Willd.
Senecio Perralderianus Coss. et DR.
— atlanticus Boiss. et Reut.
Calendula tomentosa Desf. var.
Galactiles mutabilis Sp.
Carduus macrocephalus Desf.
Lappa (minor) silvestris Pomel.
Lapsana communis (Munby).
Deckera racemosa Pomel.
Taraxacum lævigatum DC.
Lactuca (muralis) atlantica Pomel.
Hieracium prenanthoides ? var.
Campanula alata Desf.
— trichocalycina Ten.
Erica scoparia L.
Lysimachia Cousiniana Coss. et DR.
Vinca media Lk. — CC.
Vincetoxicum (officinale)Fradini Pomel.
64 SÉANCE DU 29
Convolvulus mauritanicus Boiss. — Chabet.
Cerinthe gymnandra Gasp.
Onosma echioides L.
Myosotis speciosa Pomel.
Cynoglossum nebrodense Guss.
Atropa Belladona L.
Linaria —? — Babor.
Scrofularia tenuipes Coss.
Pedicularis (silvatica) numidica Pomel.
Digitalis (grandiflora) atlantica Pomel.
Odontites violacea Pomel.
Origanum hirtum Lk. var.
Thymus algerieusis Boiss. et Reut.
Micromeria Juliana Benth.
Calamintha nervosa Pomel.
— (grandiflora) baborensis (C. gran- diflora var. parviflora Coss.).
— (alpina) granatensis Boiss.
Melissa officinalis L. — Spont.!
Salvia aurasiaca Pomel.
Scutellaria galericulata L. (Mby).
— columns A/l. — C.
Brunella alba Pall.?
Betonica algeriensis B. Noé.
Stachys circinata L'Hérit.
Lamium flexuosum Ten.
Teucrium atratum Pomel.
— Chamædrys L. var.
Ajuga Chamæpitys Schreb.
Vitex Agnus-castus L.
Armeria plantaginea Villd.
Daphne Laureola L.
— oleoides Spreng.
Buxus sempervirens L. (Tababor).
Mercurialis perennis L.
Euphorbia dendroides L. (Bougie).
— biumbellata Poir.
— atlantica Coss.
Quercus (lusitanica) Mirbeckii DR.
— (castaneæfolia) Afares Pomel.
— Ballota Desf.
— Suber L.
— numidica sp. nov. (Q. Pseudosuber
JANVIER 1889.
DC. pro parte et Auct. alg. non Desf.).
Populus nigra L.
— alba L.
— Tremula L.
Alnus glutinosa L.
Abies numidica de Lanoy (A. Pinsapo var. baborensis Coss.).
Cedrus atlantica Manetti.
Pinus Pinaster L.
Taxus baccata L.
Ephedra nebrodensis Tinco.
Asphodelus luteus L.
Allium trichocnemis Gay (Bougie).
tuscus aculeatus L.
Iris stylosa Desf.
Epipactis latifolia Swartz.
Juncus Leersii Marsoon, htt.
-— anceps Luharpe, litt.
— glaucus Ehrh.
Pennisetum asperifolium Kuntz. Chabet et Bougie.
Erianthus Ravenne P. B.— Chabet.
Phleum Bæhmeri Web.
Aira capillaris Host.
Holcus mollis var. triflorus.
— lanatus L.
Ampelodesmos tenax. — CC.
Cynosurus elegans Desf.
— Balansæ Coss. et DR.
Festuca atlantica Desf.
— (ovina) lamprophylla sp. nov.
Desmaziera sicula Dum., litt.
Agropyrum panormitanum Bent. — Babor.
Isoetes Pertalderiana DR. — Bougie.
Aspidium aculeatum Koch.
Nephrodium pallidum Bory.
Asplenium Filix-femina Bernh.
Scolopendrium officinale Sm.
Pteris aquilina L.
— lanceolata Desf.
— cretica L. — Col de Selma.
M. de Vilmorin présente quelques observations à propos du tra- vail de M. Trabut. — Il cultive l'Abies Pinsapo var. baborensis, et il lui parait difficile de n'y voir qu'une variété. Le port de l'Abies baborensis est tout différent de celui de PA. Pinsapo, de méme que la disposition des feuilles autour des rameaux.
ROUY. — LE SILAUS VIRESCENS DANS LES PYRÉNÉES-ORIENTALES. 65
M. Rouy, à propos des observations présentées par M. Trabut sur certains hybrides de Chénes, fait remarquer que M. Pereira Coutinho a publié récemment, dans le Boletim da Sociedade Bro- leriana (1888), une monographie des Quercus de Portugal, et que cet auteur va mentionné quelques formes hybrides, notamment les Q. pedunculata x lusitanica, Tozza X lusitanica, Hex x Suber. M. Coutinho considère les Q. alpestris Boi:s., hybrida Brot. et Mirbeckii Dur. comme des variétés du type spécifique Q. lusita- nica Lamk, et rapporte au Q. Ilex L. les Q. Ballota Desf. et avel- lanæformis Colm.. Ge travail sera certainement utile pour l'étude des formes de Chénes si nombreuses et si variées qui existent dans la région méditerranéenne occidentale.
M. Rouy fait à la Société la communication suivante :
LE SILAUS VIRESCENS Boiss. DANS LES PYRÉNÉES-ORIENTALES, par M. €. ROUY.
En 1884, je publiai, dans la Revue de Botanique, une courte Note complétant, par l'énumération de toutes les localités francaises et l'aire géographique du Silaus virescens Boiss., les indications données par M. Ch. Magnier, d'aprés Ch. Royer, sur cette rare espéce. Je rappelai notamment que le S. virescens Boiss. (Bunium virescens DC.) croît non seulement dans la Côte-d'Or aux localités citées par Royer; mais encore dans le Cantal (commune de Brezons, leg. Roche ; commune de Pierrefort, leg. Malvezin), le Puy-de-Dôme (entre Riom et Châteaugay ; leg. Héribaud), et que Boissier l'avait signalé, dans son Flora Orienta- lis, dans les Pyrénées-Orientales francaises eten Bourgogne, sans parler toutefois des localités d'Auvergne, alors que M. Nyman (Conspectus fl. europ.) le mentionnait bien dans la France centrale, mais non dans les Pyrénées-Orientales. — Comme principale conclusion à ma Note, jattirai l'attention des botanistes de ce dernier département sur cette plante.
Appelé à Narbonne en 1888 par la session extraordinaire des Cor- biéres, je me trouvai en rapport avec un de nos distingués confréres du comité d'organisation, M. Paul Oliver, de Collioure, qui, depuis plusieurs années, explore et fait explorer avec soin le département des Pyrénées- Orientales au point de vue botanique. M. Oliver m'ayant confié ses car- nets d'herborisations en 1886 et 1887, j'y vis avec salisfaclion indiquée, à la date du 19 août 1886, la récolte du Silaus virescens à Orry de la vallée d'Eynes, dans une région presque alpine, curieux habitat pour
T. XXxvl. (SEANCES) 5
06 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
cette espèce plutôt montagnarde tant en France que hors de notre terri- toire; M. Oliver voulut bien, en outre, m'envoyer un pied de cette Ombellifère récolté par lui. Nous pouvons donc ajouter maintenant aux autres localités françaises du Silaus virescens la vallée d'Eynes, déjà si riche en raretés botaniques.
M. Maury, vice-secrétaire, donne lecture de la communication suivante :
LE STACHYS AMBIGUA Sm. EST-IL ESPÈCE, VARIÉTÉ OU HYBRIDE? par M. D. CLOS.
Au commencement de ce siècle, Smith décrivait dans l English Botany une nouvelle espèce de Stachys, son S. ambigua, ainsi caractérisé : Verticillis sexfloris, foliis e basi ovato-cordata lanceolatis, petiolis brevibus, caule tubuloso, et figuré t. 2089.
En 1825, Schiede, dans son recensement : De plantis hybridis sponte natis, comprend la plante de Smith, sous le nom de S. palustri-silva- tica (p. 42).
Cette méme année, Reichenbach donne une bonne figure du S. ambi- gua (Iconogr. bot. YII, t. ccxxi), faisant suivre la description de ces mots: « Species hybrida quibusdam videtur, quod nec negandum nee probandum erit... » (p. 20).
De Candolle, dressant, en 1832, Ja liste des hybrides connus, se borne à dire à propos des Stachys : « On croit que le S. ambigua est le pro- duit du S. silvatica fécondé par le palustris » (Physiol. vég., V, 109).
En 1844, Koch admet pour la plante la dénomination de Smith, avec cette remarque à la suite de la diagnose : « Media quasi inter antece- dentem (silvaticam) et sequentem (palustrem) », sans rappeler le nom créé par Schiede, et sans rien préjuger de l'hybridité ; fait d'autant plus étrange qu'il écrivait un an auparavant de la même espèce : « Ich habe die Pflanze lebend zu beobachten noch nicht Gelegenheit gehabt, aber mehrere Botaniker, welche sie an ihrem Standorte vährend längerer Zeit beobachten, sind der Meinung, dass sie ein bastard aus den beiden genannten Pflanzen sey » (in Rehlings Deutschlands Flora, IV, 286).
Dans le Prodromus de de Candolle (XII, 470), Bentham, en 1848, fait suivre la description du S. palustris de : y. hybrida: foliis longius petiolatis, corollis subexsertis, S. ambigua Sm.
En 1850, Grenier et Godron n'hésitent pas à inscrire, dans la Flore de France, la plante sous la dénomination de S. palustri-silvatica
CLOS. — LE STACHYS AMBIGUA SM. 67
Schied. (1), et dix-neuf ans après, le premier n'avait pas changé d'opi- nion, déclarant que ce Stachys habite çà et là au milieu des parents à Besançon (Flore de la chaine jurass., 625).
En 1854, Fr. Schultz consacre dans le Bonplandia (t. II, p. 235-237) un longarticle à la description comparative des S. silvatica et palustris, dotant celui-ci de plusieurs variétés, entre autres : de à. Kochii inter- médiaire (Mittellform), d'après J. Koch, entre les S. palustris et ambigua et servant de passage de l'un à l'autre (Übergangsform) ; de c. ambigua (S. ambigua Sm.).
En 1857, Boreau, sans se prononcer sur la question d'hybridité, inscrit la plante, dans sa Flore du Centre de la France, 3* édit., 529, sous le nom de S. ambigua Sm.
En 1858, Reichenbach eroitdevoir donner des figures des S. silvatica, ambigua (nom qu'il conserve) et palustris, et penche pour l'hybridité du S. ambigua « media inter præcedentem et sequentem » (Icon. Flore germ. XVIIL, t. Mccxv).
Kirschleger admet sans hésitation l'hybride S. palustri-silvatica, et en commence ainsi la description : « Intermédiaire entre les parents », qu'il termine de la sorte: « Parmi les espéces génératrices » (Flore d'Als., 644).
Godet, adoptant le S. ambigua dans sa Flore du Jura en 1853, écrit de cette plante : « Suivant Koch (Sturm Deutsch. Flora), elle se trouve dans des localités où il n'y a pas trace de S. silvatica » (p. 556), etajoute cette observation dans son Supplément, publié en 1869 : « M. Chapuis m'assure que ce prétendu hybride se trouve à Boudry, en quantité, dans une localité où il n'y a pas trace de St. palustris » (p. 154).
Le sentiment de Lecoq, auteur de travaux sur l'hybridation, mérile d'être rappelé. On lit dans sa Géographie botanique de l'Europe, t. VIII, 69: « Nous mentionnons ici le S. ambigua Smith, qui parait être une hybride des S. palustris et S. silvatica ; ou, s’il constitue une espèce distincte et non une hybride, il a été trop souvent confondu avec le S. palustris pour que nous puissions séparer son aire géographique. »
Mais voilà que Wirlgen croit constater l'existence des deux hybrides réciproques entre les deux espéces citées, et en 1863, à son exemple, F. Schultz, répudiant sa première opinion, admet non seulement le 8. palustri-silvatica Schied. (S. ambigua Sm.), mais encore le S. sil- vatico-palustris Wirtg., ajoutant : « Vereinzelt unter del Eltern. Die Antheren haben keine vollkommenen Pollen und die Samen sind alle fehlschlagend, wie bei der folgenden (S. palustri-silvatica) » (Phytost. der Pfalz, 440).
(1) Elle figurait ainsi dans la Flore de Lorraine de Godron, 1843-1844: S. palustris 8. ambigua
68 SÉANCE DU 25 JANVIER 1889.
Les deux hybrides viennent, dit-il, aux environs de Wissembourg; et ils figurent dans l'Herbarium normale Sch. sous les n* 126-127. Cepen- dant Billot avait distribué en 1856, sous le nom de S. ambigua, une plante récoltée par Wirtgen, en indiquant les deux synonymes S. silva- Lico-palustris F. Sch., S. palustri-silvatica Schied. (Flora Gall. et Germ. exsicc., n° 2343), réunissant ces deux formes.
Plus prés de nous, Charles Royer d'une part, M. Focke de l'autre (Die Pflanzen-Mischlinge, 339), en 1881, se prononcent pour l'hy- bridité du S. ambigua, que Royer choisit méme comme type d'hybride dans le vocabulaire mis en téte de sa Flore de la Cóte-d'Or, xvi (voy. aussi pp. 302-3). Quant à M. Focke, il le dit plus voisin tantót de l'une, tantôt de l'autre espèce, mais de forme variable (1).
Ainsi, la nature hybride dela plante a été admise, indépendamment de ces deux botauistes, par Schiede, Bentham, Grenier et Godron d'abord, plus tard par Grenier, Kirschleger, F. Schultz, Wirigen, auxquels il faut ajouter M. Bouvier (Flore de la Suisse et de la Savoie, 521); M. Edm. Bonnet (Petite Flore parisienne, 314); le frére Héribaud (Flore de l'Auvergne, 941).
Koch, Boreau, Reichenbach, Ch. Lecoq et bien d'autres ne se sont point prononcés; la même réserve est exprimée dans le Flora italiana de Parlatore et M. Caruel, t. VI, p. 180: « Se la S. ambigua di Smith sia cosa veramente diversa, e, a quanto asseriscono, un ibrido della S. pa- lustris e della S. silvatica, resta indagarsi. »
Cette fluctuation d'opinions est d'autant plusétrange queles S. palus- tris et silvatica croissent dans presque toute l'Europe et ont parfois la méme station. M. Focke dit bien que l'hybride a été observé en plusieurs lieux (Grande-Bretagne, sud de la Scandinavie, Allemagne, Belgique, France, Suisse) ; mais n'est-il pas étrange de ne pas le voir figurer dans un grand nombre de Flores où sont inscrits les S. silvatica et palustris, telles celles d'Espagne (Willkomm et Lange), d'Orient (Boissier), de Bel- gique (de Vos) et de plusieurs départements ou régions de la France : Seine-Inférieure (Blanche et Malbranche), Moselle (Holahdre), Morbihan (Lebel), Maine-et-Loire (Guépin), Vienne (Delastre), Dordogne (Des Moulins), Gironde (Guillaud), Lot-et-Garonne (Saint-Amans), Lot (Puel), Tarn-et-Garonne (Lagrèze-Frossat), Aveyron (Bras), Loire (Legrand), Jura (Michalet), Dauphiné (Mutel), Gard (de Pouzolz), Bouches-du- Rhône (Castagne), Hérault (Loret et Barrandon), Gers (Dupuy), Hautes- Pyrénées (Dulac), Haute-Garonne (Arrondeau).
Omis dansla Flore du bassin sous-pyrénéen, de Noulet, dans celle des
(1) « Bald der einen, bald der anderen Stammart ähnlicher, aber von schwanken- der Bildung » (Die P[lansen-Mischlinge, 339).
CLOS. — LE STACHYS AMBIGUA SM. 69
environs de Paris, de Cosson et Germain, dans la premiére édition de la Flore du Centre de la France de Boreau, dans la Flore de la Côte-d'Or de Lorey et Duret, le S. ambigua figure dans la dernière édition de la Flore de Toulouse, du premier de ces auteurs, dans le Synopsis (1** et 2* édit.) des seconds, et dans la troisième édition de l'ouvrage de Boreau. Dans sa Flore de la Cóte-d'Or, Ch. Royer l'inserit comme hy- bride, mais sans spécifier qu'il croit au milieu des parents.
M. Édouard Heckel, aprés s'étre livré à des expériences en Lorraine sur le S. ambigua, communiquait en 1876 à l'Association française pour l'avancement des sciences (voy. Comptes rendus dela cinquième session, à Clermont-Ferrand, pp. 507-508), les résultats obtenus, considérant cette plante comme une véritable hybride : « Le pollen et les ovules, dit-il, sont toujours inféconds. Le pollen déformé affecte la figure d'un ovoide qui tient le milieu entre celui du S. palustris et du S. silvatica. Cet hybride se trouve toujours au milieu de ses générateurs. Le père est le plus rare. » Un an aprés, l'auteur rappelait ses conclusions dans son avant-propos de la traduction de l'ouvrage de Darwin : Des effets de la fécondation croisée et de la fécondation directe dans le règne végétal, p. xir.
Une comparaison impartiale du S. ambigua Sin. avec les deux espéces d’où plus d'un le fait dériver par hybridité dévoile, contrairement aux assertions de Koch (Synops., 653), de Reichenbach (Icon. Fl. germ. HI, 1), sa ressemblance marquée avec le S. palustris, tandis qu'il n'a jamais du S. silvatica les feuilles ovales-cordiformes, minces et fétides à long pétiole gréle, ni les verticillastres 4-6 flores (mais bien de 6-10 fleurs), ni les poils glanduleux du calice et de l'axe floral, ni la couleur vineuse de la corolle à lobes de la lèvre inférieure étroits et réfléchis, ni enfin les drageons équilatéres, ces organes étant renflés en massue dans les S. palustris et ambigua. Déjà Mutel écrivait en 1836 : « Le S. ambi- gua Sm. est entre les S. palustris et silvatica, mais bien plus voisin du premier, dont il a tout à fait le port, les feuilles, et avec lequel on doit, à mon avis, le réunir à cause des intermédiaires » (Flor. franc. WT, 37).
Àu rapport de M. Focke (loc. cit.), C.-F. Pflümer a constaté que la plante prise et distribuée d'abord par lui comme S. ambigua n'est qu'une variété locale (nur eine Standorts varietät) du S. palustris.
Tandis que M. Lloyd écrivait, en 1876, du S. ambigua dans sa troisiéme édition de la Flore de l'Ouest de la France, page 246 : « A le port de S. palustris, dont il diffère par les feuilles toutes pétiolées ovales-lancéolées, en cœur à la base, fortement dentées en scie », il modifiait profondément son opinion à cet égard dix ans plus tard, dans sa quatrième édition de l'ouvrage, où la phrase citée est remplacée par celle-ci, page 275 : « Une forme à feuilles toutes pétiolées que jai vue
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dans la Vallée de la Loire et que M. Miciol a récoltée dans les mois- sons de l'île de Batz (Fin.), est à peine distincte du type et n'est pas S. ambigua Sm. »
Le S. ambigua figure comme hybride sous le nom de S. palustri- silvatica dans la Florule du département du Tarn de Martrin-Donos, où il est dit très rare et croissant avec les parents (p. 569).
Mais l'assertion croissant avec les parents est-elle suffisamment justifiée ? Je vois bien assigner trois localités communes aux S. palustris et palustri-silvatica de la Florule, mais aucune d'elles ne s'y applique au S. silvatica.
Au mois d'octobre dernier, je récoltais en fleur dans un fossé des environs de Soréze (Tarn), derrière l'ancien cimetière, des échantillons d'une plante plus développée dans toutes ses parties que le S. palustris type, étranger à la contrée, mais en offrant, du reste, tous les caraetéres essentiels. C'est trés probablement celle qui figure sous le nom de S. palustris comme croissant autour de Sorèze dans les Herborisations sur la Montagne Noire de Doumenjou (1847, p. 256). C'est elle, enfin, qui est inscrite dans nombre de Flores sous le nom de S. ambigua, et qui ne différant du S. palustris que par des feuilles briévement pétiolées et non sessiles, et par plus d'ampleur dans l'ensemble de l'organisation végétative et florale, doit étre tenue, non comme un hybride admis sans preuve depuis Schiede sous la dénomination de S. palustri-silvatica ou sous celle de S. palustris X silvatica, mais bien comme varietas petiolata du S. palustris.
Toutefois, on ne saurait refuser le titre d'hybrides à des formes intermédiaires entre les S. palustris et silvatica observées dans les lieux mémes oü croissent ensemble ces espéces, notamment d'aprés Kirschleger à Bouxvillers et Mülheim, par Wirtgen et Schultz à Wissem- bourg, par Grenier à Besancon, par M. E. Bonnet à Saint-Germain, d'autant que la famille des Labiées a déjà fourni un assez bon contin- gent d'hybrides (V. Focke, loc. cit., 339-341). Les deux plantes distri- buées par F. Schultz et Winter (Herbarium normale), sous les n° 126 et 127, diffèrent sensiblement entre elles et des S. palustris et silvatica, ainsi que du S. ambigua Sm. : la première, S. silvatico-palustris, aux feuilles longuement pétiolées, lancéolées et larges de 3 centimètres, subcordiformes à la base, grossiérement dentées, de la consistance et de la couleur de celles du S. silvatica; la seconde, S. palustri-silvatica, à feuilles à court pétiole, elliptiques et larges de 45 millimètres, super- ficiellement crénelées-dentées. Il n'y a pas, ce semble, de raison d'ap- pliquer à l'une de ces deux formes d'hybrides l'un de ces noms composés plutót que l'autre, car on a constaté l'absence de toute régle dans la transmission à un hybride des caractéres du pére et de ceux de la mére,
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ces caractères étant fréquemment fondus dans le produit. En consé- quence et jusqu'à ce que des essais d'hybridation artificielle entre les deux espèces aient donné des résultats positifs, il suffira d'inscrire à ces deux formes hybrides, longe-petiolata et elliptica, trés rares et proba- blement instables, sous la dénomination la plus ancienne de S. palus- (ri-silvatiea, avec cette réserve que ce nom ne préjuge en rien le róle des deux facteurs.
M. Malinvaud pense que si le Stachys ambigua a pu rester ina- perçu dans des localités où les S. silvatica et palustris sont large- ment répandus, la production de cette hybride est sans doute sub- ordonnée, indépendamment de la présence des parents (condition nécessaire, mais non toujours suffisante), à des circonstances adjuvantes dont le concours fait souvent défaut. D'autres Labiées donnent lieu à des remarques analogues; par exemple le Mentha rotundifolia, qu'on rencontre fréquemment au voisinage de ses congénéres, s'hybride presque toujours daus ce cas avec le M. sil- vestris, rarement au contraire avec le M. arvensis, plus rarement encore avec le M. aquatica. M. Malinvaud ajoute que ses observa- lions s'accordent avec celles de M. Clos; il a vu souvent sous le nom de S. ambigua, dans les herbiers, des plantes dissemblables, les unes paraissant être incontestablement des hybrides, d'autres n'étant que des variations du S. palustris. Ce dernier est notamment dis- tingué, par ses feuilles pétiolées, du S. ambigua, qui a les siennes subsessiles; M. Malinvaud a récolté sur les bords de la Dordogne, prés de Gluges (Lot), le 15 juillet 1887, un Stachys palustris absolument typique par le facies et l'ensemble des caractéres, sauf les feuilles qui étaient nettement pétiolées, comme il n'est pas rare de les observer, dans des stations trés humides, sur beaucoup de Labiées à feuilles ordinairement subsessiles (Mentha rotundifolia, M. silvestris, etc.).
12 SÉANCE DU 8 FÉVRIER 1889.
SÉANCE DU 8 FÉVRIER 1889.
PRÉSIDENCE DE M. DE VILMORIN.
M. Costantin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du 25 janvier, dont la rédaction est adoptée.
M. le Président annonce une nouvelle présentation.
M. le Secrétaire général donne lecture de lettres de MM. Bastit et Blondel, qui remercient la Société de les avoir admis au nombre de ses membres.
Dons faits à la Société :
Granel, Catalogue des graines récoltées au Jardin des plantes de Montpellier.
Reclu, Manuel de l'herboriste.
Renault et Zeiller, Sur les genres Fayolia et Palæoxyris.
Zeiller, Sur la présence dans le grès bigarré des Vosges de l'Acros- tichides rhombifolius Fontaine.
Sahut, Discours prononcé aux obsèques de M. J.-E. Plauchon.
Farlow, On some now or imperfectly known Alge of the United States.
Couthinho, Os Quercus de Portugal.
Baca, Catalogue des graines récoltées au Jardin botanique de Va- lence.
Briosi, Esperienze per combattere la Peronospora della Vite.
Martelli, Sulla fosforescenza dell’ Agaricus olearius DC.
Bulletin of the Torrey Botanical Club, 6 numéros.
M. Jumelle fait à la Société la communication suivante :
MARCHE DE L'ACCROISSEMENT EN POIDS DES DIFFÉRENTS MEMBRES D'UNE PLANTE ANNUELLE; par M. Henri JUMELLE (1).
Je me suis proposé, dans le courant de l'été dernier, de suivre les variations de poids qu'éprouvent les différents membres d'une plante annuelle, depuis la germination jusqu'au début de la maturation.
Mes expériences ont porté, dans ce but, sur des plantes (Lupin, Sar-
(1) Travail fait au laboratoire de botanique de la Sorbonne.
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rasin, Féve, etc.), cultivées dans de la ponce imbibée d'une solution nourricière. Le poids sec de chaque graine mise à germer était connu; pour déterminer les variations de poids survenues à un moment donné dans une des plantes en expérience, il suffisait donc de soumettre cette plante à une dessiccation compléte dans une étuve chauffée à 120 degrés, et de comparer le poids sec de cette plante au poids sec de sa graine, sans tégument.
Pour permettre de comparer plus facilement entre eux les résultats obtenus sur cliaque plante, le poids sec de chacune d'elles a toujours été rapporté à 1 gramme de graine sèche. Si, par exemple, une graine de Lupin pesant sèche 0,250 a produit une plante dont le poids sec était de 09,500 aprés un certain temps de végétation, nous avons admis que 1 gramme de graine aurait donné, à cette méme époque, 2 grammes de plante. J'ai pu, à plusieurs reprises, constater l'avantage de cette méthode, qui élimine, dans les résultats, les différences provenant des inégalités de poids des graines mises à germer.
La vie d'une plante annuelle, au point de vue des variations de son poids sec et de sa quantité d'eau, peut étre divisée en cinq périodes principales.
Premiére période, ou période germinative. — Le tégument n'étant pas encore tombé, la plante, dépourvue de chlorophylle, n'assimile pas. Cette plante augmente en poids frais, mais éprouve une diminution con- tinuelle de poids sec, due à la respiration et aux différentes transforma- tions chimiques, dont les cotylédons sont le siége principal. La racine apparait et s'allonge en augmentant régulièrement de poids sec. L'axe hypocotylé apparait à son tour et se développe rapidement, en général, d'une facon réguliére, comme la racine. En dehors de ce cas normal, on observe, pour le poids sec de l'axe hypocotylé, de nombreuses variations individuelles; mais il y a le plus souvent alors balancement entre la diminution du poids sec des cotylédons et l'augmentation du poids sec de l'axe. Il y aurait donc en quelque sorte, fréquemment, une répartition indifférente de substances entre l'axe hypocotylé et les coty- lédons.
L'absorption des substances minérales pendant cette période est trés faible.
Deuxième période. — Le tégument est tombé; les cotylédons verdis- sent et la tige se montre. La diminution du poids sec de la totalité de la plante continue, sous l'influence des transformations chimiques ; mais, d'autre part, la fonction chlorophyllienne, intervenant, introduit du car- bone dans la plante. Tandis que la perte augmente peu avec le dévelop-
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pement, le gain, au contraire, augmente rapidement avec l'accroissement de la surface foliaire. Au bout d'un certain temps, dont la durée varie avec les conditions d'assimilation, le gain l'emporte sur la perte, et le poids sec de la plante s'élàve alors de plus en plus.
Le poids sec de la racine, aprés la chute du tégument, s'accroit d'abord trés rapidement, puis, dans des proportions moindres, continue à augmenter jusqu'à la chute des cotylédons.
La proportion d'eau devient de plus en plus forte; en d'autres termes, la racine gagne plus rapidement encore en eau qu'en substance séche.
L'aceroissement en poids sec de l'axe hypocotylé, après avoir diminué, s'arréte; la quantité d'eau, au contraire, augmente constamment. Enfin la tige gagne sans cesse en substance séche, et, dans des proportions plus grandes, en eau.
Pendant tout ce temps, les cotylédons diminuent de poids sec, tandis que la quantité d'eau qu'ils renferment augmente au contraire sensible- ment, du moins pendant un certain temps.
La perte de la substance sèche des cotylédons est due à deux causes :
4° à des transformations chimiques (cette perte, dans de trés faibles proportions d'ailleurs, augmente réguliérement avec le développement);
2° à une migration de matières vers les autres parties de la plante (cette perte, trés grande pendant la germination, plus grande encore au moment où les premières feuilles se développent, va ensuite en dimi- nuant jusqu'à la chute des cotylédons).
Troisième période. — Les cotylédons viennent de tomber. Le poids sec dela plante gagne de plus en plus jusqu'à la floraison.
Aussitót que les cotylédons tombent, la substance séche de l'axe diminue brusquement, presque de moitié, ce qui prouve encore une relation étroite entre l'axe hypocotylé et les cotylédons. En méme temps, le gain par jour des racines, qui jusqu'alors s'était sans cesse élevé, s'abaisse momentanément. Dans la tige et les feuilles, au contraire, il se produit une forte augmentation du gain. Il y a donc eu, selon toute vraisemblance, migration de matiéres du bas de la plante vers le haut.
Dans les racines et dans l'axe hypocotylé, la proportion d'eau atteint, à cette époque, un maximum ; elle diminue, au contraire, dans la tige et les feuilles.
D'ailleurs d'une facon générale, quand il survient dans un organe une diminution ou une augmentation brusque de substance séche, la diminution ou l'augmentation correspondante d'eau n'est pas aussi rapide; la proportion primitive du poids d'eau au poids sec ne se rétablit que peu aprés.
Quand les phénoménes précédents se sont produits, la racine et la
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lige continuent à s'aecroitre en poids jusqu'à la floraison. Dans l'axe hypocotylé, la quantité de substance séche reste sensiblement la méme ; mais la proportion d'eau diminue sans cesse. Dans les racines et dans la lige, cette proportion d'eau, aprés étre redevenue à peu prés la méme qu'avant la chute des cotylédons, augmente, mais trés faiblement, jus- qu'au début de la floraison.
Quatrième période. — Les fleurs apparaissent. Les substances miné- rales qui sont entrées abondamment dans la plante depuis la chute des cotylédons, et dont l'absorption a atteint son maximum un peu avant la floraison, n'augmentent qu'en faible quantité dans la plante, quand les fleurs se développent.
Les racines éprouvent, à cette époque, une diminution, non plus seule- ment dans le gain, mais dans leur poids méme de substance sèche. Il y a donc nouvelle migration de maliéres vers le haut de la plante. On n'observe cependant pas ici, dans la tige, d'excés de gain correspondant; souvent méme la totalité de la plante, loin de s’accroître en poids, semble éprouver une diminution dans sa quantité de substance sèche.
Cette perte de poids ne peut étre due qu'à une forte respiration des fleurs en voie de développement, et la supposition est d'autant plus légitime que, comme le montre l'analyse, le gain en carbone passe, à cette époque, par un minimum.
Dans tous ces cas, l'eau suit encore les variations de la substance sèche, mais toujours dans des proportions différentes, augmentant plus rapide- ment et diminuant moins rapidement que celle-ci.
Cinquième période. — C'est la fin de la floraison et le commencement dela maturation. Dans la racine, la tige et les feuilles, il y a accroisse- ment considérable de poids sec. L'absorption des substances minérales est trés active. L'augmentation de la quantité d'eau est maintenant, au contraire, moins rapide que celle de la substance séche.
En résumé, le transport normal de matières, des parties assimilatrices vers les parties inférieures de la plante, semble, à certaines périodes de la végétation, se compliquer de migrations secondaires :
1° Au moment de la chute des cotylédons, les substances renfermées dans l'axe hypocotylé émigrent en partie vers le sommet de la tige, en méme temps que le gain en poids sec des racines diminue momentané- ment. L’axe hypocotylé se comporterait, tant que les cotylédons sont adhérents à la plante, comme un organe accessoire de réserve dont la fonction cesserait avec la chute des colylédons.
2 Au début de la floraison, une nouvelle migration de substances se produit, de la racine et des parties inférieures de la tige vers le haut de
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la plante. Cet appel de matières serait produit par une forte dépense due à la respiration des fleurs en voie de développement.
La quantité d'eau suit en général, mais moins rapidement et dans des proportions différentes, ces variations de la substance séche. Daus les cotylédons, au contraire, elle tend à augmenter tandis que la substanee séche diminue.
L'absorption des substances minérales, trés active au moment où les feuilles se développent, passe par un minimum an début de la floraison, et augmente de nouveau au début de la maturation.
M. Devaux fait à la Société la communication suivante :
SUR QUELQUES MODIFICATIONS SINGULIÈRES OBSERVÉES SUR DES RACINES DE GRAMINÉES CROISSANT DANS L'EAU, par M. DEVAUX.
Au mois de novembre 1888, j'avais arraché dans le jardin botanique de l’École normale quelques pieds de Graminées sur lesquelles je me proposais de faire des expériences de physiologie; aprés avoir coupé la totalité des racines à chacune des touffes, je plaçais la base de celles-ci daus des vases en verre remplis d'eau ordinaire et entourés de papier noir; de cette manière les racines nouvelles, qui se développèrent très rapidement au contact de l'eau, furent toujours à l'obscurité complète, tandis que les parlies vertes des plantes recevaient une vive lumiére. La manière dont les plantes supportèrent cette opération et le change- ment du mode de vie furent trés différents selon les espéces. Chez un Lolium, d'espéce non encore déterminée, il n'y eut que trés peu de feuilles qui moururent, et bientót la plante prit une apparence extré- mement vigoureuse; chez une autre espéce de Lolium beaucoup de feuilles se desséchèrent, et la plante parut souffrir notablement; enfin, l'Holeus mollis ne put résister qu'avec une grande difficulté, la plupart de ses feuilles périrent, et la plante tout entière languit de plus en plus jusqu'en février 1889, époque à laquelle je fis mes observations. Je possédais deux pieds différents pour chaque espéce, ce qui m'a permis de reconnaitre que les différences observées tiennent à la nature spéci- fique de la plante et non à sa nature individuelle. A ces différences dans les parties vertes ont répondu des différences de méme ordre et consi- dérables dans le système radieulaire.
Lozrum n° 1. — Je décrirai d'abord les modifications apportées dans
les racines du Lolium qui avait le moins bien résisté à l'opération que j'ai décrite plus haut. Ces racines ne se sont pas développées en grande
DEVAUX. — RAGINES DE GRAMINÉES CROISSANT DANS L'EAU. 11
abondance, et n’ont guère atteint qu'une longueur de 10 à 15 centi- mètres. Elles ont émis des radicelles nombreuses mais restant trés courtes, c'est-à-dire dont la longueur ne dépassait pas 2 centimètres. D'abord le développement des racines parut normal; mais, aprés avoir atteint une longueur de quelques centimètres, j'en vis un grand nombre dont le point végétatif, au lieu de continuer à suivre sa direction descen- dante à peu prés verticale, se mit à s'incliner vers le cóté, puis à se relever vers le haut, et à suivre à la fin dans sa croissance une hélice trés serrée dirigée plus ou moins obliquement dans le liquide. La plu- part des racines se trouvèrent alors terminées par une petite vrille for- mant trois à cinq tours, et trés analogue comme aspect à une vrille foliaire enroulée autour d'un support trés mince. Mais l'enroulement cessa bientót, el les racines se mirent à reprendre une croissance à peu prés rectiligne et descendante. Il m'est impossible de dire si le retour à ce mode normal de croissance fut simultané pour toutes les racines; mais ce qui est certain, c'est que d'autres contournements en hélice se montrérent à tous moments sur les racines, de sorte que bientót chaque racine prit l'apparence d'uné corde présentant quatre à cing nœuds formés d'autant d'hélices courtes et serrées, séparées par des entre- nœuds de quelques centimètres : l'ensemble du système radiculaire de cette plante que j'ai l'honneur de présenter à la Société, offre alors un aspect trés curieux et tout à fait anormal.
La répartition des poils radicaux sur ces racines est également inté- ressante. Ces poils apparaissent encore trés nombreux jusque sur les régions les plus àgées des racines, ce qui est un fait commun à toutes les racines aquatiques susceptibles de donner ces productions. Mais leur longueur et leur quantité sont des plus variables. Il semble en général que les portions rectilignes ne possèdent que des poils courts et épars, tandis que les portions contournées en hélice portent des poils trés longs, trés touffus et rayonnants autour de l'hélice dans tous les sens. Ceci porterait à penser que la production de ces poils, de méme que le contournement des racines, est liée à un ralentissement local de la crois- sance, comme nous l'avions fait observer dans une précédente commu- nication (1).
Quant aux radicelles, celles qui présentent une longueur de plus de l centimètre présentent aussi parfois au début le méme contournement en hélice que les racines. Mais il est à remarquer que la plupart sont arrétées trop tót dans leur croissance, comme l'indique la production de poils jusque sur le sommet. Il est curieux méme de voir que ces poils sont d'autant plus longs qu'ils se rapprochent plus du point végétatif, à
(1) Voy. Bull. Soc. bot., XXXV, séance du 13 juillet 1888.
18 SÉANCE DU 8 FÉVRIER 1880,
l'inverse de ce qui a lieu d'ordinaire, et qu'ils figurent alors au sommet de chaque radicelle un petit pinceau délié. Quant à l'arrét de croissance, il frappe non seulement les radicelles ayant cette longueur de 1 à 2 centimétres, mais encore de trés jeunes radicelles à peine sorties de la racine mére, ou méme encore sous l'écorce; de sorte que les seuls points végétatifs vraiment vigoureux et persistants sont ceux des premières racines, les plus grandes, dont la croissance se continue avec vigueur. En résumé, ces racines se distinguent des racines ordinaires par deux sortes de variations de croissance : la première, discontinue et portant sur une face de la racine, est un ralentissement local et momentané de cette croissance ; elle produit le contournement en hélice; la deuxième est une production exagérée de nouvelles radicelles qui se trouvent frappées de très bonne heure d’un arrêt de croissance définitif.
Loriux n° 2. — La deuxième espèce de Lolium a eu une croissance beaucoup plus vigoureuse et a émis des racines et radicelles en abon- dance; mais il est à remarquer qu'ici aucun contournement serré en hélice n’apparaît jamais, bien que la plante appartienne au même genre que la précédente. Les longues racines peuvent dépasser 25 centimètres, et elles émettent des radicelles de deux sortes, les unes grosses et courtes, peu ou point ramifiées; les autres longues et minces, beaucoup plus ramifiées. On observe ces deux espèces de radicelles sur la longueur totale d'une méme longue racine, mais par régions. Du reste, toules les radicelles de divers ordres sont également frappées de bonne heure d'un arrêt de croissance analogue au précédent, quoique moius hàtif. Les radicelles de premier ordre, grosses et courtes, peuvent atteindre 2 à 3 centimètres; les autres, longues et minces, peuvent dépasser 8 centi- mètres, et portent des radicelles de deuxième et troisième ordre, ces der- nières atteignant encore 1 centimètre. Il est à remarquer que les parties frappées d'un arrêt de croissance (indiqué par la formation de poils jusqu'au sommet) portent encore un grand nombre de points végétatifs de jeunes radicelles tous arrétés à divers états dans leur développement, de sorte qu'ici la multiplication des radicelles de divers ordres aurait été semblable à ce qui se passe chez le premier sujet considéré, mais la croissance aurait duré plus longtemps.
Les poils existent encore sur toutes les racines de divers ordres, mais se localisent par régions comme précédemment, certaines parties ayant beaucoup de poils serrés et longs, d'autres peu de poils épars et courts. Indépendamment de leur nombre et de leur dimension, ces poils pré- sentent des modifications intéressantes se rapportant à trois types distincts, entre lesquels existent de nombreux intermédiaires.
Les uns ont la forme ordinaire allongée et rectiligne ou simplement ondulée d’une manière irrégulière.
DEVAUX. — RACINES DE GRAMINÉES CROISSANT DANS L'EAU. 10
D'autres sont spiralés et représentent une hélice à enroulement très làche qui se présente au microscope comme un simple zigzag régulier; celte hélice existe aussi bien sur des poils excessivement courts que sur de longs poils où elle peut faire jusqu'à dix et douze tours complets. On les trouve partout sur les racines et les radicelles de divers ordres, mais leur répartition est variable : parfois on ne trouve à peu prés que des poils rectilignes dans certaines régions, tandis qu'ailleurs ce ne sont que des poils spiralés. En tout cas les deux sortes de poils sont toujours assez intimement mélangées et méme il n'est pas rare de voir un long poil présenter une portion moyenne spiralée, la base et l'extrémité restant rectiligne.
Il existe enfin sur cette dernière plante d'autres poils qui ne sont pas spiralés, mais dont l'extrémité est fortement renflée en une boule qui peut leur faire donner la dénomination de poils capités. Ici, ces poils sont assez rares, mais je dois les signaler, car j'ai eu l'occasion de les trouver sur d'autres espèces de Graminées, le Blé par exemple, poussant leurs racines dans l’eau. La grosseur de la tête est variable, mais elle peut atteindre cinq à six fois le diamètre du reste du poil, dans certains cas. Du reste, je dois dire que ces diverses sortes de poils sont reliées par toute une série d'intermédiaires, et méme j'ai vu parfois un poil rectiligne dans sa base, spiralé ensuite et capilé au sommet.
Cette deuxième espèce de Lolium présente donc, comme particularités, un développement exagéré de radicelles frappées de bonne heure d'un arrêt de croissance, mais moins tôt que précédemment; ces radicelles sont de deux sortes, courtes et grosses, ou longues et minces. Les poils radicaux présentent, non seulement les variations habituelles de taille et de nombre selon la région considérée de la racine, mais encore des variations locales de la croissance de leur propre membrane, d'ou résulte, soit un contournement en hélice, soit un gonflement terminal en massue.
Horcvs mozzis. — Cette dernière plante, comme je l'ai dit plus haut, a beaucoup souffert de l'opération subie. Elle n'a donné que trés peu de racines, dix tout au plus pour chaque sujet; ces racines sont de grosseurs Variant entre 077,6 et 1?»,2. Toute leur surface présente une apparence Verruqueuse, surtout vers le bas, car elle est couverte de tubercules jusque trés prés du sommet. En remontant vers le tiers supérieur de la racine, on voit ces tubercules percer l'écorce et sortir sous forme de petites radicelles qui restent toujours trés courtes, la plus longue n'atteignant jamais 4 centimètre. J'ai examiné la structure de ces for- mations quand elles ne représentent encore que de simples tubercules, c'est-à-dire prés du sommet, et j'ai vu que ce ne sont que des radicelles
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normales arrêtées dans leur croissance avant même d’être sorties de la racine mère. On en voit parfois jusqu’à deux ou trois qui se pressent au méme point de la racine, si bien qu'une seule section transversale les atteindrait toutes. Chez cette plante, les poils radicaux ont la forme nor- male, de sorte que la seule modification intéressante à noter est celte quantité de tubercules radicellaires représentant autant de radicelles arrêtées dans leur développement.
Résumé. — L'opération‘ subie par ces plantes, section totale des racines très près de leur base, paraît donc avoir provoqué chez toutes une pousse subite et plus ou moins abondante de racines adventives; la production s’est étendue à ces racines elles-mêmes qui se sont mises à produire des quantités de radicelles. Jusque-là nous n'avons affaire qu'à un phénomène bien connu. Mais tout à coup il semble y avoir eu arrêt de croissance pour ces jeunes radicelles, de sorte que beaucoup sont restées à divers états de développement, et souvent si courtes qu’elles n'avalent pas même encore percé l’écorce de la racine mère. Cet effet est dà sans doute à ce que toutes les réserves de la plante avaient été employées à ce moment-là, et aussi à ce que bon nombre de feuilles avaient bientôt péri faute de racine leur fournissant de l'eau. Quant au singulier contournement de la racine du premier Lolium et des poils du second, il paraitrait dû à des différences de croissance locale de cer- taines cellules, ou de certaines parties de cellules; peut-être aussi ces différences de croissance devraient-elles être rattachées à la cause pré- cédente, c’est-à-dire en définitive à ce que la plante aurait souffert de l'opération subie, mais il serait prématuré de le dire. Toutefois, il est bien intéressant de voir que ces variations sont différentes pour deux espéces d'un méme genre, et qu'elles se sont produites à l'obscurité complète.
Quant à la cause de ces variations, il est bien difficile de l'indiquer méme par une simple hypothèse, et il faut attendre les résultats d'autres expériences que je me propose d'entreprendre prochainement à ce sujet, cette communication n'étant qu'une simple prise de date. Je ferai remarquer seulement que l'absorption des liquides, dont les plantes se trouvent subitement privées lors de la section des raeines, peut être réta- blie par elle de deux manières différentes : les nouvelles racines formées peuvent s'allonger beaucoup sans se ramifier notablement, ou bien se ramifier au contraire, de manière à multiplier dans tous les cas les surfaces d'absorption. Il est intéressant de voir que c'est la tendance à la ramification qui est prédominante ici, c’est-à-dire que la plante tend à multiplier ses points végétatifs plutôt que les cellules issues de ces poinls : les centres de production sont multipliés, tandis que la produc-
DEVAUX. — RACINES DE GRAMINÉES CROISSANT DANS L'EAU. 81
lion elle-mème est peu abondante pour chacun d'eux, car les radicelles sont frappées de trés bonne heure d'un arrét de croissance complet. Enfin, un dernier point à noter est que, chez une espéce, cellequi a pu le mieux résister, on trouve sur une méme grande racine tanlót de longues radicelles trés minces et ramifiées, tantót de courtes radicelles grosses et portant des points végétalifs nombreux mais à une croissance arrêtée avant leur sortie méme du membre qui les porte : la multiplication des surfaces est donc obtenue ici des deux manières que nous avons indi- quées. Il y aurait sans doute beaucoup de recherches à faire dans ce sens, et ces recherches présenteraient cet intérêt particulier qu'elles pourraient donner des indications précieuses sur les modifications sponta- nées de la croissance et méme de la formation des orgaues, c'est-à-dire sur des modifications dont la cause intime est non pas extérieure mais intérieure. La plupart des recherches physiologiques faites de ce cóté ont en effet bien plutòt porté sur l'action qu'exercent les agents exté- rieurs sur les organes de la plante pour les modifier : les expériences que j'indique permettraient au contraire d'étudier les aclions internes qui peuvent déterminer ces organes à se modifier d'eux-mémes dans des conditions externes invariables, et par suite de faire avancer la science d'un pas nouveau dans un domaine encore bien inexploré, celui des causes intimes de la naissance et de la croissance des éléments vivants.
M. de Seynes demande s'il est bien exact de dire que la plante a souffert, il croirait plutót que c'est l'inverse. Les ondulations se manifestent souvent dans les cas de fasciation sous l'influence d'un excés d'humidité. Les racines se sont évidemment plus développées que dans la terre.
M. Devaux répond qu'il a simplement voulu dire que ce n'était pas sous l'influence de causes extérieures que s'était produit l'en- roulement.
M. Duchartre signale une certaine analogie entre les faits ob- servés par M. Devaux et les productions de racines dans l'eau, for- mant ce que l'on appelle des queues de renard, qui se montrent, ilest vrai, dans les eaux courantes. Le contournement en spirale sans cause apparente signalé par M. Devaux reste sans explication.
M. Dufour demande aux dépens de quels tissus se forment les tubercules signalés par l'auteur. i
M. Devaux répond que le tubercule s'est formé en partie aux dépens de l'écorce soulevée par la radicelle et mal digérée par elle.
T. XXXVI. (SÉANCES) 6
82 SÉANCE DU 8 FÉVRIER 1880,
M. Bonnier communique à la Société, au nom de M. Daniel, ie travail suivant :
STRUCTURE ANATOMIQUE COMPARÉE DE LA FEUILLE ET DES FOLIOLES DE L'INVOLUCRE DANS LES CORYMBIFÈRES, par MS. L. DANIEL.
1. Buphthalmum salicifolium. — C'est évidemment la plus diffé- renciée des Corymbifères. La foliole présente deux bandes, la bande supérieure, de beaucoup la plus épaisse et hypodermique ; l'autre est médiane et divise le parenchyme dense chlorophyllien en deux portions inégales. Ces deux bandes sont réunies sur les côtés, distinctes au milieu.
Plus haut la bande médiane devient interrompue en face le faisceau, et finalement disparait, tandis que la supérieure se maintient.
2. Gnaphalium, Antennaria, Filago. — Il n'y a plus qu'une bande;
ici elle est à la face inférieure, hypodermique et complète ; elle touche au faisceau trés petit dont le liber est plus ‘ moins scléreux.
Le sclérenchyme est trés développé pe nort à l'épaisseur de la foliole.
3. Asteriscus aquaticus. — La bana inférieure, hypoder- mique et trés épaisse par rapport à l'é 4 foliole, se compose de deux parties, l'une plus interne fib - touchant à l'épiderme
inférieur parenehymateuse et plus ou moins scléreuse. Cette bande est bien distincte du faisceau.
L'épiderme supérieur, à membranes trés épaissies, est caractéristique à cause de sa forme allongée, égale à six fois environ la longueur des cellules du parenchyme sous-jacent.
4. Carpesium cernuum. — La bande hypodermique inférieure est moins épaisse, exclusivement fibreuse, éloignée du faisceau. La bande existe dans toutes les folioles de l'involucre.
REMARQUE. — L'inuline existe en abondance à la base des folioles de l'involucre du Carpesium cernuum.
9. Jnula Conyza. — Ne diffère du Carpesium que par l'absence de sclérenchyme dans les folioles externes.
6. Les autres Inula. — Different de PI. Conyza par ce fait que la bande, hypodermique à la base de la foliole, devient plus ou moins mé- diane en se rapprochant du sommet.
7. Santolina Chamecyparissus. — La bande, très développée, est hypodermique en face le faisceau médian; elle devient médiane sur les
DANIEL. — FEUILLE DES CORYMBIFERES, 83 côtés. C'est un type de passage entre les Corymbifères à bande hypo- dermique, et celles à bande médiane.
Le faisceau, parfois séparé de la bande à la base, est généralement
entouré de sclérenchyme et présente une bande de sclérenchyme dans son liber.
8. Tanacetum vulgare. — Coupe analogue à la précédente, mais la bande de sclérenchyme est médiane dans toute son étendue.
9. Anthemis. — La bande médiane se réduit beaucoup en épaisseur ; elle n'est plus représentée que par un ou deux rangs de fibres. Entiére à la base, plus haut elle est interrompue en face le faisceau médian, qui comme dans les deux genres précédents présente du sclérenchyme trés accusé,
Par le sclérenchyme du faisceau, ce genre se rapproche des Santolina et des Tanacetum ; abstraction faite du faisceau, la coupe est absolument celle d'un Chrysanthemum.
10. Micropus perpusillus. — La loliole interne de l'involucre enve- loppe la graine.
La bande, trés épaisse, touche au faisceau trés petit et non scléreux.
Le parenchyme supérieur, trés réduit, n'existe qu'en face le faisceau médian, de sorte que la bande, médiane au milieu, devient hypodermique supérieure sur les cótés.
C'est un type de transition qui établit le passage aux Achillea, Eri- geron, etc., à bande hypodermique supérieure dans toute son étendue.
11. Anacyclus clavatus. — La bande médiane fibreuse est renforcée par du parenchyme incolore supérieur ayant tendance à se sclérifier. La foliole externe est la plus épaisse.
12. Aster, Solidago, Chrysanthemum, Pyrethrum, Leucanthe- mum.-— La bande médiane, entière à la base, s'interrompt plus haut eu face le faisceau médian. Dans les Chrysanthemum, Pyrethrum, Leucanthemum, cette bande, en devenant interrompue, tend à se conti- nuer par le bois du faisceau. Anatomiquement, la foliole de l'involucre dans ces trois genres est identique.
13. Achillea. — La bande de sciérenchyme est hypodermique supe- rieure et enveloppe complétement le faisceau médian.
L'épiderme supérieur fibreux ne se distingue pas de la bande.
14. Eupatorium cannabinum. — La bande hypodermique supérieure est scindée en quatre ilots, situés entre les faisceaux.
Les faisceaux n'ont pas de stéréome.
15. Erigeron canadensis, — La bande supérieure est formée de deux
84 SÉANCE DU 8 FÉVRIER 1889. ilots fibreux assez épais, interrompus seulement en facele faisceau médian toujours dépourvu de stéréome.
16. Souci cultivé. — Les ilots scléreux, en nombre variable suivant les coupes, tendent à se réunir en une bande médiane. Souvent entre les ilots de fibres on trouve du parenchyme scléreux.
17. Helianthus. — Les îlots, généralement au nombre de huit, restent partout distincts.
Dans l'H. tuberosus, on trouve de l’inuline à la base de la foliole. De plus les folioles internes présentent un arc inférieur de sclérenchyme dans le faisceau.
18. Jasonia tuberosa. — La bande médiane est formée par trois ilots, deux latéraux, et un médian moins développé.
Le faisceau présente un arc inférieur; à la base cet arc et l'ilot médian sont parfois réunis.
19. Senecio. — Les ilots sont au nombre de quatre ou de deux, sui- vant qu'il y a interruption ou non en face les faisceaux latéraux.
Il peut y avoir des ailes latérales trés développées et scléreuses entière- ment (S. Doria, S. Cineraria, etc.).
Ces ailes peuvent être très peu développées (S. Jacobea, S. vul- garis, etc.).
Je placerai ici les genres Galatella, Conyza ambigua, Stenactis, qui présentent une coupe analogue avec deux, trois ou quatre îlots, suivant que les deux îlots latéraux sont distin®ts ou réunis d'un seul côté ou des deux à la fois.
Dans ces trois derniers genres, le sclérenchyme est du reste moins accusé.
20. Bellis aunua. — Dans le Bellis annua, tout à fait à la base, on remarque un commencement d'ilots scléreux sur les côtés. C'est l’état précédent trés rudimentaire.
Bellis perennis ne présente pas trace d'ilots, mais en revanche il y a un commencement d'arc inférieur au faisceau médian.
21. Tripolium, Dahliaum, Doronic, Tussilago.— A partir de ces genres, on ne trouve plus de sclérenchyme dans les folioles de l'invo- lucre.
Les folioles présentent la structure inverse de la feuille, c'est-à-dire out le parenchyme lacuneux à la face supérieure avec localisation de la chlorophylle à la face inférieure.
Jamais aucune foliole ne présente la structure de la feuille.
22, Bidens. — Le Bidens bullata, qui présente la structure précé- dente, établit le passage au B. tripartita et au B. cernua, dont le verti-
DANIEL. — FEUILLE DES CORYMBIFÈRES, 85
cille externe incomplétement transformé en folioles présente en partie la structure typique de la feuille.
23. Callistephus epinensis, chinensis. — Cette plante est le meilleur type de passage que l'on puisse trouver entre la structure de la feuille et la structure de la foliole.
Dans la partie dressée de la foliole de l'involucre, on trouve, en effet, le parenchyme lacuneux à la face supérieure ; puis les lacunes sont situées indifféremment sur les deux faces, et enfin la partie horizontale terminale présente les lacunes à la face inférieure seulement.
Ce passage a lieu à des hauteurs croissantes en allant de l'extérieur vers l'intérieur. Dans les folioles les plus internes, la transformation est complète et la structure type de la foliole existe dans toute leur longueur.
M. Rouy demande si les observations de M. Daniel ont porté sur les Plarmica, dont les espèces ont été tantôt placées dans le genre Anthemis, tantôt réunies aux Achillea. Il désirerait aussi connaitre l'avis de l'auteur sur les rapports des Cineraria avec les Senecio. :
M. Bonnier répond que les Ptarmica étudiés par M. Daniel m ont présenté des caractères intermédiaires entre les Achillea et les Anthemis, et il n'a pas observé de différences entre les Cineraria et les Senecio.
M. Camus demande si l'auteur a. étudié comparativement les Corvisartia et les Inula.
M. Bonnier dit que M. Daniel a seulement indiqué l Inula Conyza comme différent des autres.
M. Malinvaud donuelecture d'une lettre de M. Silhol, instituteur à Saint-Paul-et-Valmalle (Hérault), qui annonce l'envoi d'un fasci- cule de plantes de l'Hérault destinées à être distribuées aux per- Sonnes assistant à la séance. M. le Président décide qu'une lettre de remerciments sera adressée à M. Silhol.
RG SÉANCE DU 22 FÉVRIER 1889.
SÉANCE DU 29 FÉVRIER 1889. PRÉSIDENCE DE M. H. DE VILMORIN.
M. Costantin, secrétaire, donne lecture du procés-verbal de la séance du 8 février, dont la rédaction est adoptée. M. le Président proclame membre de la Société :
M. PÉRAGALLO (H.), capitaine d'artillerie, rue Séguier, 20 bis, à Nimes, présenté par MM. Bornet et Flahault.
M. le Président annonce ensuite une nouvelle présentation.
M. Ramond, trésorier, donne lecture du Rapport suivant :
NOTE SUR LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA SOCIÉTÉ A LA FIN DE L'EXERCICE 1888 ET PROPOSITIONS POUR LE BUDGET DE 1890.
fr. €.
La Société avait en caisse à la fin de l'exercice 1887........... .. 37,465 15 Elle a recu pendant Fexertice T888. -o I.e eee Rees 14,832 95 Gest ün tota] dec... vL ELE 52,298 10
Les dépenses ont été de;.;.0, 04... coe c ne 15,882 31 L'excédent des recettes est ainsi de..... a ADU da vd: 36,416 33
Il y a eu, en outre, à porter à l'actif, pour
conversions de valeurs et fonds en dépót..... 8,320 »
Et au passif, pour le méme objet, une somme io cesis 83530 3 (Balance.)
L'excédent des recettes est représenté par les valeurs ci-après :
Rente de 1250 fr., 3 pour 100 sur l'État (6 titres nominatifs, n° 253,064, 8° série, 269,340, 275,681, 279,131, 6° série, 0,332,172, 6° série, et 0,287,862, 8° série, et 4 titres au porteur, n** 0,480,945, 0,256,073, 0,398,736 et 0,419,276) : Capital, d'aprés le cours de la Bourse à lépoque où la Société est devenue propriétaire de ces titres. -o olose ne Re 30,539 16 À reporter... ::....,. . 30,589 16
A. RAMOND. — SITUATION FINANCIÈRE DE LA SOCIÉTÉ. 81
Report: s. sr 20,539 16
Dépôt au Comptoir d'escompte............. 5,099 75 (1) Numeraire : o a o a PA Pr 321 42 Total (comme ci-dessus) ........ 36,416 33.
Les recetles et les dépenses se décomposent comme suit :
RECETTES. BEIC en caisse ER NN de T3812 SU eh e RES 31,465 79 307 cotisations annuelles (1 pour 1886, 6 pour 1887, | 296 pour 1888, 4 p. 1889), à 30 francs... .......... 9,210 » | DDR AH a vie, a 400 Mancs. 1 201 os aer eus 400 » T diplomes, à 3 francs oco eres 39 » Vente du CU DNA a aa RS EN 1,691 60 14.832 95 Remboursement pour excédent de pages........... 184 » r Subvention du Ministére de l'Agricult. et du Commerce. 1,000 » Subvention du Ministère de l'Instruction publique. ... 1,000. » Rente sur T'Etat (arrérages). o o 0) a eve 4 230 5 Intérêt de notre dépôt au Comptoir d'escompte...... 62 35 Torah Ee eR 3r a. 52,298 70 DÉPENSES. Impression du Bulletin (24 fr. 80 pour 1886, 2,794 fr. 90 pour 1887 et 4,745 fr. 40 pour 1888)..... 7,565 10° Revue bibliogr. et Table (664 fr. pour | 1887 et 1,036 fr. pour 1888)........ 1.400 à Cu de DAME. es S 355 » Brochage duj Bulletin (114 fr. 95 pour 11.362 15 i 1886, 488 fr. pour 1887, 408 fr. 15 di v d pour T388) PPS tiir cius 1,011 10 | Port du Bulletin (88 fr. 10 pour 1887, 385 fr. 40 pour 1888). ...,...,..... 473 20 Circulaires et impressions diverses. . ... 251 19 EMEND uei esee i t0 3 Chauffage et éclairage. ............. a" 200 1 510 99 15,882 37 Ports de lettres, timbres, impositions, reve assurances et frais divers........... 1,090 1 Bibliothèque, et mobilier. ............ 630 05 Honoraires du conservateur de l'herbier. 500 » ) 1350 » Honoraires du trésorier adjoint........ 500 » | vir | Gages du garcon de bureau...........- 350 » | Excédent des recettes (comme ci-dessus).................... 36,416 33 (1) Note ajoutée pendant l'impression. — Depuis le dépôt de ce compte, il a été
prélevé sur cette somme 1,555 fr. 75 pour paiement des impressions de 1888. Le mr plus est représenté aujourd'hui par un bon du Trésor de 4,000 francs, n° 186, du.
12 mars 1889.
88 SÉANCE DU 22 FÉVRIER 1889.
Quant aux conversions de valeurs et aux opérations d'ordre, elles ont donné les résultats ci-après :
3 Encaisse ala fin de 18875... 30,539 16
Rente sur l'Etat. Opérations de l'année. ............. » » Encaisse à la fin de 1888................ . 30,539 16
Encutise a la fin de 1587... .... -i «v COS
Versements. e 5,810 » | ze
Intérét de notre dépôt... dd i PE
955 20 Compt. d'escompte. 9,955 2
————á—— — —
( Remboursemenls. 4,3510 » | i A déduire. ! Frais de recou- 4,371 45 | vrement...... 67 45 \
Encaisse a la fin de 1888.5. x 10 e 5,555 15
( Encaisse à la fin de 1887...,... DEAN UR » Fonds reçus en dépôt. | Reçu en dépôt........................... 200 » ! REMOUS- ro re Re i PE 200 » ( Balance.)
Dans le compte soumis à la Société l'an dernier (page 180 du t. XXXV), les dépenses à solder pour l'apurement de l'exercice étaient évaluées à 3,900 francs. Mais le nombre des feuilles d'impression sur lequel cette évaluation était basée ayant été dépassé, ces dépenses se sont élevées à 4,114 fr. 15 (1). L'avoir effectif de la Société à la fin de 1887, évalué dans le compte de l'année à 33,965 fr. 75, aura donc été en réalité de 33, 291 francs.
Pour 1888, les dépenses restant à solder à la fin de l'année sont moindres qu'en 1887, nos publications étant relativement plus avancées ;
et par le méme motif l'évaluation de ces dépenses peut étre faite plus sürement. Eu voici le détail.
(1) Cette somme se décompose comme suit, ainsi qu'on l'a vu, d'ailleurs, ci-dessus
(p. 87), par le détail des dépenses payées en 1888, pour l'apurement des exercices antérieurs
Impressions de 1886 et de 1887 (solde)... 2,819 70 Brochage pour 1886 et 1887 (solde)...... 602 95 Port du Bulletin de 1837 (solde). V, ..... 88 10 Honoraires pour la rédaction de la Revue bibliographique (solde).............. 664 »
Total Sl 4,174 75
A. RAMOND. —- SITUATION FINANCIÈRE DE LA SOCIÉTÉ. 89
Dépenses
à prévoir. Impression de la session de Narbonue (10 feuilles). Di suivant fücture tite eere RH tee en coU qe 1,498. » Impression du dernier numéro du Compte rendu des séances (A»feuilles)- -Evaluation r. aa sarsan nnee moa ces 590 » Impression de la Table des matières et de la Couverture du volume (2 feuilles 1/4). Évaluation. ...................... 360 » Brochage, port et frais divers. — Ævaluation................ A00 » Soittau totalis 528 LEN comme ou 9,708 » Les valeurs en caisse à la (in de 1888 étant, comme je Pai indiqué pias haut, Ge o IW LO NI 3$ A E 36,416 33 l'avoir effectif de la Société à cette date (compte fait des dépenses restant alors à solder) ressortira d... rue let tue sers: 39108 33
C'est une situation analogue à celle qui s'est produite pour l'exercice 1887. Elle est méme un peu plus favorable. Dien qu'à la suite des me- sures qui ont élevé le taux de la cotisation des membres à vie, le nomhre de ces cotisations soit descendu, de l'ancienne moyenne de quatre ou cinq par année, à une seule cotisation pour 1888, les finances de la Société restent propéres. Nous pouvons, d'ailleurs, tenir pour cerlain que ces mesures se traduiront par une augmentation progressive du nombre des cotisations annuelles qui compensera largement, dans quelques années, la perte que nous éprouverons sur les cotisations à vie. Toutefois, dans la période de transition, les accroissements de dépenses devraient être évités. Or, j'ai le devoir de faire remarquer à la Société que pour l'impression du Bulletin, la principale de nos dépenses, les prévisions budgétaires ont été dépassées dans ces dernières années. Le nombre des feuilles d'impression qui, d’après ces prévisions, ne devrait être que de 45» a été de 51 pour le volume de 1887, et il sera de 53 pour le volume de 1888. Il serait bien désirable, me parait-il, que la limite budgétaire füt observée à l'avenir.
BUDGET DE 1890.